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Il ÉSURRECTION. L’E VA NGILE

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bcllo jud., II, viii, 14 ; Anliq.jud., XVIII, i, 4. D’un mol, Jésus écarte le côté négatif de la thèse sadducéenne. A la résurrection, le mariage n’aura plus de raison d’être : neqæ nubent, neque nubentur. Matth., xxii, 30 ; Marc, xii, 25 ; Luc, xx, 35. Les ressuscites auront des corps en quelque sorte spiritualisés, comme les anges de Dieu. Cet aspect négatif de la question une fois éliminé, Jésus-Christ passe au côté positif de la doctrine de la résurrection.

L’objection des sadducéens vient, d’après le Sauveur, de ce qu’ils ne comprennent pas la puissance de Dieu, capable de créer un ordre différent de celui qu’ils ont sous les yeux, et de ce qu’ils n’ont pas assez pénétré les Écritures. Et Jésus d’apporter aux Sadducéens un argument tiré de l’Exode ; « à l’endroit du buisson », spécifient Marc et Luc. Pourquoi ce choix d’un livre du Pentateuque, alors que tant d’autres passages de l’Ancien Testament auraient pu fournir des arguments plus directs ? Plusieurs Pères, y compris Origène, l’auteur des Philosophumena, saint Jérôme, ont affirmé que les sadducéens n’admettaient pas d’autres livres sacrés. Cette opinion est vraisemblablement trop absolue, mais il est probable cependant que les sadducéens n’admettaient comme strictement canonique que le Pentateuque. Cf. Schùrer, Geschichle des jiïdischen Volkes, t. ii, 4e édit., p. 481. Jésus argumente donc du livre de l’Exode, « livre de Moïse » par excellence, et oppose aux sadducéens cette vérité fondamentale : « Le Dieu d’Abraham, d’Isaac, de Jacob, qui s’est révélé à Moïse près du buisson ardent, n’est pas le Dieu de morts, mais de vivants. »

Dans l’Exode, quand Dieu se révèle à Moïse comme le Dieu des patriarches, le sens est qu’il est ce même Dieu qu’ils ont adoré durant leur vie, sans aucune allusion à leur état présent. Mais Jésus suppose, ainsi que tous ceux qui recevaient l’Écriture comme inspirée, qu’elle contient, en plus du sens littéral historique, un sens plus profond. Ce sens a été très bien reconnu par Loisy : « Quel que soit le sens réel du passage de l’Exode auquel se rattache le raisonnement, on peut dire en parlant de la croyance à un Dieu personnel, que ce Dieu ne peut pas avoir cessé d’être le Dieu de ceux qui l’ont servi, qui l’ont aimé, de ceux qu’il a lui-même honorés de sa faveur. Ceux qui ont vécu pour Dieu ne peuvent jamais être morts pour lui. » (Évangiles synoptiques, t. ii, p. 342). C’est sur cette union à Dieu que le psalmiste appuyait son espérance d’immortalité. Ps., xvi, 8 sq. ; xlix, 15 sq. ; lxxiii, 23 sq. ; cf. Revue biblique, 1905, p. 188 sq. Dieu n’abandonne pas les siens à la mort ; Abraham, Isaac et Jacob étaient donc encore vivants. Or, les Hébreux n’imaginaient pas la mort comme une délivrance de l’âme qui lui permettrait de remonter vers les idées à la façon platonicienne. Les morts étaient dans le Seol où ils vivaient d’une vie imparfaite ; si vraiment Dieu est le Dieu des vivants, il fera sortir un jour d’entre les morts ceux qui avaient été et qui demeuraient ses amis pour reprendre avec eux une société plus intime.

L’argument conclut donc, à la condition de faire état des données de la foi juive. Dans le sens rationnel, on le développerait en disant par exemple avec Victor : n - ; ap ti to (rwaiiçÔTspov £<7tcv èv avijpaiTToi ;, Lai rj Çwf) xotvrj, xaî £v.aT£pa>v ôît Ttpo ; tô tï)V éx Bavàrou Ç » Y|V JtâXtv cWTijvat. L’union substantielle de l’âme et du corps exige, si l’homme doit vraiment vivre pleinement de Dieu, que le corps soit associé à cette vie. Mais Jésus ne raisonnait pas en philosophe, ni avec des gentils ; après avoir affirmé que Dieu peut donner aux siens une vie plus parfaite et divine, il montrait comment le Pentateuque lui-même insinuait (Luc, È(irjrvae <) qu’elle serait un jour leur partage. L’erreur des sadducéens était grande, Jésus le leur dit sévèrement : que devient la religion si elle est réduite au culte de Dieu, pendant une existence terminée absolument par la mort ? » J.-M. Lagrange, Évangile selon saint Marc, Paris, 1920, p. 298-299.

Sans parler explicitement de la résurrection des corps, la scène du jugement dernier, évoquée par le Christ, suppose que tous les hommes seront présents à ce jugement, en corps et en âme. Les élus, en effet, seront rassemblés des quatre vents, des hauteurs des cieux à leurs extrêmes limites. Matth., xxv, 31 ; Marc, xiii, 27. Mais ce ne sera pas le fait des seuls élus, puisque, au jugement même, les bons seront placés à la droite du juge, les méchants à sa gauche et que sur ces derniers tombera la sentence de réprobation. Ce sont « toutes les nations » qui seront réunies. Matth., xxv, 32, 33, 41. Toutefois, en raison de la béatitude qui suivra, la « résurrection des justes » est proposée par le Christ comme le plan premier sur lequel doit se dérouler leur glorification.

2. Dans saint Jean. Mais c’est dans saint Jean que l’enseignement du Christ sur la résurrection apparaît le plus complet et le plus net. Le Sauveur déclare que son Père lui a donné, comme Fils de l’homme, le pouvoir de juger tous les hommes. Joa., v, 28. S adressant aux Juifs, il ajoute : « Ne vous étonnez pas de ceci, car l’heure vient où tous ceux qui sont dans les tombeaux entendront sa voix, et ils sortiront : ceux qui auront fait le bien pour une résurrection de vie, ceux qui auront pratique le mal pour une résurrection de jugement. » Joa., v, 28-29. Il n’y a ici aucune antinomie entre deux résurrections, l’une purement spirituelle, celle des justes, l’autre physique, celle qui correspond à noire concept de la résurrection des corps. En fait, la résurrection de vie suppose et complète la résurrection physique, celle qui fait sortir des tombeaux tous lès hommes entendant la VOIX du juge. La vie spirituelle du croyant est déjà sans doute le commencement de la vie éternelle, mais elle n’empêche pas la mort du corps ; et donc il est nécessaire qu’à la fin des temps le corps ressuscite pour être associé à cette vie. Tous ressusciteront . justes et pécheurs, mais les justes ne sont pas, a proprement parler, soumis au jugement : ils sont destinés et vont à la vie. Seuls, les pécheurs ressuscitent pour être ju^és.

Gel te résurrection au dernier jour, Jésus la promet à quiconque croit en lui, car cette foi fait déjà posséder la vie éternelle. Joa., vi, 39, 40. Continuant son enseignement, malgré les murmures des Juifs, Jésus assure qu’il ressuscitera au dernier jour celui qui vieni à lui, attiré par le Père. Joa., vi, 44. Et, précisant sa pensée, en même temps qu’il révèle l’eucharistie future, le Sauveur affirme que quiconque mange’de ce pain, vivra à jamais… ; celui qui mange ma chair et boit mon sang possède la vie éternelle, et je le ressusciterai au dernier jour. » Joa., vi, 53-54.

Ce fait de la résurrection, en même temps que ce pouvoir du Chiist sur la résurrection des hommes, est affirmé en traits saisissants dans l’histoire de la résurrection de Lazare. Lazare était mort, et Jésus, se présentant à Marthe, en reçoit cet affectueux reproche : « Si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort ; maintenant encore je sais que tout ce que tu demanderas a Dieu, Dieu te l’accordera. » Jésus lui dit : « Ton frère ressuscitera. » Joa., xi, 20-23. Cette réponse, encore vague, du Maître, pouvait être entendue de la résurrection générale, dogme reconnu des Juifs orthodoxes et auquel Marthe montre immédiatement (ꝟ. 24) qu’elle n’est pas étrangère : « Je sais, dit-elle, qu’il ressuscitera lors de la résurrection, au dernier jour. » Mais Jésus insiste sur un point que les Juifs ignoraient, la part prise par le Messie à la résurrection, voir ci-dessus, col. 25 12. Jésus demande à Marthe de croire, non seulement qu’il est le.Messie, mais qu’il est « la résurrection et la vie ». « Celui qui croit en moi, ajoute-t-il, fùt-il mort, vivra et quiconque vil et ci oit en moi ne mourra pas pour toujours. Le crois-tu ? » L’acte de foi de Marthe reçoit sa récompense dans fa résurrection immédiate de son frère.

L’enseignement de saint Paul.


1. Le fait de la résurrection. —

Saint Paul fait de la résurrection d’entre les morts un dogme fondamental pour les chrétiens. Et il en rattache intimement la vérité à la vérité de la