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tère de Zaruba, puis, suivant l’attrait caractéristique des moines orientaux pour la solitude, monta sur une colonne et vécut quelque temps en stylite (la chose est rare en Russie où les hivers sont rigoureux), « jeûnant, priant et travaillant et écrivant beaucoup sur les divines Écritures ». Il devint bientôt fameux dans la région et fut consacré évêque de sa ville natale. Il écrivit divers ouvrages, mais il est surtout connu par ses sermons dont un certain nombre nous est parvenu.

On lui en attribue beaucoup. ; il y a tout d’abord ceux qu’il composa pour le temps liturgique qui va du dimanche des Rameaux jusqu’au dimanche des 318 Pères de Nicée, donc une série de beaux discours pour la semaine sainte et. le temps pascal. Reaucoup d’autres lui ont été attribués par divers auteurs. Ainsi, il y a un sermon sur l’Epiphanie, attribué par d’autres, plus justement peut-être, à Jean, l’exarque de Rulgarie : il y a aussi le célèbre sermon sur « la sortie de l’âme et les douze épreuves » que l’âme doit subir avant d’arriver à la gloire.

Cyrille de Turov, suivant l’exemple des auteurs byzantins de la dernière époque, est un symboliste qui aime surtout à commenter les détails. Ainsi, dans son sermon sur le dimanche des Rameaux, après avoir décrit la glorieuse et honorable maison du Christ (l’Église), bâtie par les « patriarches, métropolites, évêques, higoumènes, prêtres et tous les docteurs de l’Église », il commente l’évangile du jour : les « filles de Jérusalem » sont les âmes ; I’ânon sur lequel monte Notre-Seigneur représente les gentils et, à cette occasion, Cyrille lance aux juifs la pointe accoutumée ; les habits que les apôtres jettent devant Notre-Seigneur symbolisent les vertus chrétiennes ; ceux qui arrachent les branches des arbres sont les pécheurs et les humbles qui préparent la voie du Seigneur par leur contrition et leur pénitence ; enfin, c’est une description lyrique de tout Jérusalem qui va au-devant du Seigneur. Dans son sermon du dimanche après Pâques, il y a toute une allégorie sur le printemps spirituel : le ciel, ce sont les apôtres qui, ayant laissé de côté leur frayeur, illuminés par l’Esprit-Saint, prêchent la résurrection contre les juifs ; la lune (l’ancienne loi) fait place à la loi nouvelle ; le printemps ensoleillé, c’est la foi au Christ ; les vents sont les mauvaises pensées ; la terre, la nature humaine qui a reçu la semence de la parole divine d’où fleurit l’esprit de salut. N’allons pas croire que Cyrille de Turov se soit uniquement arrêté à ces considérations subtiles qui nous semblent exagérées. Il a de belles envolées oratoires comme par exemple quand il célèbre les grandeurs du jour de Pâques. Ailleurs, il s’adresse à ses auditeurs avec une simplicité qui rappelle la belle époque des orateurs byzantins ; il sait rabrouer son auditoire pour son manque d’exactitude ; puis il recommande à ceux qui sont venus de répéter aux absents ce qu’ils viennent d’entendre : « La reine de Saba est venue voir Salomon, ajoute l’orateur non sans mélancolie…, si tous les jours je vous distribuais de l’or ou de l’argent, ou même de l’hydromel (med) ou de la bière quvoj ne viendriez-vous pas ? » (ve dimanche après Pâques.)

Le contenu théologique des sermons n’est pas remarquable. Cyrille est plus orateur que théologien. Nous avons relevé son allusion à la hiérarchie ecclésiastique. Sa doctrine sur l’incarnation ne diffère pas de l’exposé traditionnel. À l’occasion du sermon sur les 318 Pères (de Nicée), il transmet la doctrine classique sur la Trinité, sans se douter qu’à cette heure il y avait de farouches écrits publiés contre les latins et le Filioque. Il trouve le moyen de parler longuement des azymes sans faire une allusion à la pratique de l’Église latine ; il se limite à réfuter les juifs.

On a attribué aussi à Cyrille de Turov une série de prières qui doivent être récitées après l’office les divers jours de la semaine. Il y en a plusieurs à Noire-Dame qui sont très belles. Le jeudi, après matines (utreni), il y a une prière aux apôtres, en particulier une éloquente invocation de Pierre « solide rocher de la foi, inamovible fondement de l’Église, pasteur du troupeau spirituel (slonesnago) du Christ, porte-clef du royaume des cieux », etc.

On trouvera un nombre important des sermons de Cyrille dans Jar. Levickij, Les premiers prédicateurs ukrainiens et leurs ouvrages, Léopol, 1930 (en ukrainien), voir aussi K. Kaljadoviê, Monuments de la littérature russe du A’//e siècle (en russe : Pamjatniki…), Moscou, 1821 ; une traduction russe sans nom d’auteur a été publiée par I.-I. Malysevskij, Ouvrages de Cyrille, évêque de Turov… (en russe : Tvorenija. ..), Kiev, 1880 ; V.-P. Vinogradov, Le caractère de l’oeuvre oratoire de Cyrille, évêque de Turov (en russe : O kharaktere…), Sergiev Posad, 1915.

Toutes les histoires de l’ancienne littérature russe parlent de ce fameux évêque qu’on a nommé le C.hrysostome russe. Voir aussi : L.-K. Goetz, Die Echtheit der Mônchsreden des Kyrill von Turov, dans Archiv fur slavische Philologie, t. xxvii, 1905, p. 181 sq. ; I.-P. Eremin, La parabole de l’aveugle et du boiteux dans l’une, littér. russe (Pritéa…), dans lzv. Otd., 1925, p. 323 sq. ; Khr. Loparev, Sermon pour le samedi saint (en russe : Slovo v Velikuiu Subbotu), dans Pamjatniki drevnej pis’mennosti, t. xcvii, 1893 ; N.-K. Nikolskij, Vie de Cyrille, évêque de Turov, dans Sbor. Otd., t. lxxxii, 1907, n. 4, p. 62 sq. ; E. Petukhov, Les auteurs du nom de Cyrille dans l’anc. littér. russe (K voprosu o Kirillakh avlorakh…), dans Sbor. Otd., t. xi.m, 1887, n. 3 ; I. Platonov, Étude sur les apologues ou proverbes de saint Cyrille ( Izsledovanie…), dans Éurn. Min. Nar. Pr., mai 1868 ; M.-I. Sukhomlinov, Les œuvres de Cyrille de Turov (en russe : O soéinenijakh…), dans Sbor. Otd., t. lxxxv, 1908, p. 273-349.

Clément de Smolensk (en russe : Klim Smoljatiô). —

Il fut choisi comme métropolite sur la demande du grand-prince de Kiev, Izjaslav IL La chronique dite de Nikon rapporte qu’il fut un écrivain fécond. Nous connaissons de lui une épître au prêtre Thomas commentée par le moine Athanase. La première partie de l’épître qui donne un vif tableau de la culture russe à l’époque d’Izjaslav II (milieu du xiie siècle) est certainement de Clément. Il connaissait non seulement ses recueils liturgiques, mais aussi (au moins de nom) Homère, Aristote et Platon. La seconde partie de l’épître, de style presque illisible et de contenu vague et désordonné, est sans doute liée à la première, mais il est malaisé de déterminer ce qui est de Clément et ce qui appartient à Athanase. Les sources de cette seconde partie sont Jean, l’exarque de Rulgarie, la Théologie de saint Jean Damascène, le Testament apocryphe du patriarche Juda, enfin et surtout les huit questions-réponses de Théodoret de Cyr sur le Pentateuque. Quant aux sermons qu’on a voulu lui attribuer, il n’y en a pas un qui ait une probabilité sérieuse d’être authentique.

Pour l’épître de Clément, voir Khr. Loparev, Êpîlre de Clément au prêtre de Smoleitsk Thomas (en russe : Poslanie…) dans Pamjatniki drevnej pis’mennosti, Pétersbourg, t. xc, 1892 ; elle a été éditée en même temps par N. Nikolskij, Les travaux littéraires du métropolite Clément de Smolensk, écrivain du XIIe siècle, Pétersbourg, 1892 (en russe : O lileraturnykh trudakli…) ; voir la recension de Vladimirov, dans les Izvestija de l’université de Kiev, t. i, 1893, p. 15-31. Golubinskij, dans son Histoire de l’Église russe, 1. 1, s’attaque énergiqticment à Nikolskij. Du même Nikolskij, voir A propos d’une homélie inédile du métropolite Clément de Smolensk, dans lzv. Otd., t. i, 1891, par Levickij, Les premiers prédicateurs… (K voprosu…), qui s’efforça en vain d’attribuer quelques homélies au métropolite de Smolensk.

Saint Théodose des Cryptes.


On a attribué toute une série d’homélies à l’higoumène des Cryptes, saint Théodose qui vécut au xie siècle. Il y en a d’abord cinq qui furent prêchées au cours de la troisième semaine du carême (elles traitent surtout de la patience), il y en a d’autres sur les châtiments divins,