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QUIÉTISME — QUINISEXTE (CONCILE ;


l’être de l’âme semble bien, d’après l’interprétation commune, devenir l’être même de Dieu. Molinos n’enseignait-il pas, lui aussi, que l’activité de l’âme mystique est totalement absorbée par l’activité divine ? L’âme ainsi annihilée retourne à son principe, qui est Dieu. Elle ne fait plus qu’un avec lui. Le quiétisme rigide, depuis celui des frères du libre esprit jusqu’à celui de Molinos, est imprégné de panthéisme.

5° Enfin, même dans le quiétisme mitigé fondé sur les exagérations de l’amour pur, nous retrouvons cette inclination de notre nature vers la passivité de mauvais aloi. « L’état d’amour pur », imaginé par le semi-quiétisme et qui comporte le désintéressement constant du propre salut et du désir de progresser dans la vertu, aboutit finalement à la suppression de l’effort moral et à une sorte d’oisiveté spirituelle tout à fait contraire à la conception traditionnelle de la perfection chrétienne.

La spiritualité vraiment sûre est celle qui, dans tous les degrés de la vie spirituelle, laisse à l’effort moral la place qui lui convient.

Bibliographie générale. — - Hilgers, S. J., Zur Bibliographie des Quielismus d ins Centralblall f. Bibliothekswesen, t. xxiv, 1907, p. 583 sq. ; Heppe, Geschichie der quietisl. Mystik in der kath. Kirche, Berlin, 1875, Protestant view ; Nicole, Réjulalion des principides erreurs des quiétistes, Paris. 1695 ; le même, Traité de la prière, 1 vol., Paris, 1695 ; Vaughan, Hours with the mystics, Londres, 1856, New-York, 1893 ; ("ennari, De falso mysiieismo, Rome, 1907 ;.1. Paquier, Qu’est-ce que le quiétisme ? Paris, 1910 ; P. Pourrat, La spiritualité chrétienne, t. iv, Paris, 1928 ; Dict. de spiritualité, art. Faux abandon, t. i, col. 25 sq. ; P. Dudon. Dict. apolng. de la foi cah., t. IV, col. 527 sq. ; toutes les encyclopédies religieuses, art. Quiétisme.

P. Pourrat.

    1. QUINISEXTE (CONCILE) ou in Trullo##


QUINISEXTE (CONCILE) ou in Trullo.

— Célèbre concile de l’Église grecque considéré comme le complément des cinquième et sixième conciles (692).

— I. Convocation et date du concile. IL Les canons. III. Le Quinisexte et l’Église romaine.

I. Convocation et date du concile.

Ce concile se qualifie lui-même d’oecuménique. Adresse du concile à l’empereur, Mansi, Concil., t. xi, col. 933 ; can. 3, début et can. 51. Il fut convoqué par l’empereur Jjstinien II en vue de corriger les abus qui s’étaient glissés dans le peuple chrétien et d’extirper les restes d’impiété juive et païenne qui pouvaient encore se rencontrer. Ibid.

Les Ve et VIe conciles généraux qui tous deux avaient siégé à Constantinople, en 553 et en 680, s’étaient contentés de condamner l’hérésie et de préciser la doctrine ; le synode convoqué par Justinien II se proposait de compléter leur œuvre en édictant les décrets disciplinaires que l’état de la chrétienté rendait nécessaires (Adresse du concile). Parce que ce concile se constituait en complément des Ve et VIe conciles généraux, les Grecs lui ont donné le nom de Quinisexte, 7t£v6éy.T7). On l’appelle aussi concile in Trullo, parce qu’il siégea dans la grande salle ronde du palais impérial de Constantinople. Et parce que le VIe concile général de 680 avait également tenu ses séances dans cette salle, l’assemblée convoquée par Justinien II a parfois été appelée le IIe concile in Trullo.

Dans le can. 3 de ce concile in Trullo, il est question « du 15 janvier de la IVe indiction qui vient de s’écouler, ou de l’an du monde 6199°. D’où il suit que le concile s’est réuni dans le courant de la Ve indiction ou de l’an du monde 6200. Or, d’après l’ère de Constantinople, l’an 6199 du monde correspond à l’année 691 de l’ère chrétienne, laquelle est effectivement une IVe indiction. Le concile Quinisexte se serait donc réuni en 692, probablement après Pâques, époque des réunions conciliaires. D’aucuns ont voulu prétendre

que la 6199e année devait être calculée d’après l’ère alexandrine, ce qui ramènerait la célébration du concile en l’an 706. Mais comme le pape Serge I er, auquel les canons de ce concile furent envoyés, est mort en 701, cette opinion est insoutenable. Au lieu de 6199, les anciennes éditions des canons conciliaires et bon nombre de manuscrits lisent au canon 3 l’an du monde 6109 ; mais cette leçon est inadmissible, car elle reporterait la célébration du concile au début du vne siècle et le rendrait antérieur de 90 ans au temps de l’empereur Justinien II et du pape Serge I er.

IL Les canons. — - Les procès-verbaux du Quinisexte ne nous sont pas parvenus. Seuls les 102 canons et l’adresse du concile à l’empereur ont été conservés, ainsi que les souscriptions des évêques présents qui tous étaient des Grecs et des Orientaux. Bien que les canons soient avant tout d’ordre disciplinaire et ne touchent le dogme que d’une manière indirecte, on en donnera ici une analyse détaillée, en raison de leur importance historique. Là où ce sera nécessaire, l’on ajoutera un bref commentaire.

Adresse du concile à l’empereur. — Le « saint et œcuménique concile », convoqué par l’empereur, voit en celui-ci « le gardien de la vérité et de la justice pour l’éternité »…, « conçu et enfanté sous les auspices de la sagesse divine, rempli par elle du Saint-Esprit, constitué par elle pour être l’œil du monde, qui éclaire ses sujets par la clarté et la splendeur de son intelligence »…, « auquel elle a confié l’Église ». Il le prie d’approuver les canons qu’il a élaborés. Mansi. t. xi, col. 929-936.

Canon 1. — « La foi qui nous vient des apôtres, lesquels furent les témoins et les serviteurs du Logos », doit être conservée « sans innovation et sans changement ». Cette foi est aussi celle des 318 Pères du concile de Nicée qui ont enseigné « la consubstantialité des trois hypostases de la nature divine… du Père, du Fils et du Saint-Esprit, que nous devons adorer d’une seule adoration » ; qui ont réfuté ceux qui introduisaient « des degrés inégaux dans la divinité », et qui ont annihilé « les jeux enfantins » des hérétiques contre la vraie foi. On doit de même recevoir ly foi des 150 Pères du concile de Constantinople, célébré sous le règne « du grand Théodose », particulièrement leurs définitions dogmatiques, zàç OsoXôyouç cpcovâç, concernant le Saint-Esprit ; de mètne les condamnations de Macédonius et d’Apollinaire portées à ce concile. On doit également recevoir renseignement du concile d’Éphèse, « qu’un est le Fils de Dieu incarné », que la vierge Marie est, « au sens vrai du terme et véritablement la Mère de Dieu », ainsi que la condamnation de Nestorius qui prétendait que « l’unique Christ est un homme séparé et un Dieu séparé ». De même faut-il admettre l’enseignement des 630 Pères de Chalcédoine qui ont proclamé « que l’unique Christ, Fils de Dieu, est composé de deux natures et est glorifié en ces deux natures », ainsi que la condamnation d’Eutychès, de Nestorius et de Dioscore. De même « furent formulées avec l’aide du Saint-Esprit… les décisions des 165 Pères du concile de Constantinople sous Justinien, qui ont jeté l’anathème à Théodore de Mopsueste, à Origène, à Didyme et à Évagre, lesquels avaient repris les mythes des Grecs et, dans leurs élucubralions et leurs songes, avaient remis en circulation les migrations et les transformations de certains corps et des âmes, et, comme des hommes ivres, avaient bafoué la résurrection des morts ». Également est approuvée la condamnation portée par les mêmes Pères de « ce que Théodoret a écrit contre la vraie foi et contre les douze chapitres de Cyrille, ainsi que celle du document dénommé Lettre d’Ibas ». On doit aussi garder la foi du VIe concile, « laquelle a reçu une plus grande force du fait que le pieux empereur en a signé la définition », cette foi qui