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QUINISEXTE (CONCILE)


Canon 94. — Ceux qui prêtent des serments païens doivent être excommuniés.

Canon 93. — Ce canon reproduit le canon 7 du concile de Constantinople de l’année 381. Voir HefeleLeclercq, Hist. des conciles, t. ii, p. 35 sq. Il y ajoute ce qui suit : « Les manichéens, les valentiniens, les marcionites et autres hérétiques semblables qui se convertissent (doivent être traités comme des païens et rebaptisés ; les nestoriens, euty chiens et sévériens), doivent donner une profession de foi par écrit et jeter l’anathème à l’hérésie, à Nestorius, à Eutychès, à Dioscore, à Sévère, à tous les chefs d’hérésie semblables et à leurs adhérents ainsi qu'à toutes les hérésies nommées plus haut ; ensuite, ils peuvent recevoir la sainte communion. »

Le membre de phrase entre parenthèses ne se lit pas dans le texte des collections des conciles ; il provient du commentaire de Balsamon, mais il est réclemé par le sens, car on ne voit pas pour quelle raison on exigerait des marcionites et des gnostiques une réprobation de Nestorius et d’Eutychès. D’autre part, il est avéré que le baptême des gnostiques n'était pas reçu par l'Église.

Canon 96. — Il est défendu sous peine d’excommunication de friser ses cheveux d’une manière provoquante en vue de séduire le prochain.

Canon 97. — Ceux qui ont commerce avec leur femme dans les lieux saints, ou qui profanent ces derniers d’une manière quelconque, doivent être frappés de déposition, s’ils sont clercs, et d’excommunication, s’ils sont laïcs.

Canon 98. — Celui qui épouse la fiancée d’un autre du vivant de celui-ci, doit être puni comme adultère.

Canon 99. — L’usage arménien de cuire des viandes à l’intérieur des églises et d’en offrir aux prêtres est prohibé sous peine d’excommunication.

Canon 100. — Les images et peintures qui excitent les sens à la lubricité sont interdites. Leurs auteurs devront être frappés d’excommunication.

Canon 101. - — On doit recevoir la sainte communion sur les mains tenues en forme de croix et non sur un récipient, fût-il d’or ou d’argent. Cette prescription oblige sous peine d’excommunication celui qui distribue la sainte communion comme celui qui la reçoit.

Canon 102. — Ceux qui ont reçu le pouvoir de lier et de délier doivent étudier le caractère eu pécheur, afin de pouvoir employer les moyens propres à l’amener à s’amender.

Appréciation d’ensemble. — Il suffit d’un rapide coup d’oeil sur ces canons pour se convaincre que le Quinisexte avait en vue l’unification et un essai de codification de la législation canonique imposant les usages et la pratique de Byzance à l'Église universelle. Après l'énumération des autorités dogmatiques et canoniques, canons 1 et 2, les canons 3-39 fixent la discipline du clergé, les canons 40-50, celle des moines et des religieux, enfin les canons 51-102 visent l’tmendement du peuple chrétien.

Les canons concernant le clergé supposent l’organisation de l'Église en patriarcats, can. 36 ; prescrivent la conformité de la division territoriale ecclésiastique avec la division territoriale civile, can. 37 ; règlent la tenue des conciles provinciaux, can. 8 ; ainsi que l’attribution des paroisses rurales, can. 25, et la conservation des patrimoines ecclésiastiques, can. 35. Nombreux sont les canons concernant la chasteté des clercs, can. 3, 4, 5, 6, 12, 13, 30, et la dignité de leur vie, can. 9, 11, 24, 27. Enfin l’obligation de la stabilité et de la résidence est rappelée, can. 17, 19, 37. Plusieurs canons règlent différents usages liturgiques, can. 28, 29, 31, 32, et prohibent les ordinations simoniaques ainsi que la simonie dans l’administration des sacre ments, can. 22, 23. r Pour ce qui concerne les religieux, le Quinisexte fixe l'âge requis pour la profession religieuse, can. 40, 43, réglemente la clôture des monastères, can. 46, 47, la vie érémitique, can. 41, 42, voire la toilette des religieuses à l’occasion de leur profession, can. 49. La partie concernant la discipline générale est moins systématique. Le concile déclare vouloir unifier la pratique du jeûne, can. 55. Il rappelle l’obligation d’assister à la messe le dimanche, can. 81. Il précise les empêchements de mariage, de parenté spirituelle, can. 53, de consanguinité et d’affinité, can. 54, de religion mixte, can. 77. Il règle les rapports des chrétiens avec les Juifs, can. 11, et réprouve un grand nombre de pratiques superstitieuses, can. 61, 62, 65, 71. et d’autres abus.

Un semblable essai de codification et d’unification de la législation canonique était conforme à la mentalité byzantine et, en 692, la situation paraissait fort propice à sa réalisation. En effet, le VIe concile général avait liquidé les controverses dogmatiques ; les pays infectés de monophysisme avaient été détachés de l’empire au courant du viie siècle. Bien qu’amoindri celui-ci était devenu plus cohérent et plus uni, surtout par la réforme administrative, première ébauche de l’organisation des » thèmes » byzantins. Enfin, la campagne heureuse de Constantin Pogonat semblait avoir éloigné tout danger d’invasion de la part des Arabes.

III. Le Quinisexte et l'Église romaine. — La législation du Quinisexte heurtait les conceptions romaines en plus d’un point. Le canon 36 reproduisait le canon 28 de Chalcédoine qui donnait au patriarche de Constantinople la seconde place dans l'Église universelle, immédiatement après celle du pontife romain. Or, Rome n’avait pas admis le can. 28 de Chalcédoine. En outre, la pratique romaine du célibat ecclésiastique était réprouvée, can. 13, ainsi que la coutume romaine du jeûne du samedi, can. 55. Enfin bien des usages liturgiques de Rome étaient prohibés, can. 28, 57, 82. En outre le fait que dans l'énumération des autorités canoniques, can. 2, les décrétaJes des papes et la plupart des conciles latins étaient passés sous silence ne pouvait que déplaire à Rome.

1° Sous Serge I". — A en croire la biographie du pape Serge I er (687-701) au Liber pontificalis, des légats romains auraient assisté au Quinisexte et, induits en erreur, auraient souscrit ses canons. Duchesne, Lib. pont., t. i, p. 378, n. 18, admet la véracité de ce renseignement et suppose que « les légats auraient été désavoués et que leur signature aurait été bifiée par la suite ». Mais l’empereur voulait plus que la signature des légats romains ; il fit expédier à Rome six exemplaires des canons du Quinisexte, munis de la signature impériale et de celles des patriarches de Constantinople, d’Alexandrie et d’Antioche. Le pape était invité à mettre la sienne à la prtmière place qui avait été laissée en blanc à cette fin. Mais Serge I er refusa d’obtempérer à la demande impériale, parce que le concile qui lui était soumis contenait quelques canons qui « s'écartaient de l’usage ecclésiastique ». C’est pourquoi il ne voulut ni le recevoir, ni le faire lire publiquement et il le rejeta comme entaché de « nouveautés et d’erreurs ».

Pour intimider le pape et l’amener à ses fins, Justinien II fit enlever de Rome et transporter à Constantinople Jean, l'évêque de Porto qui avait représenté le pape au VIe concile général, ainsi que le conseiller Boniface. Ensuite arriva à Rome le protospathaire Zacharie qui avait l’ordre d’enlever le pape lui-même et de l’amener à Constantinople ; mais les milices de Ravenne et de la Pentapole qui avaient eu connaissance des intentions du protospathaire marchèrent sur Rome pour l’empêcher de réaliser son dessein. Effrayé Zacharie demanda au pape de faire fermer les portes