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RESURRECTION. LES PERES GRECS


3. Saint Pierre a" Alexandrie composa un traité De incarnatione, mais aussi un écrit Sur la non-préexistence des âmes, dont il ne subsiste que des fragments. Voir t.xii, col. 1804. Il est assez difficile de préciser quelle fut la position exacte d’Origène touchant la préexistence des âmes. Voir t. xi, col. 1532. Mais une fois cette doctrine admise comme expressément origéniste, il devenait plus facile de convaincre d’erreur, touchant l’identité du corps ressuscité, le docteur alexandrin. L’insertion de l'âme en des corps matériels en raison d’une faute antérieure semblait donner aux antiorigénistes un argument contre l’opinion d’une simple forme persistante dans la reconstitution du corps au dernier jour. En réalité, Pierre, comme Méthode et Eusthate, en défendant d’une part la vérité de la résurrection des corps de tous les hommes, en attaquant d’autre part comme erronée la doctrine de la préexistence des âmes, n’a pas encore touché le point précis de l’explication théologique envisagée par Origène et qui, logiquement, est indépendante de l’hypothèse d’une préexistence des âmes. Voir, pour les fragments de Pierre d’Alexandrie, P. G., t. xviii, col. 520, et Pitra, Analecla sacra, t. iv, p. 189 sq., 426 sq. Au fond, n’est-ce pas la défectueuse interprétation qu’Origène faisait de Gen., ni, 21 (les tuniques de peau dont Dieu après le péché revêt Adam et Eve), qui est à l’origine de tout le débat ? Voir t. xi, col. 1568.

4. Saint Épiphane est un adversaire plus fougueux encore d’Origène, Hær., i.xiv. Reprenant le grief formulé déjà par Méthode et par Pierre d’Alexandrie, sur l’interprétation deGen., ni, 21, il ne peut admettre que les peaux de bêtes que Dieu façonna à Adam et à Eve pour les en revêtir soient les corps matériels dans lesquels, en punition de sa faute, l'âme a été enfermée. N. 63, P. G., t. xli, col. Il 77. Citant pour ainsi dire textuellement Méthode, Épiphane combat la conception origéniste de la résurrection. Il ne suffit pas de dire qu’une forme, qui ne peut disparaître, assure la permanence de l'être : « La résurrection n’est pas le fait de ce qui ne meurt pas, mais on ne peut en parler qu'à propos de ce qui meurt et qui de nouveau revient à la vie… Or, c’est la chair qui meurt, car l'âme est immortelle. » Ibid., n. 44, t. xli, col. 1125. Et plus loin, reprenant la comparaison de la graine qui se transforme :

(Notre-Seigneur) te confond immédiatement, 6 querelleur, en disant :.Si le grain de froment qui tombe en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il produit beaucoup de fruits (Joa., xii, 24). Qu’entendait-il par ce grain ?… Il parlait de lui-même, de son corps fait de la chair sainte qu’il avait prise de la Vierge Marie, enfin de toute son humanité… Donc le grain de froment mourut et ressuscita. Est-ce tout le grain qui ressuscita ? Tu ne saurais le nier. De qui donc les anges annoncèrent-ils aux femmes la résurrection ? Ils dirent : Qui cherchez-vous ? Jésus de Nazareth ? Il est ressuscité, il n’est plus là ; venez voir la place (Matth., xxviii, 5-6). Comme qui dirait : Venez voir la place, et laites comprendre à Origène qu’il n’y a point ici de reste, que tout est ressuscité. Il est ressuscité, il n’est point ici : voilà de quoi réfuter ton bavardage, montrer qu’il ne reste rien de lui, que cela même est ressuscité, qui fut cloué, percé par la lance, saisi par les pharisiens, conspué. A quoi bon insister pour contendre le bavardage de ce misérable vaniteux ? Ainsi, comme (Jésus) ressuscita, comme il releva son propre corps, il nous relèvera aussi. Hier., lxiv, 67, 68, P. G., t. xli, col. 1188. Trad. A. d’Alès, op. cit., col. 997. Voir aussi Ancoratus, 87-93, P. G., t. xliii, col. 177 sq.

L’argumentation d'Épiphane est-elle absolument impeccable ? Nous ne le pensons pas, car elle fait abstraction d’un élément d’importance capitale en ce qui regarde la résurrection du Christ : la permanence, pendant le triduum de la mort, de l’union hypostatique d’un côté avec l'âme séparée, d’un autre côté avec le corps et même le sang séparé du corps. Voir sur ce point Hypostatique (Union), t. vii, col. 537-539.

Tout aussi adversaire d’Origène que Méthode, Eusthate et Épiphane, saint Jérôme semble cependant fournir les éléments d’une appréciation plus équitable du docteur alexandrin dans sa lettre Contra Joannem Hierosolymitanum, où il le présente soucieux d'éviter les excès opposés d’un matérialisme grossier et d’une conception gnostique du salut accordé à l'âme seule. Voir surtout, n. 25, 26, P. L., t. xxiii, col. 375.

6° L’enseignement des Pères grecs, à partir du i Ve siècle. — Il semble qu’interpréter les assertions des Pères presque uniquement en fonction de la conception d’Origène, pour y trouver une sorte de répudiation au moins implicite de cette conception, soit s’exposer à introduire dans la question un élément préjudiciel, capable de fausser la perspective de la tradition catholique.

1. Tout d’abord, en effet, un certain nombre de Pères se contentent d’affirmer le dogme, sans y ajouter aucune spéculation théologique.

Alexandre d’Alexandrie († 328) confesse « la résurrection des morts, dont Notre-Seigneur Jésus-Christ fut les prémices, lui qui vraiment a revêtu notre chair et pas seulement un corps de simple apparence ». Episl. ad Alex. Constantin., n. 12, P. G., t. xviii, col. 568.

Saint Athanase, tout occupé des questions trinitaires, a laissé cependant percevoir son sentiment sur la résurrection future, en mettant, dans la bouche de saint Antoine mourant, ces dernières recommandations : « Mettez mon corps au tombeau, couvrez-le de terre… Je recevrai ce même corps, incorruptible, à la résurrection des morts, de mon Sauveur lui-même. » Vila Antonii, xci, P. G., t. xxvi, col. 972.

Saint Jean Chrysostome se pose la question de savoir comment le corps, confié à la terre et dissous, pourra néanmoins ressusciter. Dieu qui voit tout saura bien en retrouver les éléments. In I am ad Cor., hom. xvi, n. 3, P. G., t. lxi, col. 142-143. Et, dans le discours De resurrectione morluorum, c’est encore à la puissance divine qu’il fait appel, n. 7, pour expliquer la résurrection des corps et l’incorruptibilité qui suivra. P. G., t. l, col. 429. A noter, au n. 8, l’assertion concernant l’universalité de la résurrection, des justes pour leur récompense, des impies pour leur châtiment éternel dans les supplices du feu. Ibid., col. 430.

On peut encore classer saint Basile parmi les Pères qui se sont contentés d’une affirmation simple de la résurrection : dans l’homélie Quod mundanis adhærendum non sil, n. 12, il expose que Dieu, ayant rendu à Job le double de ce qu' il avait perdu, ne lui a cependant rendu que le même nombre d’enfants, en raison de la résurrection future. P. G., t. xxxi, col. 564. C’est aussi la conclusion de l’homélie In ps. xxxr/i, ?. 21, n. 13, t. xxix, col. 338 : ce sont « les ossements eux-mêmes, qui reprendront vie ». Toutefois, Basile n’a pas voulu passer sous silence le flux perpétuel de la matière, comme Origène l’avait lui-même affirmé. Inps. xliv, n. 1 ; exiv, n. 5, t. xxix, col. 388, 492. Basile laisse donc la porte ouverte à l’explication ultérieure que demande le fait de ces mutations perpétuelles dans le corps humain, en face des exigences de la résurrection.

Mêmes affirmations simples, recueillies en différentes œuvres de saint Grégoire de Nazianze, Oral.. vu, In laudem Cxsarii fratris, n. 21, P. G., t. xxxv, col. 781, 784 (la résurrection y est professée au nom de la prophétie d'Ézéchiel) ; cf. Orat., xlii, n. 6, t. xxxvi, col. 465. On en retrouve encore l’expression nettement formulée dans les Poèmes, t. I, Theol., sect. ii, xviii ; t. II, Hist., sect. i, xi, XLIII, t. xxxvii, col. 787, note au ꝟ. 11, 1106, 1347-1348.

En poursuivant notre enquête au ve siècle, nous trouvons l’affirmation très nette de la résurrection sous la plume de Macaire de Magnésie (fin du iv » ou début