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    1. RÉSURRECTION##


RÉSURRECTION. LES PÈRES APOSTOLIQUES

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donc opposition seulement entre la résurrection spirituelle et la corporelle, qui aura lieu, pour tous ensemble, seulement à la fin des mille ans, c’est-à-dire à la fin du monde. Les versets 12-15 montrent bien qu’on ne saurait interpréter différemment le texte de l’Apocalypse. Le « reste des morts », ꝟ. 5, qu’on retrouve au v. 12, et qui sont mis en contraste avec les martyrs ou les confesseurs sortis de ce monde, ce sont tous ceux qui ont quitté la vie sans être régénérés. Pendant le Millenium, ils ne vivront ni spirituellement, ni corporellement. Comme morts spirituels on peut vraisemblablement leur associer les impies même vivants qui rejettent la conversion. Cette classe d’hommes pécheurs impénitents ne peut prétendre à la résurrection spirituelle, mais simplement à la résurrection corporelle de la fin du monde, laquelle n’aura lieu qu’après le Millenium accompli. C’est là l’interprétation, non seulement du P. Allô, loc. cil., mais de la plupart des catholiques, suivant en cela saint Augustin, De civitate Dei, t. XX, c. vii, n. 1. P. L., t. xli, col. 666 ; cf. Serm., cclix, n. 2, P. L., t. xxxviii, col. 1197 ; et, parmi les modernes, Bossuet, Préface sur PApocalypse, c. xxviu et explication du c. xx, n. 2 sq., Œuvres, édit. Outhenin-Chalandre, Besançon, 1836, t. vi, p. 499, 593 sq. Plus récemment, voir Billot, op. cit., et La parousie, Paris, 1920, p. 315-326. [Il faut reconnaître, d’ailleurs, que cette explication est fonction d’une exégèse générale de l’Apocalypse qui est loin de s’imposer. Le dernier mot ne nous paraît pas dit sur cette question générale et sur l’application qui est faite ici de la théorie.]

2. La « double résurrection corporelle » et saint Paul. —

S’il n’est pas question d’une double résurrection corporelle dans l’Apocalypse, à plus forte raison doit-on la rejeter de l’eschatologie de saint Paul. Il est nécessaire cependant de signaler ici l’insistance de quelques critiques indépendants qui veulent à tout prix retrouver en saint Paul, I Cor., xv, 22-26, la tendance chiliastede l’Apocalypse. Voirie texte-ci dessus, col. 2514. Entre les versets 23 et 24 on introduit la notion du règne intermédiaire, comme dans l’Apocalypse. « La résurrection se fait en trois temps : d’abord celle du Christ, prémices, qui a eu lieu déjà ; ensuite celle des fidèles du Christ, à l’heure de la parousie ; et puis, celle du reste des hommes qui n’ont pas eu part à la première. Donc, deux résurrections corporelles. La deuxième est séparée par un intervalle de la première, comme celle-ci l’a été de la résurrection de Jésus. Trois za.yy.oi.zoi. : le Christ, les fidèles, « les autres ». Le premier intervalle a été rempli par la vie militante de l’Église jusqu’au retour de son Chef, à la parousie ; par quoi le sera le deuxième ? Par le « règne » du Christ redescendu parmi les siens ressuscites ; il prendra vigoureusement en mains le pouvoir royal pour réduire toutes les puissances qui ne lui sont pas encore soumises (cf. Apoc. xx, 8. Gog et Magog) et détruira tout l’empire de la Mort (qu’il jettera dans l’étang de feu, Apoc, xx, 15), en ressuscitant les derniers morts, auxquels le jugement général assignera leur sort éternel ». B. Allô, Saint-Paul et la double résurrection » corporelle, p. 191.

Le P. Allô, réfutant ce parallélisme (lequel, s’il était exact, n’aboutirait pas encore à l’erreur millénariste), montre qu’il faut écarter de l’eschatologie de Paul toute idée de « règne intermédiaire après la parousie. Il note simplement que Paul, dans le passage incriminé, ne dit rien concernant les hommes que le dernier avènement trouvera encore sur la terre. Mais cette omission n’existe pas, en réalité, puisque la question a été abordée dans I Thess., iv, 13-18. Mais, si l’on compare I Cor., xv, 22-26, avec la suite de la doctrine eschatologiquc exprimée aux ꝟ. 50 sq., tout doute doit alors s’efîaccr : dans les perspectives encourageantes que Paul ouvre aux Corinthiens, il n’y a pas la moindre mention d’un Millenium de bonheur qui dût commencer durant leur vie ou plus tard. L’épître aux Thessaloniciens, à laquelle on vient de faire allusion, détruit par ailleurs toute velléité de millénarisme chez saint Paul. « L’attitude de Paul à l’égard de la « double résurrection « corporelle et du millénarisme s’y révèle manifestement négative. Tout, en effet, y est présenté comme se passant presque in instanti, et ici personne ne pourra douter qu’il s’agisse de la parousie. En mèms temps que le Sauveur, Dieu fait paraître les morts élus (évidemment ressuscites) aux yeux des vivants. Et, avant même que le Christ ait touché terre, tous les sauvés, morts et vivants, se sont élancés d sa rencontre, ravis dans les nuées. Leur ravissement dans les nuées n’a été que l’élan de leur ascension continue vers le ciel, où ils se reposeront éternellement avec le Christ. Il n’est pas dit que les vivants ont eu d’abord à être « transformés », mais cela va de soi, puisqu’ils se trouvent d’une condition égale à celle des ressuscites, agiles comme eux, s’envolant du même vol. » Art. cit., p. 206 ; l’article est repris à peu près textuellement dans Première éptlre aux Corinthiens, p. 438-453.

Conclusion. —

L’enseignement de l’Écriture, spécialement dans le Nouveau Testament, met en relief, comme appartenant aux fondements mêmes de la religion chrétienne, le dogme de la résurrection générale à la fin du monde. Si Paul insiste spécialement, en raison du thème qu’il développe, sur la résurrection des justes, il n’en est pas moins vrai que lui-même et les évangélistes enseignent clairement la résurrection des justes et celle des pécheurs, les justes devant recevoir, même dans leurs corps, la récompense due à leurs bonnes actions ; les méchants devant, âmes et corps, recevoir leur châtiment. Saint Paul toutefois met en relief les transformations que devront subir les corps glorifiés, tandis qu’il est muet sur les conditions des corps des damnés. Enfin, l’interprétation spirituelle de la première des « deux résurrections » de l’Apocalypse, la comparaison de l’eschatologie de l’Apocalypse avec celle de saint Paul, soit dans I Cor., soit dans I Thess., montre que, s’il n’y a qu’une résurrection, cette résurrection est faite pour tous les hommes simultanément, in instanti, et que cependant, dans un sens spirituel, on peut parler de la résurrection des vivants et des morts, tout comme de leur jugement.

La résurrection des corps enseignée par l’Écriture n’aurait aucun sens intelligible, s’il ne s’agissait précisément des corps mêmes que les hommes auront eus en cette vie. Les conditions de l’identité ne sont en aucune manière abordées par l’Écriture, et, en ce qui concerne les élus, saint Paul dit clairement que cette identité est compatible avec les transformations nécessaires à l’état de gloire.


II. L’enseignement de la tradition.

I. LES PÈRES.

Les Pères apostoliques.


1. Affirmations générales. —

La Didachè indique clairement la résurrection des morts comme devant se produire à la lin du monde, xvi, 6. Cf. I a démentis, xxiv, 2 ; II* démentis, ix, 1 ; xix, 3 ; Epist. Barnabas, v, 7 ; xxi, 1 ; et, dans les épîtres d’Ignace, Trall., ix, 2 ; Polyc, vii, 1 (dans les autres textes où il est question de résurrection, il s’agit ou de la résurrection du Christ ou de notre résurrection spirituelle dans le Christ) ; Polyc. Epist., vii, 1 ; Martyr., xiv, 2. Si le Pasteur d Hermas, ne parle pas directement de résurrection, du moins la description qu’il fait de la récompense des bons dans l’autre vie, Vis., II, iii, 2, 3 ; IV, iii, 5, et des châtiments qui y attendent les impies, Vis., III, vii, 2 ; S(’m., IV, 4 ; IX, xviii, 2, ne se comprend guère sans la résurrection. La mort éternelle qui attend les impies n’est autre que la souffrance éternelle qui les torture loin de la vie éternelle. Cf. Mand., XII, ii, 3.

2. Considérations particulières. —

a) L’épître de Barnabe reprend l’argumentation de Paul : le Christ