Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 13.2.djvu/563

Cette page n’a pas encore été corrigée

2 539

RÉSURRECTION LES PÈRES LATINS

2540

étaient frustres de la récompense de leur résurrection. » Carmina nisibena, lxxiii. édit. Bickell, p. 222. Dans le sermon pour le deuxième dimanche de l’Avent, il fait une allusion à l’objection que nous avons déjà rencontrée tant de fois, et il la résout par la simple affirmation de la résurrection : « Le Grand Roi commandera et aussitôt avec tremblement la terre s’empressera de rendre ses morts… Ceux qu’une bête féroce aura enlevés ou un poisson dévorés ou un oiseau dépecés, en un clin d’reil seront là et il n’y manquera pas un cheveu ». Opéra, édit. Assemani, t. ii, Rome, 1743, p. 213. L’explication du germe n’est pas inconnue d'Éphrem ; mais il lui donne une forme nouvelle. Les morts sont comparés à des œufs que les ignorants croient sans vie ; ils ne sont pas morts pour la mère qui les couve. Ceux qui n’ont pas la foi croient que les corps ensevelis n’ont plus de vie : mais, en réalité, dans le sépulcre, ils vivent pour celui pour qui toutes choses vivent (cf. Luc, xx, 38). Serm. adv. hær., lii, ibid., p. 552.

8° La tradition chez les Pères latins, à partir du ZTe siècle. — 1. Avant saint Augustin. — Tout comme la tradition orientale, la tradition latine est très ferme sur trois points : le fait de la résurrection, l’universalité de cette résurrection et l’identité des corps ressuscites. En dehors de ces assertions fondamentales, nous ne trouvons que les analogies déjà connues et de simples ébauches d’explication.

Saint Hilaire enseigne la résurrection universelle, des bons comme des impies, au moment de la parousie. In Mallh., c. xx, n. 10 ; In ps. lxii, 3, P. L., t. ix, col. 1032, 402. L’universalité de la résurrection est fondée sur l’universalité de la rédemption : cum omnis caro redempta si ! in Christo, ut resurgat. In Ps. LV, 7, col. 360. La résurrection sera toutefois différente pour les justes et pour les pécheurs. Pour les pécheurs, il ne saurait être question de cette demutalio qui ferait de leurs corps des corps glorieux : leurs corps seront sans consistance, comme la poussière ou comme l’eau. Les impies ne ressusciteront que pour être confondus et punis éternellement. In Ps. lii, 16 sq. ; i.iv, 14 ; r.v, 7-9 ; lxix, 3 ; In Malth., c. v, n. 12, P. L., t. ix, col. 334, 354, 360-361, 491, 948-949. En ce qui concerne les élus, leurs corps seront transformés. Mais en quoi consistera cette transformation glorieuse ? En certains textes, saint Hilaire semble se laisser emporter par des formules oratoires : non seulement les corps des élus deviendraient incorruptibles, immuables, mais ils seraient spirituels, semblables aux anges, car les élus sont comme des dieux en qui la forme divine a absorbe la chair terrestre, cum incorruptio corruplionem et œlernitas infirmilalem et forma Dei formam terreuse carnis absorpseril. In Ps. r, n. 13 ; cf. lxvii, x. 35, LXVUI, n. 31, CXX, n. 14, CXXX7, n. h ; cxviii, lit. iii, n. 3 ; /// Matth., c. ii, n. 29 ; xxxiii, n. 4, P. L., t. ix, col. 258, 16*, 489, 660, 770, 518, 978, 1074. Ces affirmations toutefois ne semblent pas impliquer un réel anéantissement de la matière en Dieu, car ailleurs, Hilaire affirme explicitement la permanence de la matière dans les corps ressuscites, nonobstant la transformation glorieuse. Avant et après la résurrection, ils sont substantiellement identiques. Nous retrouvons, à cet égard, transposées en latin, les formules que nous avons rencontrées elle/, saint Cyrille de Jérusalem et saint Amphiloque : « Dieu réparera les corps anéantis, en se servant, non (l’une autre matière, mais de l’ancienne matière qui fut celle de leur origine, en y ajoutant la beauté dont il lui plaira de les décorer, de sorte que la résurrection des corps corruptibles dans la gloire de l’incorruptibilité ne se fera pas par la destruction de leur nature, mais par un changement dans leur manière d'èlre, ut corruplibilium corporum in incorruptionis gloriam resurrcclio non interitu naturam périmai, sed

qualilalis conditione demulct. Ce n’est pas un corps autre. bien qu’il ressuscite en autre condition, selon la parole de l’Apôtre : seminatur in corruplela, resurget in incorruplione, etc. Il y a donc changement, il n’y a pas destruction, fil demutalio, sed non afjertur abolilio. Et le corps qui a été, en devenant ce qu’il n'était pas, ne perd pas son origine, il ne fait qu’acquérir un honneur. » In Ps. ii, 41 ; cf. LV, 12, P. L., t. ix, col. 285, 362.

Quant à expliquer comment sera possible cette restauration des mêmes corps, Hilaire ne cherche pas d’autre réponse que celle que nous avons déjà si souvent rencontrée : Celui qui, au début, a pu former ces mêmes corps, saura bien les reformer au dernier jour. In Malth., x, 20, col. 974 ; In Ps. lxiii, 9 ; cxxii, 5, col. 411, 670.

Hilaire admet que les corps ressuscites auront la stature de l’homme parfait. Mais demander quelle en sera la forme, quel en sera le sexe, grâce à quels aliments ils demeureront éternels, ce sont là questions non "seulement oiseuses, mais injurieuses pour Dieu, dont la puissance et la providence sont sans bornes. In Matth., v, 8-10 ; xxiii, 3-4, col. 946 sq., 1045.

Zenon de Vérone n’a pas une doctrine autre que celle d' Hilaire. La résurrection est pour tous, justes et impies. Tracl., t. I, tr. xvi, n. 1, P. L., t. xi, col. 371. Pour expliquer la réalité et l’identité des corps, Zenon se sert, lui aussi, de la comparaison du phénix, n. 9, col. 381. C’est « du secret de la nature » que les morts reprendront ce qu’ils avaient autrefois en propre, ex illo naturie secrelo produci quales fuerinl pro sua quique qualilale suscepli. Id., n. 7, col. 379. C’est dans ce secret de la nature que sont déposés les éléments de ce qui meurt. Id., n. 4, col. 377. Bien plus, « il n’y a aucun doute qu’en nos corps, dispersés par la loi de la mort, ce n’est ni la substance, ni l’image qui disparaissent, mais la destruction affecte seulement les éléments inutiles, le changement ce qui est consumé », n. 14, col. 385. Phrase obscure, dans laquelle il est difficile de saisir un sens bien précis.

Saint Jérôme n’a pas toujours, dans la question de la résurrection des corps, tenu la même position. Sa théologie est influencée par les préoccupations origénistes ou antiorigénistes. Avant l’année 394, il est enthousiaste d’Origènc et il admet, en exagérant peut-être même la pensée d’Origène, la disparition des corps matériels à la résurrection des élus, ceux-ci devenant tout spirituels, les sexes eux-mêmes disparaissant. In Episl. ad Eph., v, 29, P. L., t. xxvi, col. 533 ; Adv. Jovinianum, t. I, c. xxxvi, t. xxiii, col. 261. Après 394, condamnant toutes les doctrines origénistes à l’exception de quelques thèses miséricordieuses, il affirme l’identité du corps ressuscité avec le corps actuel : « Les morts sortiront de leurs tombeaux, comme de jeunes mulets libérés de leurs liens… Leurs ossements se lèveront comme le soleil. Toute chair viendra en présence du Seigneur, et Dieu commandera aux poissons de la mer et ils rendront les ossements qu’ils avaient dévorés et les jointures se rapprocheront et les os se souderont entre eux ; et ceux qui dormaient dans la poussière de la terre ressusciteront, les uns pour la vie éternelle, les autres pour l’opprobre et la confusion éternelle. C’est ce qui est mort dans l’homme, qui sera vivifié. » Contra Joanncm hieros., n. 33, t. xxiii, col. 385. Cf. n. 25 sq., col. 375. Cependant les corps glorifiés, sans perdre leur substance, seront spiritualisés et ressembleront en quelque façon aux anges. In Isaïam, t. XVI, c. lvtii, 1 I, t. xxiv, col. 575.

Saint Jérôme s’est préoccupé de concilier le flux sans cesse renaissant des éléments du corps humain avec le lait de l’identité du corps ressuscité et du corps actuellement en vie. Paudra-t-il dire, puisque nous changeons chaque jour, que nous revêtirons autant île personnalités diverses que nous aurons éprouvé de change-