du pays que ni les Hittites, ni les Philistins, ni les Hébreux n'étaient parvenus à réaliser ; le roi d’Assyrie, Salmanasar III, 860-825, empêcha la réussite de cette tentative d’hégémonie syrienne par la défaite qu’il infligea à Qarqar, dans la région de Hamath, en 854, à une coalition dirigée par Adad-idri, roi de Damas. Le monarque assyrien commémore sa victoire dans plusieurs de ses inscriptions, Obélisque noir, Monolithe, Inscription des taureaux, inscription sur une statue provenant d’Assur. La liste des coalisés avec indication de leurs forces respectives figure sur le Monolithe. Cf. le texte dans III Rawlinson, pl. vin ; la traduction dans Gressmann, Altorientalische Texte und Bilder, t. i, 1909, p. 109-110 ; Dhorme, Les pays bibliques et l’Assyrie, dans Revue biblique, 1910, p. 04. Après l'énumération des chars, cavaliers et soldats d’Adadidri de Damas et d’Irhuleni de Hamath, viennent les 2 000 chars et les 10 000 soldats d’Achab d’Israël, l’un des plus puissants rois coalisés, ainsi qu’on peut en juger par son rang dans la liste et le secours qu’il apporte ; aucun doute sur son identification, l’Achab de l’inscription de Salmanasar est bien le même que celui du Livre des Bois : A-ha-ab-bu mat Sir-'i-la-a-a = Achab, roi d’Israël. Quant à Adad-idri, roi de Damas, c’est le même personnage que lienhadad, avec qui Achab fît alliance d’après III Reg., xx, 34, et le Monolithe de Salmanasar. Comment l’Adad-idri de l’inscription assyrienne est-il devenu le Benhadad de la Bible ? On ne sait ; peut-être ce dernier nom était-il une appellation générique, un des prédécesseurs d’Adad-idri, contemporain d’Asa et de Baasa, ayant déjà porté ce nom de Benhadad. III Reg., xv, 16-22. Cf. Dhorme, loc. cit., p. 71.
Cette campagne victorieuse de Salmanasar III s’intercalerait entre la guerre d’Achab contre Benhadad, rapportée III Reg., xx, et terminée par un traité d’alliance, ꝟ. 36, et une nouvelle guerre du roi d’Israël contre les Syriens, III Beg., xxii, pour essayer de secouer leur joug, en profitant de la défaite, pourtant partagée, du roi de Damas.
La victoire de Qarqar qui termina la campagne assyrienne contre les coalisés de Syrie, de Hamath, d’Israël et d’ailleurs, « devait rester célèbre dans les fastes de l’histoire d’Assyrie. D’après le Monolithe, Salmanasar avait tué 14 000 guerriers. Dans V Obélisque il y en a 20 500, dans une statue provenant d’Assur, 20 800 ; sur l' Inscription des taureaux de Nimroud, le nombre en est porté à 25 000. Cette progression de la première donnée numérique est tout à fait dans le goût de l’exagération orientale. Elle indique avec quelle circonspection il faut accepter les chiffres ronds dans I'évalution des pertes de l’ennemi ou des forces du vainqueur ». Dhorme, Icc. cit., p. 07.
Une autre inscription de Salmanasar, sur une statue d’Assur, est pleinement d’accord avec le récit biblique sur l’avènement d’Hazaël, le successeur de Benhadad (Adad-idri). Cf. Winckler, Keilinschriftliches Textbuch zum A. T., 3e édit., p. 25. « Adad-idri étant mort, y est-il dit, Hazaël (Ha-za-'ilu), homme de basse extraction (littéralement : fils de non quelqu’un) s’empara du trône. » A ce renseignement de l’inscription assyrienne correspond bien le récit biblique plus circonstancié, qui nous apprend comment Hazaël devint roi de Damas et comment il se jugeait lui-même ; au prophète Elisée qui lui révélait son accession prochaine au trône il répondait : « Qu’est-ce donc que ton serviteur le chien, pour qu’il accomplisse cette grande chose ? > » IV Reg., viii, 7-15.
Dans une autre de ses nombreuses campagnes, la dix-huitième année de son règne, Salmanasar franchit l’Euphrate pour la seizième fois, inflige une cruelle défaite à Hazaël et reçoit le tribut des Tyriens, des Sidoniens et de Jéhu, fils d’Ainri. Inscription des
taureaux et un fragment des Annales ; cf. Dhorme, loc. cit., p. 72-73. D’autre part, VObélisque noir, stèle sur laquelle le vainqueur a figuré en paroles et en images le paiement de ce tribut, représente Jéhu, roi d’Israël, ou son envoyé, prosterné devant Salmanasar ; la légende énumère les différents objets d’or, d’argent et de bois précieux que le roi d’Assyrie reçoit comme « tribut de Jéhu, fils dOmri ». « On remarquera que ce titre « fils d’Omri », attribué dans les deux textes susmentionnés à l’usurpateur Jéhu, qui extermina la dynastie d"0mri (cf. IV Reg., x, 1-11), ne peut être pris dans le sens de « descendant » ; c’est plutôt une sorte de gentilice, synonyme d’Israélite… On sait en effet que les Assyriens regardaient 'omri comme le véritable fondateur du royaume d’Israël et désignaient ce royaume par l’appellation « pays d’Omri « mat Ilu-umri-i (I Rawlinson, 35, n. 1. I. 12), ou « pays de la famille d"Omri » mat bit Hu-um-ri-a (III Rawlinson, 10, 1. 17 et 26). » Plessis, art. Dabylone et la Bible, dans le Dictionnaire de la Bible, Supplément, t. i, col. 784. Cf. Gressmann, op. cit., p. 111-112.
In petit-fils de Salmanasar III, Adad-nirâri III (810-782), fils de Sammouramat. la Sémiramis dont la mythologie grecque fit la fondatrice de Babylone, travailla à rendre à son empire l’extension atteinte aux temps de son aïeul. L’inscription de Kalah (I Rawlinson, 35, n. 1) résume ses campagnes vers l’Ouest et le Sud-Ouest entre les années 800 et 8()3. Entre autres pays, depuis l’Euphrate jusqu'à la grande mer qui est au couchant du soleil, le conquérant assyrien soumit à ses pieds, le pays de Tyr et de Sidon, le pays d’Israël, appelé pays d"Oinri, Edoni et la Philistie, et leur imposa un pesant tribut. Faut-il voir dans cet événement la libération du joug syrien, qu’Hazaël et son fils Benhadad III, rois de Damas, avaient imposé à Israël, et que Jahvé aurait accordée à la prière de Joachaz, IV Reg., xiii. 3-5? Ce n’est pas sûr, et du reste les Israélites n’auraient fait que changer de joug. La promesse d’un libérateur aurait été plutôt réalisée par Jéroboam II, qui rétablit les limites d’Israël depuis l’entrée d'Émath jusqu'à la mer de l’Arabah. IV Beg., xv, 25-27. De l’inscription de Kalah un autre renseignement est encore à retenir. C’est la première fois que le nom des Edomites figure dans un texte assyrien ; or la Bible nous apprend que les Édomites commençaient alors à formerai ! suddeJuda une puissance redoutable, ayant définitivement secoué le joug de Juda. au temps de Joram, fils de Josaphat. IV Beg., viii, 20-22. Le pays des Philistins, également cité dans l’inscription de Kalah et rencontré pour la première lois aussi dans les textes assyriens, n’a pas perdu son antique renom : tandis que celui de Juda, qu’on aurait pu s’attendre a voir figurer après Israël, ne se trouve pas dans la liste des pays soumis, pour cette raison sans doute qu’il avait perdu son indépendance et suivait les destinées de Damas, dont Joas avait en quelque sorte reconnu la suzeraineté en sacrifiant à 1 1.zæl les trésors du temple pour l'éloigner de Jérusalem. Cf. Dhorme, Icc. cit., p. 181-1X7.
Les campagnes successives des Assyriens au cours du viiie siècle contre les pays araméens du nord de la Syrie avaient permis aux royaumes limitrophes 'le secouer le joug de leurs puissants voisins, et c’est aii si que Jéroboam 11 (vers 785-745) avait affranchi son peuple de la tutelle de Damas et de Hamath. IV Beg., xiv, 25-27. Mais avec Téglatphalasar III (745-727| nous retrouvons les Assyriens en Palestine, et Us annales de ce roi, appelé Pùl ou Phul dans la Bible d’après son nom babylonien Pûlu, ne sont pas sans intérêt pour l’histoire des Livres des Bois. Dans un fragment de ces annales (Bost, Die Keilinschrifttexte Tiglath-Pilesers III.. t. i, p. 18), il est question d’une campagne dirigée contre un certain Azriiahou du pays