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RICHARD DE MEDIA VILLA

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Tolosani magister, dans Arch. franc, histor., t. xix, 1926, p. 113-116 ; t. xxiii, 1930, p. 246-248. Nous n’avons plus d’autres renseignements personnels sur Richard après cette date ; mais, avec Lechner, on peut accepter comme date de sa mort 1307 ou 1308. Le frère mineur dit l’Astesan, qui rédige, en 1317, sa Summa de casibus mentionne dans son Proœmium les théologiens de son ordre qu’il a mis à contribution et, visiblement, selon leur date obituaire. Il met Richard entre Gauthier de Poitiers († 1 307) et Jean Scot († 1 308). Voir le texte dans E. Hocedez, Richard de Middlelon, p. 133.

II. Œuvres. — L'œuvre littéraire de Richard « est relativement bien conservée et considérable, même si l’on défalque les productions douteuses ou apocryphes.

A cette dernière catégorie appartiennent des traités canoniques : Distincliones super Decrclis (ms. de Douai, 644 ; de Vienne, Bibl. nat., 2194), Ordo judiciarius (édit. de C. Witte, Halle, 1853), qui sont du canonistc Richard l’Anglais ; un Tractatus de clavium potesJatc, qui est de Richard de SaintVictor (cf. P. L., t. exevi, col. 1159-1178). Les anciens catalogues des œuvres de notre auteur lui attribuent aussi un traité De conceplu B. Marise virginis ; ce doit être par suite d’une confusion avec le même Victorin ; en toute hypothèse d’ailleurs, notre Richard ne saurait être donné comme un défenseur du privilège mariai, car, en son commentaire des Sentences, il enseigne clairement que l'âme de la Vierge, par son union avec la chair, a contracté la souillure du péché originel. III Sent., dist. III, a. 1, q. i, éd. de Brescia, p. 27.

Par contre l’authenticité des ouvrages suivants est bien assurée. 1° Commentaire sur les quatre livres des Sentences fourni par de nombreux mss., voir P. Glorieux, Répertoire, n. 324 ; le I. IV imprimé à Venise, 1479 (cf. Hain, n. 10 984) et dans les années suivantes ; les quatre livres, en deux volumes, Venise, 1507-1509 ; puis Rrescia, 1591. — 2° Quæsliones disputalæ au nombre de 45 ; fournies par de nombreux mss., voir Glorieux, ibid., et E. Hocedez, dans Recherches de science religieuse, 1916, p. 493-494 ; ce dernier a donné, ibid., p. 500-513, le titre de chacune des questions ; la q. xiii, Ulrum angélus vel homo intelligal verum creatum in œlerna virtute a été publiée par les Pères de Ouaracchi, dans De humanie cognitionis ratione anecdota quædam, 1883, p. 221 sq. — 3° Les quodlibel ; les mss. donnent d’ordinaire à la suite du commentaire des Sentences trois quodlibel ; ils ont été publiés ensemble et dans le même ordre dans l'édition de Venise, 15(17-1509, à la suite dudit commentaire. On trouvera le détail des questions dans P. Glorieux, La littérature quodlibélique de 1260 à 1320, p. 258-271. A la suite de cette table, ce même auteur fournit la capitulation de deux autres quodlibel donnés à Richard par le ms. 14 306 de la Bibliothèque nationale de Paris, mais dont l’attribution reste au moins douteuse ; il se pourrait que l’on ait affaire à une œuvre de Pierre de Falco ; ces deux textes sont demeurés inédits. — 4° Aux quodlibel se rattachent deux autres questions : 1. Quæslio de privilégia papa Martini IV, et relative aux droits accordés aux ordres mendiants d’entendre les confessions, sans aucune approbation préalable des évêques et des curés, à condition toutefois que les fidèles se confesseraient une fois l’an à leurs curés respectifs. Richard examine le point de savoir si celui qui s’est confessé à quelqu’un de ces religieux est tenu de réitérer l’aveu de ses fautes quand il se confesse à son propre curé ; ce texte a été publié par F. Delorme, O. M., Fr, Richardi de M. quæslio disputata de privilégia Martini papee IV ruine primant édita, Ouaracchi. 1925, où l’on trouvera une riche documentation sur toute cette affaire qui engendra bien des remous. — 2. Quæslio tic

gradu formarum répondant a celle question : Utrum in quolibet composilo sil una forma ; cet écrit doit être

incessamment publié ; Pelster, Oxford theology and theologians, p. 109, en rapproche une question analogue du ms. lr >8 d’Assise, fol. 55. — 5° Plusieurs sermons de Richard sont fournis par divers mss. E. Hocedez, en a publié trois en appendice à son livre sur Richard de Middlelon, Paris-Louvain, 1925, l’un pour la fête de sainte Catherine de 1281, le second pour la Purification de l’année 1283, le troisième pour le samedi avant la Passion (3 avril 1283) ; un autre sermon pour l’Ascension, de date incertaine, a été publié par V. Lampen dans la France franciscaine, 1930, p. 388-390. — 6° Postules sur l'Écriture sainte. Les affirmations des anciens bibliographes sur la composition par Richard de brèves annotations sur les quatre évangiles et sur les épîtres paulines paraissent dignes de foi ; jusqu'à présent il ne s’en est rien retrouvé.

La date de ces différentes œuvres se laisse assez facilement déterminer. Voir surtout E. Hocedez, op. cit., p. 27 sq. Le Commentaire des Sentences a été professé, mais non rédigé, en 1282-1284, il n’aurait pris sa forme définitive que vers 1295. Il aurait donc été précédé par la publication des Quæsliones disputalæ, fin de 1284. Le 1 er Quodlibelum se place à Pâques de cette même année scolaire et donc en 1285, le 2e à Pâques de l’année suivante, 1286, le 3e à Pâques 1287. La Quæslio dispulala sur la confession serait de cette même année scolaire 1286-1287. La date des sermons a été indiquée ci-dessus. En définitive c’est dans les années 1283-1287 que se situe la plus grande activité scolaire de notre docteur.

III. Place dans le mouvement intellectuel. — Les dates que l’on vient de fixer ont précisément leur intérêt en ce qu’elles montrent le milieu dans lequel a vécu et enseigné Richard.

Les deux écoles dominicaine et franciscaine et, si l’on veut, aristotélicienne et augustinienne, ont défini leur position vers le milieu du siècle. Un conflit d’idées s’en est suivi qui a été violent. Les deux grands chefs, Thomas d’Aquin et Bonaventure, sont morts presque simultanément en 1274. Les épigones continuent le combat et l’année 1277 semble marquer au compte de l’aristotélisme une grosse défaite ; pêle-mêle avec les doctrines averroïstes — exagérations de l’aristotélisme — sont condamnées par l'évêque de Paris, Etienne Tempier, en bon nombre, des thèses strictement thomistes. Cette année devrait donc marquer L triomphe de la théologie et de la philosophie augustiniennes dont l’ordre franciscain entend maintenir les traditions. Or, il est extrêmement remarquable qu’un homme comme Richard, franciscain dans l'âme, tout en se montrant très en garde contre les thèses condamnées en 1277, ne professe pas, à l’endroit de l’aristotélism 3, toutes les défiances du milieu où il vit ; non moins intéressant de le voir prendre à son compte, en théologie, plusieurs doctrines thomistes. Sans que l’on puisse parler, à son sujet, d'éclectisme, il faut rendre hommage à l’ouverture de son esprit qui ne paraît pas se résigner à jurer per verba magistri.

Les historiens des sciences, en particulier P. Duhem, ont signalé chez lui — et c’est plus vrai encore de son contemporain R. Bacon — des curiosités relatives aux choses de la nature, des idées sur la valeur de l’expérience, des théories sur la pesanteur et le mouvement des projectiles qui témoignent qu’il s’affranchit de la tyrannie aristotélicienne sous laquelle se courbait encore, en ces m itières, un saint Thomas. Voir P. Duhem, Études sur Léonard de Vinci, ceux qu’il a lus et ceux gui font lii, t. ii, Paris, 1909, p. 368 sq., 411-412, 442 sq.

En ontologie il se rallie à un réalisme modéré : Universale non potest esse actu in re extra, et l’on peut dire que, jusqu'à un certain point, c’est la raison qui lui donne naissance, ipsa universalitas est res constitula a ratione ; il n’empêche que cet « universel » a dans l’in-