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ROIS (LIVRES I ET II DES). ORIGINE

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ressemblance si frappante, l’une avec le Yahwiste du Pentateuque, l’autre avec l'Élohiste, que nous leur appliquerons les mêmes désignations sans entendre par là les identifier absolument avec leurs homonymes. Ces deux narrations se trouvent utilisées concurremment, ce qui constitue un enrichissement d’informations. Toutefois cet avantage est inséparable de certains inconvénients remarqués dès longtemps et consistant en répétitions et en divergences. Comme dans le Pentateuque, il y a dans chaque source des éléments de dates différentes, des couches successives, les unes plus anciennes, les autres plus récentes. Un rédacteur a combiné ces deux documents. Puis est intervenue l'école deutéronomistique qui, sur une moindre échelle que dans le Livre des Juges, mais d’une façon pourtant appréciable, a marqué le livre de Samuel de son empreinte. Enfin diverses adjonctions plus tardives sont encore venues grossir l’ouvrage et des retouches, portant le cachet de l'époque postexilique, sont reconuaissables çà et là. » Introduction à l’A. T., 2e édit., 1914, p. 254.

Comme Buddc, P. Dhorme, dans l’introduction à son commentaire des Livres de Samuel, 1910 (Études bibliques), admet deux sources primitives seulement que l’on peut suivre à travers tout l’ouvrage. « Souvent, remarque-t-il, nous nous écartons de Budde pour l’attribution de tel ou tel morceau à l’une ou à l’autre des sources, mais des ressemblances de style et de procédés littéraires entre ces sources et celles qui ont servi au livre des Juges nous ont paru indéniables. Nous leur avons gardé les noms de E et de J, sans préjuger la question de l’Hexateuque… L’emploi de ces sigles n’a rien qui puisse nous effaroucher car tout le monde admet maintenant que des groupes de récits avec chacun leur genre littéraire spécial ont pu exister côte à côte jusqu'à l'époque de la captivité. » P. 7.

Avec des réserves plus ou moins accentuées, des critiques tels que Driver, Smith, Nowack, dans leurs introductions et commentaires, se sont ralliés également à l’hypothèse de Budde. Sellin, tout en reconnaissant, lui aussi, deux sources principales, qu’il figure par les sigles K et K 1 et dont il fait la continuation du Jéhoviste et de l'Élohiste du Pentateuque, y voit l'élaboration d'éléments anciens et, en réaction contre les conclusions de Wellhausen et de Stade, en fixe la date avant le Deutéronome, aux environs de 700 pour le plus récent, et sous le règne de Salomon pour l’autre, qui serait ainsi l'œuvre d’un témoin des événements survenus sous le règne de David. Einleilung in das A. T., 5e édit., 1929, p. 70-76.

Pour Steuernagel, Lehrbuch des Einleilung in das A. T., 1913, p. 331-336, et pour Eissfeldt, Einleilung in das A. T., 1934, p. 302…, trois sources principales sont à la base des Livres de Samuel. Pour ce dernier, outre les documents J et E, suite de ceux de l’Hexateuque, il y a lieu de reconnaître, tout comme dans le Pentateuque, Josué et les Juges, une troisième source qui, malgré le souffle religieux qui l’anime, ne porte qu’un minime intérêt à tout ce qui touche au culte, et que pour cette raison il appelle : source laïque, représentée par le sigle L (Laienquclle). Une rédaction deutéronomiste mit en œuvre ces documents, mais avec. des remaniements moindres qu’on ne l’admet d’ordinaire.

A l’encontre de l’hypothèse, en faveur chez la majorité des critiques, de deux ou trois documents principaux en rapport plus ou moins étroits avec ceux du Pentateuque, un des récents commentateurs de Samuel, Caspari, Die Samuelbùcher, 1926, en explique l’origine par la réunion de petits récils d'époques différentes, trois surtout, reliés par des passages qui établissent entre eux une certaine unité ; hypothèse à la fois fragmentaire et documentaire. 1 1. Gressmann enfin, dans l’introduction de son commentaire, 1921, p. xviii,

se refuse à voir dans le Livre de Samuel de véritables sources ; des divergences ou des répétitions, telles qu’on en rencontre dans ce livre et celui des Rois, relèvent avec grande vraisemblance de la critique du texte ; il s’agit de variantes, comme le prouvent les transcriptions sensiblement différentes du texte de ces livres dans les manuscrits ; n’est-ce pas d’ailleurs ce que suggère la version des Septante qui offre une recension particulière avec des leçons parfois meilleures, mais aussi parfois moins bonnes que celles de l’hébreu massorétique.

b) La critique catholique. — Sans rejeter l’emploi de sources par l’auteur des Livres de Samuel, elle se refuse en général à suivre la critique indépendante dans l’hypothèse de deux ou trois sources principales, dont la trame se poursuit à travers tout l’ouvrage ; elle se refuse surtout à y voir la continuation des documents élohiste et jéhoviste du Pentateuque avec des rédactions successives deutéronomistique et sacerdotale. Les hypothèses ne manquent pas non plus de variété.

Le P. de Hummelauer, après avoir relevé les passages parallèles de Samuel et des Paralipomènes, en fait remonter l’origine à une source commune, car on ne saurait voir dans le premier la source du second qui a des développements inconnus des Livres de Samuel. Cette source commune serait la chronique du roi David, citée I Par., xxvii, 24. Cinq parties la composent dont la première, I Reg., i-vir, aurait pour auteur Samuel lui-même ; la seconde, vrn-xvi, l’histoire de Saiil, œuvre de Samuel ou du prophète Gad ; la troisième, xvii à xxx ou xxxi, David à la cour de Saùl, serait de Gad à partir du c. xxv ; la quatrième, II Reg., i-xx, l’histoire de David, écrite du vivant même du roi, et xi-xx, sans doute par Nathan, qui aurait donné à l’ensemble du livre sa forme définitive pour servir à l'éducation de Salomon ; la cinquième ou l’appendice, xxixxiv, composée d'éléments sans lien entre eux ni avec ce qui précède, et ajoutée à une date qu’on ne peut déterminer. Comment, in Lib. Samuelis, 1886, p. 4 sq.

Wiesmann prétend résoudre les difficultés des Livres de Samuel par l’hypothèse des inversions dans le texte et faire ainsi disparaître les doubles récits. Pour l'établissement de la royauté en Israël, par exemple, il faut distinguer entre l’appel par Jahvé de Saiil comme prince, naghid, d’Israël, I Reg., ix, 1-x, 16 ; x, 27b - X i, Il et l'élection de Saùl comme roi d’Israël, viii, 1-22 ; x, 17-24, 27° ; xi, 12-xii, 25 ; x, 25, 26 ; xiii, 2, 19-22. La suite des événements apparaît dès lors la suivante : Saùl, ayant reçu en secret l’onction qui le sacre prince d’Israël, est, de ce fait, à la tête du peuple et chef de l’armée ; en tant que tel il fait campagne contre les Ammonites. Entre temps le peuple réclamant un roi, Samuel qui tout d’abord s’y refuse y consent finalement, et organise l'élection à Maspha ; l’attitude de Saùl qui se cache durant l'élection par le tirage au sort s’explique par la crainte qu’il a de n'être pas agréé de Dieu ; il est couronné roi à Galgala. Zeitschrift fur kath. Théologie, 1910, p. 118… ; 1914, p. 391…

Dans un commentaire plus préoccupé de critique textuelle que de critique littéraire, Schlôgl, tout en opposant presque une fin de non-recevoir aux conclusions des critiques sur l’origine des Livres de Samuel, n’en admet pas pour autant l’unité de composition ; des prophètes Samuel, Gad et Nathan proviennent sans doute maints éléments de ces livres, dont de nombreux bouleversements et gloses soulignent le caractère composite. Die Bûcher Samuelis, 1901.

Le dernier en date îles commentateurs catholiques de Samuel, Leimbach, après avoir longuement analysé les différentes théories aussi bien de la critique indépendante que de L’exégèse traditionnelle, constate une grande variété d’opinions chez les représentants de l’une et de l’autre et pense que le jugement de Gress-