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    1. RÉVÉLATION##


RÉVÉLATION. NOTION GÉNÉRALE

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Aussi bien les « prophètes » dont il est ici question avaient-ils donné leurs oracles comme les paroles mêmes que Jahvé leur avait adressées. Inutile de donner ici des citations ; ce seraient à peu près tous les initia des prophètes qu’il faudrait transcrire. Les prophètes sont vraiment les porte-parole de Dieu.

La parole locutio est un acte par lequel celui qui sait manifeste directement son esprit, sa connaissance, son jugement à us autre. Saint Thomas en donne la définition suivante : Nihil aliud est loqui ad allerum quam conceptum mentis alteri manifestare. Sum. theol., I a, q. cvii, a. 1. Communément l’homme exprime ses concepts par des mots, par l’intermédiaire de l’écriture, de gestes ou d’autres signes semblables, mais tous externes et donc d’ordre sensible. Ici le terme locutio a un sens très large, puisqu’il s’entend même du mode de communication qui se fait entre les purs esprits. Saint Thomas le remarque pour les anges, quand il écrit ançielum loqui angelo nihil aliud est, quam conceptum suum ordinare ad hoc ut ei innote.scat per propriam voluntatem. Ibid., a. 2. Du fait que Dieu est pur esprit, il n’a recours à la parole que dans un sens analogique et proportionnel.

2. Détermination analogique du constitutif formel de la révélation. —

L’homme n’exprime ses connaissances sur la vérité absolue que d’une manière analogique. Notons-le toutefois, ce que ces concepts analogiques représentent est vrai, bien que le mode sous lequel ils manifestent la vérité révélée soit différent de celui de la connaissance humaine.

En effet, entre le verbe humain et la révélation, il y a des différences essentielles, mais il se rencontre aussi des analogies, des ressemblances. Ce texte de saint Thomas le fait ressortir : Sicut enim in exteriori loculionc proferimus ad ipsum audienlem non ipsam rem quam notificarc cupimus, sed SIGNUM illius rei, scilicet vocem signi ficativam, ita Deus intérim inspirando non exhibet essentiam suam ad videndum sed aliquod suie essentise sigmum quod est aliqua spiritualis similitudo suée sapientiiC. De veril., q. xviii, a. 3.

En tant que la parole est un acte composé et matériel, qui consiste dans l’émission de sons ou de gestes, elle n’est attribuable à Dieu que par analogie métaphorique ; c’est le cas de toutes les perfections appelées mixtes. C’est d’une façon symbolique, par exemple, que l’auteur des psaumes écrit : « Dieu est mon rocher, mon bouclier. » Ps. xvii, 3. En tant qu’elle est, en dehors de tout anthropomorphisme, la manifestation de la pensée, c’est-à-dire un fait d’ordre spirituel, on peut l’attribuer à la divinité d’une manière analogique et propre, au même titre que les qualités simples, telles que l’intelligence ou la bonté qui ne comportent aucune imperfection dans leur raison formelle. Malgré cela, il faut se rappeler la doctrine de l’Église exposée au IVe concile du Latran : Inter Creatorem et creaturam non potest tanla similitudo notari, quin inter eos major sit dissimilitudo notaada. Denz.-Bannw., n. 432. Dans la révélation, Dieu s’adresse à L’homme, Ici comme en toute parole on trouve deux éléments : l’un formel et incréé, qui est le concept même de la pensée divine, l’autre matériel et créé qui est le moyen par lequel la vérité divine est dévoilée. La parole divine est donc une manifestation de vérités laite directement par Dieu à une créature raisonnable.

Cette affirmation ne peut être pleinement comprise qu’après un bref rappel des deux éléments constitutifs de la connaissance humaine d’ordre naturel, lui celle-ci il y a la représentation des choses et le jugement porté sur celles-ci grâce à la lumière intérieure. La représentation se fait par les espèces intelligibles, qui proviennent par abstraction du monde sensible et se nui servent par la mémoire. L’intelligence eu les unissant constitue avec elles « les espèces complexes. Le jugement est prononcé sous la lumière de la raison. En conformité avec sa nature, celle-ci affirme ou nie, non pas sous l’influence d’une force aveugle, mais d’après une certaine évidence au moins extrinsèque. On appelle lumière intellectuelle ce qui permet de porter le jugement.

Dans tout enseignement humain ces deux éléments existent également. Le maître présente des vérités, les développe et les explique méthodiquement, à l’aide d’autres concepts déjà connus. A cela se borne son rôle : il fournit ce qui est intelligible. Il ne lui est possible d’évoquer des espèces dans l’intelligence de son disciple qu’en lui proposant des signes extérieurs appréhendés par les sens.

Pour que l’instruction soit fructueuse il faut que celui qui la reçoit ait une lumière intérieure proportionnée qui lui permette de porter un jugement sur la vérité présentée ou au moins sur l’autorité, c’est-à-dire la science et la véracité, de celui qui enseigne. Celui-ci est incapable de donner cette lumière. Voir S. Thomas, Sum. theol., I a, q. cxvii, a. 1 ; De veritate, q. xi, a. 1, De magistro. La comparaison fournie par l’enseignement est déficiente, car dans la révélation, Dieu, auteur de l’intelligence, est à même de faire beaucoup plus que le maître humain. Celui-ci n’a aucune entrée dans l’activité intellectuelle de son disciple ; la cause première, au contraire, tient en sa puissance toutes les facultés connaissantes et toute leur activité. C’est de l’intérieur qu’elle besogne, tandis que le maître humain ne travaille jamais que de l’extérieur.

3. La révélation est la manifestation de l’esprit divin. —

La parole divine peut se manifester par la conversation, telle qu’elle existe entre créatures humaines. C’est le cas du message transmis par le Christ. Fils de Dieu fait homme, qui est le principe de toute la doctrine du salut exprimée dans le Nouveau Testament. Tel est bien le sens de l’affirmation de saint Jean déjà citée : « Nul n’a jamais vu Dieu, mais le Fils unique qui est dans le sein du Père nous l’a fait connaître. » Joa., i, 18 ; cf. vi, 16. La même pensée se retrouve dans les synoptiques : « Nul ne connaît le Père sinon le Fils et celui à qui le Fils veut le révéler. » Matth., xi, 27 ; Luc, x, 22 ; cf. Housselot, art. Intellectualisme, du Dictionn. apoi, t. H, col. 1075.

Malgré cela la parole de Dieu ne s’exprime pas nécessairement en ces signes matériels, utilisés par les hommes pour transmettre leurs pensées. Prise en elle-même, elle est absolument spirituelle. Elle n’est pas non plus un jugement : le jugement est un acte intellectuel composite et comme tel n’existe pas en Dieu formellement, mais d’une manière éminente seulement. Cette « parole » dévoile l’esprit ou la connaissance divine. Cette révélation, qui est de sa nature intellectuelle et a pour objet des vérités, s’adresse à l’intelligence. Celle-ci perçoit directement la vérité qui lui est présentée par Dieu. L’ « agent récipient pour la saisir n’a nul besoin de recourir au « discours. a la démonstration. Sa connaissance nouvelle n’est pas le fruit d’un travail antérieur, comme le serait la conclusion d’une argumentation à laquelle parvient le dialecticien qui remonte des effets à la cause. C’est ce qu’exprime Van Laak, quand il écrit : Ergo omisso omni usu linguse seu signorum, quæ sunt externa, objectiva, ex instiluto signi fi.can.tia, conceptus seu signa interna formalia, luitura sua significantia, homini comrnunicarc potest. Instiluliones theologiæ fundamentalis, tract, n. De relig. revel., p. 11. La manifestation d’ailleurs resterait directe au cas même où celui qui parle et celui qui reçoit utiliseraient les sens et des moyens matériels comme des signes articulés ou écrits.

Enfin - et. cette considération est essent [elle et fondamentale la révélation n’est pas un colloque mutuel, réciproque, mais une communication de Dieu à