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    1. SACREMENTS##


SACREMENTS. INSTITUTION, DONNÉES DU MAGISTÈRE 540

les forces premières. Or, de même que l’usage des remèdes éloigne les maladies du corps, ainsi le sacrement de la pénitence guérit les blessures mortelles de l’âme et rend la vie de la grâce ; et comme, enfin, des soins particuliers et le repos raniment les forces perdues, de même, l’extrême-onction efface les restes et les suites de la maladie spirituelle en donnant à l’âme de nouvelles grâces de force. « Les cinq sacrements dont nous venons de parler concernent et produisent la complète guérison et la sanctification de l’homme considéré individuellement ; mais l’homme est fait pour vivre en société ; il faut donc l’envisager comme partie du tout, comme membre de la famille humaine. Deux autres sacrements servent à perfectionner l’homme à ce point de vue : le mariage et l’ordre. La société humaine, dans l’ordre naturel, doit être gouvernée et elle doit se propager ; dans l’ordre surnaturel, deux choses sont pareillement indispensables : il faut que, toujours, des supérieurs se succèdent et soient pourvus du pouvoir nécessaire pour la sanctification et la direction de la société chrétienne, qui est l’Église : c’est à quoi l’ordre est destiné ; il faut que, toujours, de nouveaux membres soient donnés et engendrés à l’Église : telle est la fin du mariage. » N. Gihr, op. cit., p. 214-215. Le concile de Florence consacrera cet exposé dans son décret Pro Armenis, voir plus loin, col. 595.


II. L’INTENTION DU CHRIST, PLUS PRÉCISÉMENT INDIQUÉE PAR L’ÉCRITURE SAINTE.

La précédente démonstration, par raisons de convenance, quelle que soit l’apparence de rigueur qu’elle affecte, ne pouvait suffire en présence des arguments d’ordre historique mis en avant par les réformateurs du XVIe siècle. Il fallut en venir à une argumentation positive. Bellarmin et Grégoire de Valencia furent, à cet égard, des initiateurs.

L’autorité de la sainte Écriture est une des principales sources d’argumentation positive. Mais peut-on, avec la seule Écriture, prouver l’institution, par Jésus-Christ, des sept sacrements ? Nous avons rappelé plus haut, col. 495 sq., que, « dans l’Écrit ure, à propos des rites auxquels nous donnons aujourd’hui le nom de sacrements, se trouvent déjà exprimés à la fois leur symbolisme et leur efficacité dans la sanctification des âmes ». Sans prétendre trouver, dans les indications rassemblées, une démonstration proprement dite de l’intention de Jésus-Christ par rapport à la signification sacramentelle de nos sept rites, il semble néanmoins qu’une indication précieuse ressort à cet égard de leur rôle sanctificateur attesté par l’Écriture. Qui peut remettre les péchés, qui peut sanctifier les âmes, sinon Dieu ou celui qui a l’autorité de Dieu ? C’est vraisemblablement par une inconsciente identification entre l’élément sensible et matériel du sacrement et l’élément symbolique et proprement sacramentel, que nombre d’auteurs modernes et contemporains, étudiant l’origine des sacrements autres que le baptême et l’eucharistie, ont cru devoir recourir à l’hypothèse d’un développement faisant suite à une institution purement implicite. Sans doute, une telle hypothèse est bien différente de l’erreur moderniste contenue dans la proposition 40 du décret Lamentabili, voir plus loin, col. 561 ; il n’en est pas moins vrai qu’elle restreint singulièrement la portée de l’institution divine et qu’elle va à rencontre des plus sûrs principes de la théologie sacramentaire.

Nous aurons l’occasion de revenir sur ce point : présentement, il suffit de souligner que l’Écriture sainte fournit des indications suffisantes d’où il est permis de déduire logiquement que le Christ a eu l’intention de conférer une signification sacramentelle a certains rites implicitement proposés dans les enseignements du Sauveur. Le développement affecterait l’élément matériel, non l’élément formel (au sens où nous entendons ce mot avec Jean de Saint-Thomas) du sacrement.

D’ailleurs, n’est-ce pas le travail de recherche positive qui a été accompli dans ce Dictionnaire, à propos de chaque sacrement étudié séparément ? Pour le baptême, voir t. ii, col. 167-168. Pour la confirmation, t. iii, col. 975-1026, où l’auteur conclut que le Christ a voulu et laissé entrevoir la confirmation au moment de son baptême dans le Jourdain. Peu importe, d’ailleurs, la précision relative au temps et au lieu : ce qui importe, c’est la volonté du Christ (col. 1026). Pour l’eucharistie, voir t. v, col. 989-1121. Pour la pénitence, voir t.xii, col. 749-752. Étudiant la pénitence primitive, l’auteur envisage la collation par Jésus à l’Église d’un pouvoir sur le péché. Ici encore, la volonté de Jésus apparaît clairement, touchant la rémission des péchés commis après le baptême et confiant à l’Église l’exercice de ce pouvoir. Ce sont les modalités de cet exercice qui constituent le développement historique. La volonté du Christ existe formelle et explicite dès la collation du pouvoir. Pour l’extrême-onction, voir t. v, col. 1898-1927. « L’extrême-onction est antérieure à l’épître. Saint Jacques n’invente pas. Il parle d’un rite connu… Sa lettre a été composée vers 61. L’extrême-onction avait donc été connue et employée avant cette date. Il devient bien difficile, sinon impossible, de trouver entre son apparition et la mort de Jésus le temps matériel nécessaire pour qu’elle ait pu se glisser dans les communautés, puis se faire accepter et enfin s’imposer comme un rite qui s’accomplit au nom du Seigneur » (col. 1826). Pour l’ordre, voir son institution par le Christ, t. xi, col. 1193-1209 : « Le Christ pouvait instituer l’ordre simplement en le voulant et en exprimant sa volonté par rapport à ceux qu’il revêtait du caractère sacré (col. 1206). Le rite employé ensuite a pu être choisi par le Christ d’une manière très générale. Ici encore, le rite a pu subir des modifications, la volonté du Christ de lui conférer une signification sacramentelle est demeurée la même. D’ailleurs, le concile de Trente (session xxiii, c. iii) enseigne que l’ordre est un sacrement en s’appuyant sur II Tim., i, 6, 7. Pour le mariage, plusieurs paroles du Christ, notamment Matth., xix, 6, indiquent sa volonté d’élever l’institution naturelle du mariage à l’état de sacrement. Le texte de saint Paul aux Éphésiens (v, 32) indique que « le mariage n’est plus seulement un état qui impose des devoirs difficiles en certains cas et qui exige des grâces spéciales ; ces devoirs reçoivent par le seul fait de leur assimilation aux rapports entre le Christ et l’Église, non pas une difficulté de plus, mais une élévation qui les place en plein surnaturel ; c’est un nouveau titre pour qu’au mariage soit attachée la grâce de Dieu ». Voir t. x, col. 2069.

Dans le cas du mariage, avec plus d’évidence que dans les autres sacrements, se vérifie la souplesse des principes théologiques posés par Jean de Saint-Thomas. L’institution du sacrement de mariage se réduit à une simple élévation, par un acte de la volonté du Christ, d’une institution déjà existante à l’état de sacramentalité.


III. L’INTENTION DU CHRIST, FORMELLEMENT ATTESTÉE PAU LE MAGISTÈRE DE L’ÉGLISE. '

La Vraie preuve de l’existence de sept sacrements institués par le Christ réside dans l’enseignement traditionnel de l’Église. Le principe général de la démonstration positive est exprimé par la décrétale Ad abolendam de Lucius III, au concile de Vérone de 118-1 : « Il ne faut pas en cette matière (sur l’eucharistie, le baptême, la confession des péchés, le mariage ou les autres sacrements de l’Église) aliter sentire aut docere… quant sacrosancta romana Ecclesia prædicat et observât. Denz.-Bannw., n. 403.