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ROIS (LIVRES I ET II DES). LE PROPHETISME

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diques, surtout aux psaumes ii, xv, cix, mais, sans quitter les Livres de Samuel eux-mêmes, nous pouvons recueillir maintes indications précieuses soit au sujet de l’avenir glorieux réservé à la dynastie davidique, soit au sujet du Roi messianique lui-même.

A David qui avait projeté la construction d’un temple à Jahvé le prophète Nathan fait savoir que ce n'était pas lui mais son fils qui devait l’entreprendre ; Ja raison c’est que David était un homme de guerre et avait versé le sang, I Par., xxviii, 3 ; mais en même temps pour reconnaître et récompenser sa piété et sa générosité envers Jahvé, Nathan lui annonce le sort glorieux réservé par le Seigneur à sa descendance, II Reg., vii, 11-16 ; cf. I Par., xvii, 10M4 : « Et Jahvé t’annonce qu’il te fera une maison (Alors Jahvé te rendra grand, car Jahvé te fera une maison, d’après Ja traduction proposée par Dhorme et Schulz) ; quand tes jours seront accomplis et que tu seras couché avec tes pères, je susciterai après toi ta descendance, celui qui sortira de tes entrailles et j’affermirai sa royauté. C’est lui qui bâtira une maison à mon nom et j’affermirai pour toujours le trône de son royaume. Je serai pour lui un père et il sera pour moi un fils que je châtierai, s’il fait le mal, avec la verge des hommes et les coups des fils des hommes. Mais je ne retirerai point ma miséricorde d’auprès de lui comme je l’ai retirée de Saùl qui était avant toi. Ta maison et ta royauté dureront à jamais en ma présence, ton trône sera alïermi pour toujours. » Comment et par qui fut réalisée la promesse ainsi faite à David ? Par le Messie, disent les uns, et par lui seul. C'était l’opinion des anciens, principalement des apologistes ; par Salomon affirment d’autres, d’après le sens littéral, mais aussi par le Messie, au sens typique ; par Salomon seul ou la descendance davidique en général, prétendent maints critiques excluant toute interprétation messianique.

D’après le texte lui-même il s’agit tout d’abord non pas d’un individu mais d’une collectivité : la postérité, la descendance davidique. L’hébreu zéro.', semence, progéniture, n’y contredit pas et l’opposition marquée au ꝟ. 15 entre la dynastie de David et celle de Saiil, de même que la pensée de David au ꝟ. 19 : « tu parles, Jahvé, au sujet de la famille de ton serviteur pour un lointain avenir », confirment ce sens collectif. Sans doute au passage parallèle des Chroniques, I Par., xvii, 1 1, le sens individuel de zéra' est donné par l’apposition « d’entre tes fils », mais c’est afin de marquer davantage l’interprétation messianique. D’autre part, si le ꝟ. 13 : « Celui-là bâtira une maison à mon nom », dont quelques-uns font une addition postérieure (Wellhausen, Dhorme), désigne plus particulièrement Salomon, ses successeurs ne sont pas exclus des promesses adressées à la descendance et au royaume davidiques.

N’en sont pas exclus davantage le Messie et son royaume spirituel et éternel, qui réaliseront dans leur plénitude les merveilleuses promesses faites à David et pour sa descendance et pour son royaume. C’est ce que préciseront dans la suite d’autres oracles prophétiques, dont la lumière plus vive permettra de discerner avec plus de certitude et de netteté les réalités grandioses incluses dans les paroles du prophète Nathan. N’est-ce pas Isaïe qui, dans un passage incontestablement messianique, ix, 7 (hébr. G), annonce la naissance du prince de la paix « pour agrandir la souveraineté et pour la paix sans fin, sur le trône de David et dans son royaume, pour l’affermir et le consolider dans le droit et la justice, dès maintenant et à jamais ? » N’est-ce pas l’auteur de l'épître aux Hébreux, i, 5, qui, pour affirmer la suprématie du médiateur de la nouvelle alliance sur les anges, se fait l'écho du psaume n sans doute, mais aussi de la prophétie de Nathan : « Je serai pour lui un père, il sera pour moi un fils ? » Ne peut-on en dire autant des paroles de l’archange Gabriel à Marie pour

lui annoncer que celui qu’elle doit enfanter sera grand, qu’il sera appelé le Fils du Très-Haut et que le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David, son père ? Luc, i, 32. Enfin saint Pierre, en son discours du jour de la Pentecôte, Act., ii, 30, rappelle la promesse faite à David par Nathan au nom de Jahvé, II Reg., vii, 12 ; Ps., lxxxix, 4, 5 ; Ps., cxxxii, 11 ; il l’applique au roi Messie, qui, d’après une tradition, descend de David. Cf. Jacquier, Les Actes des Apôtres, 1926, p. 73.

Le ꝟ. 14 : « S’il fait le mal, je le châtierai », ne peut évidemment s’appliquer au Messie, pas même au Messie, victime expiatoire pour les péchés des hommes ; il doit s’entendre de Salomon et de ses successeurs, menacés d’un paternel châtiment pour les fautes qu’ils commettraient. L’auteur des Paralipomènes a omis ces quelques mots les jugeant incompatibles avec la sainteté du Messie. I Par., xvii, 13.

Quant à l’hymne d’actions de grâce, adressé par David à Jahvé au jour où il l’eut délivre de tous ses ennemis et de la main de Saiil, II Reg., xxii et Ps. xvii (xviii de l’hébreu), s’il ne peut s’entendre au sens messianique littéral, on peut à la suite des Pères l’entendre au sens messianique spirituel. Cf. S. Augustin, Enarr. in Ps. XVII, t. 51, P. L., t. xxxvi, col. 154. « Rien de plus naturel, en effet, note un récent commentateur des psaumes, que de découvrir Notrc-Seigneur à travers David juste et innocent, et pourtant traqué et persécuté. N’est-il pas infiniment mieux que son ancêtre, le roi victorieux, conquérant, le bien-aimé du Père, son Oint, celui qui a les promesses à tout jamais. On peut dire que Jésus-Christ est compris à la lettre et éminemment dans le dernier verset qui parle de David et de « sa race », car il est de cette race le joyau et le couronnement ; et c’est à lui qu’elle doit tous ses privilèges. Saint Paul a cité le ?.50 : "Aussi je te célé- « brerai parmi les nations… « pour prouver que l’Ancien Testament prédisait l’admission des Gentils au bonheur du salut (Rom., xv, 9). » J. Calés. Le Livre des Psaumes, t. i, 1936, p. 233.

Dans le cantique d’Anne, le dernier verset apparaît bien messianique : « Jahvé brise son adversaire, le Très-Haut tonne dans les cieux, Jahvé juge les confins de la terre, il donne la puissance à son roi, et il élève la corne de son Oint. » Mais ce trait d’un messianisme aussi nettement accusé est une des raisons qui ont fait mettre en doute l’authenticité du cantique tout entier ou du moins de ce verset et du précédent. Cf. Dhorme, op. cit., p. 29, 34 ; Leimbach, Die Bûcher Samuel, 1936, p. 25-27.

Pour les « dernières paroles de David » enfin, dont on conteste généralement l’authenticité, leur caractère messianique est surtout sensible au ꝟ. 5, II Reg., xxiii, 1-7 ; elles semblent un écho de la prophétie de Nathan : « Ma demeure est stable près de Dieu, puisqu’il a établi avec moi une alliance éternelle >

Ainsi, dès le temps de la royauté naissante, la perspective du règne de Dieu sur la terre s’esquisse par delà les espérances nationales de l’avenir glorieux réservé au peuple élu, et la figure du Messie se dessine sous les traits de ce descendant de la race davidique pour qui Jahvé sera un père.

Prophctisme.

 Le rôle prépondérant joué par

Samuel dans l’institution et l’organisation de la royauté et partant dans l’affermissement et la sauvegarde du monothéisme, non moins que celui de Nathan dans l’annonce des promesses à la race davidique montre assez l’importance du prophétisme, dont ils sont les deux plus illustres représentants à l'époque des premiers rois. A côté d’eux apparaissent en un relief, nettement plus marqué que jusqu’alors dans les textes anciens, des personnages du nom de nâbV, terme que l’on traduit ordinairement par prophète et qui désigne, aussi bien en hébreu qu’en français, des hommes de