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    1. RÉVÉLATION##


RÉVÉLATION. NOTION GENERALE

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latione. Nous y lisons : Eadem sancta mater Ecclesia tenet et docet, Deum, rerum omnium principium et finem, naturali humanæ rationis luminee rébus creatis certo cognosci posse, …attamen placuisse ejus sapientiæ et bonitati alia eaque supernaturali via seipsum ac œterna voluntatis sua : décréta humano generi revelare dicenle apostolo : Multifariam multisque modis olim Deus loquens patribus in prophetis : novissime diebus istis locutus est nobis in Filio (Heb., i, 1). Denzinger-Bannwart, n. 1785 et 1786.

En cette étude il s’agit de la révélation d’ordre surnaturel : elle se distingue de la première dont nous venons de parler. D’une manière très brève, Chr. Pesch en a marqué ainsi les différences : Quævis autem revelatio definiri potest : verilatis per divinam testi ficationem manifestatio. Revelatio naturalis fit per facla, revelatio supernaturalis per verba. Prselect. dogmat., 1. 1, 6e -7e éd., n. 151. Elle est la manifestation d’une vérité par Dieu et en dehors de l’ordre de la nature. Le mot (à.nox’i.-Xoiiç, à7TOxaXÙ7TTSiv, 9avepoyv, yvcopiÇeiv, SyjXoûv) révélation, qui est d’un usage courant, dans la sainte Écriture, exprime la découverte de choses cachées.

C’est d’elle que parle l’apôtre saint Paul, quand il écrit aux Corinthiens : « Ce sont des choses que l’œil n’a point vues, que l’oreille n’a point entendues, et qui ne sont pas montées au cœur de l’homme… c’est à nous que Dieu les a révélées par son Esprit ; car l’Esprit pénètre tout, même les profondeurs de Dieu. » I Cor., Il, 9-10. On rapproche quelquefois de ce texte paulinien particulièrement clair le texte des synoptiques relatif à « ce qui est caché mais qui finira bien par se découvrir ». Matth., x, 26 ; Marc, iv, 22 ; Luc, viii, 17. Mais le contexte immédiat de ce passage invite à ne pas urger ce texte qui est fort général. Par contre, il convient de mettre en spéciale lumière la réflexion de saint Jean au début du IVe évangile : « Dieu, nul ne l’a jamais vu ; mais le Fils unique, qui est dans le sein du Père, celui-là nous l’a expliqué, èE^yr^ctio. » Joa., i, 18.

Puisque les saintes Écritures nous font connaître les vérités à croire et les devoirs à pratiquer, la révélation surnaturelle, dont il est question en ces textes, concerne l’ordre religieux, et tout spécialement celui qu’a fait connaître Jésus. C’est proprement le « mystère » du Christ, dont parle saint Paul : « C’est par révélation que j’ai eu connaissance du mystère que je viens d’exposer en peu de mots. Vous pouvez, en les lisant, reconnaître l’intelligence que j’ai du mystère du Christ. Il n’a pas été manifesté aux hommes, dans les âges antérieurs, comme il a été révélé de nos jours par l’Esprit aux saints apôtres et aux prophètes de Jésus-Christ. » Eph., iii, 3 sq. Sur ce texte, cf. Hagen, Lexicon biblicum, t. iii, col. 687 sq. ; Cornely-Merk, Compendium introductionis, p. 525 sq. ; Cremer-Kôgel, Diblisch-theolagisches Wôrterbuch des neutestamentlischen Griechisch aux mots à7uoxaÀÛ7TTM, col. 578 sq. ; cpavepoùv, col. 1109 sq. ; yvcopiÇeiv, col. 257 sq.

Par rapport à la fin, la révélation est privée ou publique selon qu’elle est destinée à un individu en particulier ou à une collectivité, tels que le peuple israélite pour l’Ancien Testament et l’humanité entière pour la Nouvelle Alliance, apportée par le Christ. Les révélations privées sont possibles et réelles en certains cas, mais relativement rares. En toute hypothèse, elles demeurent nécessairement subordonnées à la révélation publique, à la lumière de laquelle elles doivent être jugées et appréciées. Elles n’appartiennent pas au dépôt général et universellement obligatoire de la révélation chrétienne, c’est pourquoi celui qui se refuserait à les accepter pourrait parfois commettre une imprudence ou faire acte de témérité, mais il ne saurait être taxé d’hérésie. Dans cet article ne sera étudiée que la révélation surnaturelle publique, close avec les apôtres. Voir Didiot, art. Révélation du Dict. apol., t. iv, col. 1005 et sq. Mais l’on ne s’interdira pas de faire appel à des expériences mystiques d’ordre privé.


II. DÉFINITION ANALYTIQUE DE LA RÉVÉLATION.

Cette notion très générale s’éclaircira par l’étude de l’auteur et du sujet de la révélation ; de la communication qui se fait de l’un à l’autre ; ce qui nous amènera à concevoir la révélation comme un phénomène surnaturel.

L’auteur et le sujet de la révélation.


La révélation est la parole de Dieu. Celui-ci est la cause efficiente ou l’auteur de la révélation, car c’est lui qui communique à l’homme quelque chose de son savoir. Pesch, Compendium theologix dogmatiese, t. i, n. 54 sq. Même si les anges interviennent avec la permission ou sur l’ordre divin, et s’ils parlent au nom de Dieu, la révélation est divine, car Dieu reste la cause principale et les esprits . célestes jouent le rôle de cause instrumentale. R. Garrigou-Lagrange, De revelatione per Ecclesiam catholicam proposita, t. i, p. 140 sq.

Le sujet favorisé de la révélation n’est pas dans la même condition. S’il doit en demeurer le seul bénéficiaire, il est uniquement récipient. Si, au contraire, la vérité qui lui est manifestée est destinée à être transmise par son intermédiaire à d’autres hommes, il devient l’instrument de Dieu.

Quant au Christ, il n’est pas un instrument entre les mains de Dieu son Père, car il est le Fils de Dieu et Dieu lui-même et c’est la raison pour laquelle la révélation qu’il fait aux hommes est immédiate. Son cas est exceptionnel. En effet, il s’est fait chair pour nous racheter sans doute, mais aussi pour nous donner un enseignement. En tant qu’homme, il a une science spécifiquement humaine et expérimentale, qui a progressé au coins de sa vie. Mais son humanité jouit en même temps et de la science infuse et de la vision béatifique. La connaissance des secrets divins lui est connaturelle, permanente, complète, illimitée et sans aucun mélange d’ignorance : elle est une science et ne relève pas de la foi. Cela explique l’aisance avec laquelle il expose les mystères les plus profonds du royaume des cieux. Par ailleurs, l’infaillibilité est pour lui un droit, et non pas un privilège particulier. Le texte de Matth., xi, 25-30, cf. Luc, x, 21-22, met dans la plus vive lumière cet aspect de la fonction doctrinale du Sauveur.

2° La communication de Dieu à l’homme : la parole divine. —

Entre Dieu et l’homme la communication s’établit par la « parole ». C’est le terme généralement employé par les théologiens quand ils étudient le concept de révélation et le mode par lequel une vérité est transmise à l’homme. Signalons à titre d’exemple parmi les auteurs les plus récents : Chr. Pesch, Compendium, t. i, n. 5 1 : Revelatio divina stricte dicta est locutio Dei ; J.-V. Bainvel, De vera religione et apologetica, p. 152 : Revelatio est manifestatio rei occulta : per proprie dictam locutionem ; Lercher, Institut, theolog. dogmat., t. i, n. 38 : Revelatio proprie dicta est in eo, ut Deus… manifeslet verilalem « per locutionem Dei proprie dictam » ; Mausbach, Grundzùge der kalholischen Apologetik, p. 9 ; H. Felder, Apologetica sive theologia fundamentalis, 1. 1, p. 28 : Revelatio supernaturalis… est manifestatio verilatis religiosse facta per verba Dei ad hominem, etc.

1. Ce qu’est la parole. —

Avant d’expliquer ce qu’il faut exactement entendre par la « parole », il est bon de rappeler que, dans la Bible, la révélation est présentée sous cette appellation. Celle-ci est employée par l’auteur de l’épître aux Hébreux en son magnifique prologue : « Après avoir, à plusieurs reprises et en diverses manières, parlé (XaXy)<raç) autrefois à nos pères par les prophètes, Dieu, dans ces derniers temps, nous a parlé fèXdcX^oev) par le Fils, qu’il a établi héritier de toutes choses, et par lequel il a créé aussi le monde. »