Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 13.2.djvu/555

Cette page n’a pas encore été corrigée
2523
2524
RÉSURRECTION. TERTULLIEN


Dans ce dernier passage, Irénée affirme « le salut de l’homme total, corps et âme ».

Mais comment expliquer la résurrection ? <> Don de Dieu », t. III, c. xx, n. 2, col. 843, la résurrection est l'œuvre à la fois de la puissance et de la justice divines.

Œuvre de la puissance. Nos corps ressusciteront, non ex sua substantia, sed ex Dei virtute, t. V, c. vi, n. '2, col. 1 1 39 : Dieu, « meilleur que la nature », a le vouloir, le pouvoir et le parfaire. L. II, c. xxix, n. 2, col. 813814 :

Si Dieu ne vivifie pas ce qui est mortel, et ne donne pas l’incorruptiHlité à ce qui est corruptible, c’est qu’il est impuissant. Mais qu’en toutes ces choses il soit puissant, nous pouvons le constater d’après notre propre origine. Dieu a piis du limon de la terre et i) en a fait l’homme. lit si, sans qu’il préexistât d’os, de nerfs, de veines et d’organisme propre a constituer l’homme. Dieu a pu les faire de rien pour en former l’animal raisonnable qu’est l’homme, il est moins difficile et moins incroval le eue Dieu, … l’homme étant constitué et ses éléments étant dissous dans la terre, fasse une réintégration du tout, malgré le retour du corps (mot ; 1 mot : de l’homme) dans les éléments d’oii il fut tiré alors qu’il n’existait pas encore. Car celui qui, au commencement, fit, quand il le voulut, exister celui qui n’existait pas. pourra à plus forte raison restituer : "i la vie qu’il leur avait donnée ceux qui déjà ont existé. L. V, c. iii, n. 2, col. 1 12*1-1130.

Un témoignage irrécusable de la puissance divine nous est donné dans la longévité des patriarches, dans la préservation de la mort accordée à Élie et à Hénoch, dans la protection accordée à Jonas et aux trois enfants dans la fournaise. Id., c. iv-v, col. 1130-1136.

Œuvre de la justice aussi. Il est juste que le corps, qui a participé aux bonnes actions avec l'âme, ait sa part de récompense. Les attributs divins appellent la résurrection des corps. L. II, c. xxix, n. 2, col. 81 3-8 14.

Tout en faisant appel aux attiibuts divins pour expliquer la résurrection, Irénée n’ignore pas la comparaison du germe, proposée avant lui par Clément de Rome et Justin. Le corps, formé de la terre, « retourne à la terre, à l’instar d’une très bonne semence », qui germe par l’action de Dieu. Fragment conservé dans les Sacra parallela, P. G., t. vii, col. 1236 ; cf. Conl. hser., t. V, c. vii, n. 2, col. 1140-1141.

Sur quoi s’appuie la croyance en la résurrection future ? Irénée met ici en avant l’autorité des écritures. Pour l’Ancien Testament, voir t. V, c. xv, n. 1, col. 1 163-1 164, et fragm. xxxvi, col. 1248. Dans le Nouveau Testament, nous avons les paroles de Jésus-Christ et ses actes.

Les paroles d’abord. Celles adressées aux sadducéens. L. IV, c. v, n. 2, col. 984-985. Irénée réfute l’argument gnostique tiré de I Cor., xv, 50 : « la chair et le sang » dont il est ici question doivent s’entendre de ceux qui pèchent en s’adonnant à des œuvres charnelles : ceuxlà n’entreront pas au ciel. L. V, c. îx-xii, col. 1 144-1 156.

Les actes ensuite. Les guérisons et les résurrections opérées par Jésus montrent la puissance de Dieu sur les corps et sont un présage de la résurrection future. L. V, c. xii, n. 5 ; c. xiii, n. 1, col. 1155-1157. La résurrection du Christ garantit la nôtre, t. V, c.vn, n. 1 (Irénée s’appuie ici sur Rom., viii, 11), col. 1 139-1 140 : cf. I. IV, c. ii, n. 4, 7 ; c. v, n. 2, col. 978, 979, 985. L’incarnat Ion elle-même est la meilleure preuve de notre résurrection future, car, si le Verbe a pris notre chair, c’est pour la sauver. L. V, c. xiv, col. 1160-1103. L’eucharistie est gage d’immortalité. L. IV, c. xviii, n. 5 ; t. V, c. ii, surtout n.2, col. 1027-1029, 1123-1128. La doctrine riu corps mystique enfin veut que, comme la tête est ressuscilée, les membres ressuscitent aussi, t. III, c. xix, n. 3, col. 941 ; cꝟ. t. V, c. VI, n. 2 ; c. xiii, n. 4, col. 1 139, 1159-1160.

Les modalités de la résurrection sont touchées par Irénée. Tout d’abord, l’identité des corps ressuscites.

Identité personnelle : l'âme retrouvera son corps et le corps son âme : non aliud est quod moritur et aliud vivificatur. L. V, c. xiii, n. 3, col. 1153 ; cꝟ. t. II, c. xxiii, n. 5 ; t. V, c. iii, n. 2 ; c. xiii, n. 3 : fragm.xii, col. 833834, 1130, 1158-1159, 1235. Ensuite, l’universalité de la résurrection, ad… resuscitandam omnemearnem. L. I, c. x, n. 1, col. 549 ; cf. c. xxii, n. 1 : t. II, c. xxxiii, n. 5 ; t. III, c. xvi, n. 6, col. 669-670, 834, 925. Enfin, reflet des opinions millénaristes d’Irénée, la résurrection ne sera pas simultanée. La première résurrection sera celle des justes, au début du « règne » ; les méchants ressusciteront à la deuxième résurrection, à la fin du règne. L. V, c. xxvi, n. 2 ; c. xxii, n. 2 ; c. xxxiii, n. 4 ; c. xxxiv, n. 1 ; c. xxxv, n. 1, 2, col. 1194, 1211, 1214, 1215, 1218, 1220. Voir aussi Démonstration, c. xli, xlii, P. ()., t.xii, p. 690-691. Sur tous ces points, voir ici Ikénke (Saint), t. vii, col. 2502-2503.

2. Minucius Félix écarte les fables de Pythagoro et de Platon sur la métempsycose. Pour la conservation des éléments corporels en vue de la résuri ection, il ne sait l’expliquer, il s’en rapporte à Dieu qui en est le gardien. Nous retrouvons les formules déjà employées par Clément de Rome, Taticn, Théophile d’Antioche. Octavius, xxxiv, P. L., t. iii, col. 347 ; cf. Rouet de Journel, Ench. patrist., n. 272.

3. Terlullien a exposé et défendu le dogme en question contre les railleries des adversaires dans son Apologdicum, c. xi.vm ; dans tout le traité De resurrectione rarnis et dans le livre V de VAduersus Marcionem. (Références à P. L., éd. de 1844.)

a) Le premier en date est YApologelicum (vers la fin de 197). Tcrtullien y défend la résurrection contre les païens. C. xlvim. Les païens croient volontiers à la métempsycose et raillent la résurrection. Pourtant, si les âmes sont destinées à rentrer dans des corps, n’estil pas plus naturel que ce soit dans ceux qu’elles ont déjà animés ? Dans l’hypothèse contraire, que devient la personnalité humaine ? Des échanges s'établiraient, qui sont matière à plaisanteries. Mois la raison décisive d’accorder les mêmes corps aux mêmes âmes, c’est le jugement divin. Unie au corps pour le mérite et pour le démérite, l'âme doit lui demeurer unie pour la récompense ou la punition. Tcrtullien apporte une deuxième raison qu’il abandonnera dans la suite : l'âme séparée de la matière est insensible : neque pati quicquam potest anima sola sine slabili maleria. P. L., t. I, col. 523.

Comment se fera la résurrection ? C’est à la puissance divine qu’il faut faire appel. Dieu qui a créé l’homme de rien, saura ranimer sa matière inerte : où qu’elle soit, sa substance se retrouvera ; Dieu est le maître de tout et du néant même. Ubicumque resolulus fucris, quæcumque le maleria deslruxcril, liauserit, aboleverit, in niliilum prodegeril, reddet le. Ejus est niliilum ipsum eu jus et lotum. Col. 525.

Il n’est pas question de multiples morts et de multiples renaissances. La vie présente nous introduit à un ordre définitif ; le dernier jour du monde s’ouvrira sur l'éternité. Nec mors jam nec rursus ac rursus resurreclin serf crin, us iidem qui nunc, ncealii posl ; le genre humain reçue illera dans une vie nouvelle le fruit de ses œuvres : les élus, près de Dieu, dans la gloire ; les damnés livrés au feu à qui Dieu communique l’incorruptibilité. Col. 527.

b) Le traité De resurrectione carnis (entre 208 et 211) réfute les hérétiques. Semi-sadriucécns, ces hérétiques gnostiques acceptent l’immortalité de l'âme, mais rejettent la résurrection de la chair. De resurrectione, c. iv, P. L., t. n. col. 799.

Les hérétiques insistent sur la honte de la chair, ses faiblesses, son retour à la terre, pour la dénigrer. A cette satire de la chair, Tcrtullien oppose une sorte rie panégyrique de la chair. La chair est l'œuvre de Dieu dans la création de l’homme ; dans la vie surnaturelle.