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579 SACREMENTS. CAUSALITÉ, PREMIÈRES EXPLICATIONS

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causæ alicufus effectua in anima, non dico solum « disponendo » serf « efflciendo » ; cfficiunt enim simpliciler, characterizando et ornando. Unde dico, quod singula sacramenta cdiquo modo ornant animant vel imprimendo characlerem, vel alio modo signando, et hujusmodi ornalus sive signationis sunt sacramenta causa c/ficiens. Mais, par de la cet effet direct et immédiat, les sacrements produisent la grâce. À quel titre ? Repoussant l’explication d’une condition sine qua non, tout au plus bonne à expliquer l’efficacité des sacrements de l’ancienne Loi, Alexandre recourt à l’explication d’une disposition appelant ou produisant la grâce : Sine præjudicio melioris sententiæ dicendum est, quod sacramenta sunt causse per modum malerialis disponenlis vel efficientis, large sumendo. Disponunt enim hominem et aptiorem reddunt ad gratiæ susceptionem, et etiam graliam infusant ad operandum expeditiorem. Unde sunt causa gratiæ, non quantum ad esse, sed quantum ad inesse modo convenienliori sive conformiori, et quantum ad modum operandi expeditiorem. Il faut donc dire qu’en même temps que le sacrement agit sensiblement sur le corps, une vertu spirituelle produit la sanctification de l'âme, appelée par la bénédiction sacramentelle, forme spirituelle atteignant l'âme et la disposant à la grâce : actio sacramenti ut est sacramentum non est per sensibilem qualilalem in se, sed per virtutem formæ intelligibilis, quæ est benedictio, qua agit disponendo, ut tali facta intinctione vel inunctione circa corpus, fiât a virtute spirituali talis sanctifleatio in anima. Cette vertu spirituelle n’appartient pas par nature à l'élément corporel du sacrement ; mais c’est une vertu surnaturelle qui lui est communiquée par la passion du Christ. En un bref et saisissant raccourci, Alexandre fait la synthèse de sa doctrine sur la causalité sacramentaire : Deus justifteat sicut causa efficiens separata ; gralia justifteat sicut causa conjuncla et in hoc ordine ftdes et charitas dicuntur justifteare. Sacerdos vero dicitur jusliftcare sive sanctifteare ministerio ; sacramenta vero dicuntur justifteare sive sanctifteare disponendo ; mandata vero dicuntur justifteare dirigendo et in hoc ordine est lex justifteans ; opéra vero dicuntur jusliftcare exercilio. Summa theologica, part. IV, q. v, a. 5. Les textes dans W. Lampen, op. cit., p. 6, 17 ; Gierens, op. cit., p. 30-33.

5. Saint Bonaventure.

Il reprend encore la comparaison du vase contenant la grâcg. C’est par leur intermédiaire que la sanctification passe dans l'âme ; c’est en ce sens que « les sacrements de la Loi nouvelle sont causes de la grâce et font ce qu’ils figurent. » In IV am Sent., dist. I, part. I, a. 1, q. m. Dans la question suivante (iv), Bonaventure établit le mode de causalité. Il rappelle une première opinion — celle d’Alexandre de Halès — selon laquelle les sacrements renferment une vertu créée, par laquelle ils in Huent sur l'âme et possèdent une causalité s’exerçant différemment selon leur objet. l’ar rapport à la grâce sanctifiante, ils sont cause sina qua non ; par rapport à l’impression d’un caractère ou d’un ornement dans l’a me, ils sont cause efficiente ; par rapport à la vertu qu’ils possèdent pour diminuer la concupiscence ou revigorer les puissances de l'âme, ils sont cause dispositive. Cette disposition est, non du côté de Dieu, mais du côté de l'âme : non disponit a parte agenlis, qui est Deus, sed a parle suscipientis, quod est anima. La raison dernière d’un tel système, c’est que la grâce est créée ex nihilo ; donc le sacrement ne dispose pas à la grâce ratione ejus ex quo, sed ratione cjus in quod recipitur. Nous retrouverons cette conception à la base de toute opinion préconisant la causalité dispositive.

Mais Bonaventure, sans réprouver cette explication, en propose une autre qu’il estime meilleure et prend à Guillaume d’Auvergne. Dans le sacrement il n’y a aucune vertu ni efficiente, ni disposilive par rapport à

la grâce ; mais il y a une assistance divine. Dieu pgit donc en même temps que le sacrement, tout comme à Xaanian le Lépreux, Elisée ordonna de se laver dans l’eau du Jourdain at simultanément Dieu opéra la guérison du malade. La vertu du sacrement n’est donc pas une qualité qui s’y adjoint, mais un simple rapport à la production de la grâce par Dieu et ce, en raison de l’institution divine, ex tali pactione Dominus astrinxit se quodam modo ad dandam graliam suscipienti sacramentum ; aslringit enim quodam modo Deum ad conjerendum, et ideo dicitur habere virtutem ad effteiendum et etiam disponendum. W. Lampen, op. cit., p. 22, 25-20 ; cf. Gierens, op. cit., p. 34-35.

Le Rreviloquium, part. VI, c. i, résume bien la pensée du Docteur séraphique : Poslremo, quoniam per hujusmodi signa sensibilia, divinitus institula, gratta Spiritus Sancti suscipitur et in eis ab accedentibus invenitur, hinc est, quod hujusmodi sacramenta dicuntur gratiæ vasa et causa, non quia gralia in eis subslanlialiler conlineatur nec causaliter effteiatur, cum in sola anima habeat collocari et a solo Deo habeat injundi, sed quia in Mis et per Ma graliam curationis a summo medico Christo ex divino decrelo oporleal hauriri, licel Deus non alligaverit suam potentiam sacramentis. W. Lampen, op. cit., p. 4.

On le voit, ici encore la doctrine est commandée par la thèse d’une création proprement dite de la grâce.

6. L'école dominicaine. — L'école dominicaine nous offre déjà, à cette époque, d’intéressants représentants. Voir H. -D. Simonin et G. Meersseman, De sacramentorum effteacia apud theologos ordinis prædicalorum, p. 3-57.

a) Roland de Crémone (| 1259). — Il dépend à coup sûr de Guillaume d’Auxerre. Pour lui, les sacrements ne causent la grâce qu’en tant qu’ils disposent l'âme à la réception de la grâce : Deus justifteat creando graliam in anima ; sacramenta justifteant aptando animam ad receptionem sacramentalis rei, id est gratiæ. Unde sacramenta sunt causa materialis adaptans justifteationis. In lV am Sent., dist. I, op. cit., p. 2-3.

b) Hugues de Saint-Cher († 1263). — Il emploie des formules assez générales que les écoles les plus divergentes pourraient s’approprier : sacramenta novæ. Legis efftciunt quod figurant, et justifteant… id est : Deus per illam viiii, quam dat sacramenta, effteit quod sacramentum figurât. Et comme conclusion : Quod solus Deus justifteat, verum est : auctoritate ; sacerdos autem : ministerio ; sacramentum vero ; causaliter, sacramentum dico novæ Legis, quia sacramenta veteris Legis tantum occasionaliter… In IV am Sent., dist. I, op. cit., p. 8-9.

c) Richard de Fishacre († 1248). — Il propose une solution apparentée à celle de Guillaume d’Auvergne et de saint Bonaventure (deuxième opinion) :.luslificationis factæ in anima tota causa immediata efficiens est Deus Trinitas. Le sacrement est dit cependant faire ce qu’il figure parce que, sans eux, Dieu n’agirait pas. L’exemple de la guérison de Naaman est repris pour l’expliquer. La relation qui existe entre l’eau du baptême et la justification dépend de la volonté divine : fœdus ergo quod pactum est inler Deum et homines in sacramentis est. In IV" m Sent., dist. I, op. cit., p. 16-18.

d) Robert de Kilwardbi] († 1278). — Il rappelle tout d’abord — comme saint Bonaventure — les deux opinions courantes, indiquant, comme le Docteur séraphique, la seconde comme plus probable. Puis il propose une troisième explication qui lui paraît plus simple et suppose deux sortes de justifications : l’une extérieure, effet du sacrement, l’autre intérieure, effet de la foi dont le sacrement est l’occasion, ce ; deux justifications ayant d’ailleurs Dieu comme cause efficiente. Sacramenta, quia assimilant hominem diinnæ vollintati, justifteant, sed non ut causa efficiens, sed ut