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553 SACREMENTS. INSTITUTION, DEFINITION DU MAGISTÈRE 554

ajoute : ceux des chrétiens qui n’ont pas le ferment sacré, considèrent le mariage, conclu selon la loi du Christ, comme le septième sacrement. Liber Margarita ?, tract. IV, c. i, dans Mai, Script, vet. nova collectio, t. x b, p. 355. Le « ferment sacré » n’est autre que le levain dont doit être fait le pain qui est changé au corps du Christ. Un contemporain d’Ébedjésus, le patriarche Timothée II († 1332) donne une nomenclature différente : le sacerdoce, la consécration de l’autel, le baptême, l’huile sainte (confirmation), les saints mystères du corps et du sang du Christ, la bénédiction des moines, l’office pour les défunts, le sacrement de mariage. En fin du livre, il ajoute un chapitre sur la pénitence et la rémission des péchés. Dans Assémani, Eibliolh. orientalis, t. iii, 2e part., p. 240. Cf. Jugie, Theologia dogmatica christianorum orientalium, t. v, Paris, 1935, p. 281.

Les hésitations et divergences des Arméniens furent-elles dénoncées au pape Benoît XII ? Toujours est-il qu’une enquête fut faite et qu’il en sortit une sorte de questionnaire auquel le catholicos des Arméniens devait répondre. L’acte d’accusation transmis aux Arméniens ne porte aucune précision sur le nombre septénaire, mais uniquement sur la vertu sanctificatrice des sacrements et leur validité en fonction de la foi ou de la sainteté du ministre. Prop. 42, 68. Denz.-Bannw., n. 51(1, 545. Toutefois, le document pontifical provoqua une réponse intéressante : l’Église arménienne, celle de Cilicie surtout, a toujours admis sans restriction les sacrements de l’Église romaine. Elle voit dans les sacrements des remèdes spirituels qui servent à notre salut et en reconnaît la vertu sanctificatrice. Tous les sacrements se rattachent à la tradition primitive de l’Église arménienne, seule l’extrême-onction fait quelque difficulté, si l’on considère la pratique, mais les évêques sont prêts à se conformer de plus en plus, sur ce point particulier, à l’usage de l’Église romaine. Voir Hefele-Leclcrcq, Hist. des conciles, t. vi b, p. 853.

e. Les documents du concile de Florence. —

Le principal document est le célèbre décret Pro Armenis, emprunté presque littéralement à l’opuscule de saint Thomas, De fidei arliculis et seplem sacramentis. L’assertion qui concerne le nombre de sacrements se retrouve identique chez saint Thomas et dans le texte conciliaire : Ntvse Legis seplem sunt sacramenta : videlicet baptismus, confirmatio, eueharistia, psenitentia, extrema unclio, ordo et matrimonium… Denz.-Bannw. , n. 695. Sur l’autorité du décret, voir Ordre, t. xi, col. 1310 sq. Dans le décret Pro jacobitis, il est dit que l’Église croit fermement, professe et enseigne que les cérémonies légales de l’Ancien Testament (parmi lesquelles les sacrements de l’Ancienne Loi) ont cessé d’exister à l’avènement de Notre-Seigneur Jésus-Christ et que les sacrements du Nouveau Testament ont commencé. Denz.-Bannw., n. 712.

Au XVIIIe siècle, dans la profession de foi prescrite par Benoît XIV aux maronites, l’Église romaine n’aura qu’à reprendre les formules de Florence. On y ajoutera cependant quelques précisions s’inspirant du concile de Trente : Item (profiteor) septem esse novee Legis sacramenta a Christo Domino nostro institula ad salutem humani generis, quamvis non omnia singulis necessaria, videlicet baptismus, etc.

La doctrine est, même en Orient, définitivement fixée, et les dissidents qui veulent en nier quelque partie se mettent aujourd’hui en contradiction avec l’enseignement traditionnel de leur Église.

I. Les Orientaux après le concile de Florence.

La doctrine générale des Orientaux sur les sacrements, après le concile de Florence, est pour ainsi dire calquée sur la doctrine catholique. Lt patriarche Jérémie II, dans sa première réponse aux luthériens (15 mai 1576), justifie l’appellation de (xuar^pia, « parce que sous des signes sensibles, ils ont un effet spirituel et occulte. Chaque sacrement a été consacré par les saintes Écritures. Ils ont une matière et une forme déterminées, une cause efficiente ou plutôt instrumentale. » Cf. Gédéon Cyprios, Kpizqç, tîjç ricXTjôeîaç, t. i, Leipzig, 1758, p. 36 ; Gabriel Severos, SuvTayji.aTi.ov Trepl tcôv àyftov xal îepcôv fj.uaT7)pt<ov, Venise, 1600 (édit. de 1715, p. 17) ; Meletios Pigas († 1601), ’OpOô-SoEoç SiSaaxaXla, Jassꝟ. 1769, p. po ?)’. On se reportera surtout aux professions de foi : Moghila, part. I, q. xcix, dans Kimmel, op. cit., p. 170 ; Dosithée, c. xv, id., p. 448-451 ; synode de Constantinople contre les articles de Cyrille Lucar, p. 404 ; synode de Jassy contre les mêmes erreurs, xv-xvii, p. 414. On peut cependant signaler des infiltrations protestantes chez Métrophane Critopoulos, voir Kimmel, op. cit., t. ii, p. 89-90, Théophylacte Gorsky († 1788), Ecclesiæ orientalis orthodoxa dogmata, Moscou, 1831, a. 8, p. 236, et quelques autres. L’enseignement des Églises d’Orient demeure néanmoins dans l’ensemble très ferme, tant sur la nature que sur le nombre, l’institution divine et les effets des sacrements. Voir sur tous ces points M. Jugie, Theologia dogmatica christianorum orientalium, t. iii, p. 12-32.

c) L’œuvre du magistère à l’égard du protestantisme.

La controverse sacramentaire entre catholiques et protestants dépasse de beaucoup la question de l’institution de sept sacrements par Jésus-Christ. C’est dans le paragraphe suivant, sur l’efficacité et la causalité des sacrements que nous devrons l’aborder dans toute son ampleur. Nous n’envisagerons ici que le sujet abordé par le concile de Trente dans le canon 1 sur les sacrements en général : l’institution des sept sacrements par Notre-Seigneur Jésus-Christ.

a. Les négations protestantes. —

Si Luther avait été logique avec ses principes sur la justification, il aurait dû supprimer tous les sacrements et ne garder que le sacrement de la parole. Mais il fallait compter avec les habitudes cultuelles enracinées dans le peuple. Et le réformateur émet, tout au début de son Prélude sur la captivité babylonienne de l’Église, une affirmation tranchante que les théologiens et les Pères de Trente retiendront sous cette forme pour la condamner : Sacramenta Ecclesiæ non esse seplem, seà vel plura vel pauciora, gaie vere sacramenta dici possunt. Pour justifier leur imputation à Luther d’une semblable assertion, les Pères du concile renvoient à trois ouvrages du réformateur. D’abord à la Captivité de Babijlone (1520), dont la phrase est presque littéralement extraite : Principiu neganda mihi sunt seplem sacramenta, et tria pro tempore concedenda, seiliect baptismus, eucharistia, pœnitenlia. Opéra, édit. de Weimar, t. vi, p. 501. Plus tard, Luther ne garde que deux sacrements : Duo rémanent vera sacramenta, baptismus et ccena Domini una cum evangelio. Les actes renvoient ici au « Testament ». Il faut lire : Vom Abendmal Christi, Bekenntnis (1528) : Dass die zivey sacrament bleiben, taufje und abendmal des Herrn neben dem Evangelio. Opéra, t. xxvi, p. 508. Enfin, sous le prétexte qu’aucun « sacrement » n’est nommé ainsi dans l’Évangile, Luther veut réserver ce terme à Jésus-Christ lui-même : Nullum sacramentorum septem in sacris libris nomine sacramenti censetur. Vnum solum habent sacrée litterx sacramentum, quod est ipse Christus Dominus. Disp. (1520), prop. De fide infusa et acquisita, 17, 18, Opéra, t. vi, p. 86.

Les actes du concile ne font appel qu’aux textes de Luther. On peut y ajouter ceux de Mélanchthon. La confession d’Augsbourg parle du baptême, de la cène, de la confession, de la pénitence, de l’ordre ecclésiastique, sans employer le mot sacrement, a. 912, a. 14. J.-Th Muller, Symbolische Bûcher, p. 41, 42.