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    1. RUSSIE##


RUSSIE. L’HÉRÉSIE JUDAISANTE

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surtout celles de saint Jean-Baptiste, puis « elles des vertus célestes, Michel, Gabriel et des autres guerriers, ils sont nos médiateurs, nos gardiens, ils portent nos prières à Dieu, prient pour nous, nous défendent du diable surtout à l’heure de la mort et portent nos âmes eil haut, des prophètes et autres justes de l’Ancien Testament… des apôtres, des saintes femmes fmironosilsy), des martyrs, des pontifes, des femmes martyres et des bienheureuses. À l’occasion de chaque groupe, Joseph fait un court panégyrique… On vénère aussi les reliques, les églises. Puis l’auteur parle du culte rendu au temple de l’Ancien Testament et aux églises du nouveau. Il interprète dans le sens d’édifice matériel le Tu es Petrus et la persécution contre l’Église de Jérusalem. Quelques-uns veulent que nous vénérions les images seulement quand elles sont tournées vers l’Orient. Ceci semble absurde à Joseph : on ne salue pas le tsar seulement quand il est à l’Orient. D’autres voudraient supprimer les églises et citent Jean Chrysoslomc pour qui l’église n’est pas un bâtiment, mais la communauté des fidèles. L’un n’exclut pas l’autre, réplique Joseph. Il ne faut pas seulement bâtir des églises, mais aussi se sanctifier. Ces dernières polémiques montrent des adversaires non judaïsants, mais plutôt rationalistes.

Joseph explique alors comment nous devons nous saluer les uns les autres, comment honorer les souverains (et il rappelle à ce sujet les obligations des princes). Il faut honorer et servir Dieu de façon toute spéciale. Puis il répète sa doctrine sur la Trinité et la ehristologie : « Le Christ est consubstantiel au Père suivant la divinité, consubstantiel à sa mère suivant l’humanité. » P. 330. À propos de l’Esprit-Saint, l’auteur trouve occasion d’attaquer longuement les latins sur le dogme de la procession. Il produit contre eux les arguments qu’on peut déjà appeler classiques : Joa., xv, 26 ; xiv, 14-16, 25-26, et donne l’exégèse de ces textes suivant la tradition des dissidents byzantino-slaves ; il cite à ce sujet d’abondants passages des Pères (avec la critique qui existait en Moscovie au xvie siècle).

De là il passe aux règles pour prier : recueillement, il faut prier non seulement des lèvres, mais des profondeurs de l’âme « comme les arbres qui ont des racines profondes ne sont pas secoués par le vent ». P. 345. Quand on ne peut prier à l’église, il faut le faire chez soi. Puis il termine ce long discours en énumérant ce qu’il faut faire pour plaire à Dieu : « sois juste, sois sage, sois le consolateur des affligés, nourris les pauvres… », etc. P. 362 sq.

8. Sur la parousie : contre les hérétiques qui pré tendent qu’il n’y aura pas de seconde venue du Christ. Le monde doit finir au bout de 7 000 ans, disaient ils. Or les 7 000 ans sont révolus et le monde dure encore ; il n’y aura donc pas de seconde venue du Christ, l.a Russie a toujours été le pays apocalyptique par excellence. On croyait alors que le monde devait finir en 1491-1492, c’est-à-dire en l’an 7 0110 de la création. Les judaïsants s’occupèrent aussi de ce point de doctrine. Joseph eut raison de leur dire que nous ignorions le moment de la seconde venue du Christ. Mais, reprennent les hérétiques, les Pères de l’Église se sont trompés en disant que le monde Unirait après 7 000 ans ; il faut donc brûler leurs ouvrages. Joseph réplique que les Pères (commentant Eccl., XI, 2) ont dit que le monde durerait sept siècles, mais ces textes doivent être interprétés dans un sens mystique. !). Traite du même argument. 10. Discute la doctrine de saint Kphrcin sur la parousie.

11. Sur la vie inonasl iqtic : l’auteur commence par donner les arguments des hérél iques. < Les moines oui abandonné les commandements de Dieu : l’Évangile H la doctrine des apôtres (ceci au moins n’est pas judaïsant), et ils ont inventé el composé eux-mêmes ce genre de vie et ils observent des traditions humaines. » P. 451. Si la vie monastique était louable, le Christ et les apôtres seraient peints revêtus de l’habit monastique, mais on les voit toujours habillés en séculiers. Ce n’est pas un ange (créature de lumière) qui a donné l’habit monastique (noir) à saint Pacôme. Les perturbateurs des derniers jours (I Tim., iv, 1-2) sont les moines. Là-contre Joseph donne plusieurs exemples de vie monastique dans l’Ancien Testament : Melchisédech avant la Loi ; sous la Loi, Élie et Elisée, les trois enfants de la fournaise de Babylone ; Jérémie et Daniel ; puis Jean-Baptiste, fl rapporte ensuite l’enseignement du Christ sur la pauvreté et l’abandon des parents ; plusieurs apôtres furent vierges : Jean, Jacques son frère, Paul, André, Philippe, Thomas. Les autres apôtres laissèrent tout. L’institution de la vie monastique par les apôtres est décrite d’après les apocryphes. Le Christ est peint en laïque parce qu’il n’est pas moine et n’a pas de péchés à pleurer. « L’habit monastique est l’image de la pénitence et des larmes. » P. 484. Le Christ fit d’ailleurs beaucoup de choses que nous ne devons pas imiter : circoncision, sabbat, Pàque juive ; nous en faisons plusieurs que le Christ ne pratiqua pas : symbole de la foi ; renoncement au démon lors du baptême. Les apôtres qui sont la lumière du monde sont bien au-dessus des moines.

12. Quelques citations pour expliquer qu’une excommunication prononcée par un prélat hérétique n’est pas confirmée par le tribunal de Dieu. Ceci est manifestement contre l’archevêque Sérapion de Novgorod qui ne fut certainement pas hérétique.

13. Sur le châtiment des hérétiques. Ceci est dirigé contre les moines d’au delà de la Volga, surtout contre Nil Sorskij qui voulait traiter les hérétiques avec douceur. Quand ils ne font pas de mal on les traite doucement, réplique Joseph ; mais dès qu’ils deviennent dangereux, il faut sévir. 14. Il ne faut pas seulement châtier les hérétiques manifestes ; il faut aussi démasquer les hérétiques occultes. 15. Les hérétiques novgorodiens (ici il faut lire Nil Sorskij et son école) prétendent qu’il faut admettre à la communion les hérétiques pénitents. Joseph se refuse à admettre la sincérité de ces conversions. Puis il refait l’histoire de l’hérésie judaïsante et la continue en citant beaucoup d’horreurs. Ce chapitre montre aussi jusqu’où allait la passion aveugle de l’higoumène de Volokolamsk. 10. Il ne faut pas pardonner aux hérétiques, même quand ils sont condamnés à mort. Il y a grande différence entre eux et les pécheurs sincèrement repentis qui se sauvent en restant fidèles à leur pénitence jusqu’à la mort.

Tel est, très brièvement résumé, le Prosvêlitel de Joseph de Volokolamsk. Récemment encore les historiens russes ne trouvaient pas assez de superlatifs pour chanter ses louanges. Voir par exemple Golubinskij, Histoire, de V Église russe, t. il b, p. 219-220. Il est certain que l’ouvrage joui ! d’une grande vogue en Moscovie au cours du xvi 1’siècle. Cette vogue était-elle méritée’.' Peut-être, et justement parce qu’il n’y avait pas mieux. Toutefois avec la meilleure volonté du monde il est impossible d’établir même une comparaison entre l’higoumène de Volokolamsk et les théologiens qui représentaient alors la science sacrée dans les pays catholiques.

Le métropolite Daniel (1522-153 !)) vint du monastère de Volokolamsk, où il avait été higoumène après la mort du bienheureux Joseph. Nous dirons ailleurs quelques mots sur lui. Pour ce qui touche à l’hérésie des judaïsants, disons seulement que Daniel est l’auteur d’un recueil de seize sermons, encore inédits et fort peu intéressants. Joseph de Volokolamsk eut aussi