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INSTITUTION. CAUSES EXCUSANTES


ou si l’objet est de peu de valeur, celui-ci sera donné aux consanguins ou aux héritiers du propriétaire et à leur défaut aux pauvres, ou même licitement gardé par celui qui le détient honnêtement pour lui et ses consanguins, si lui ou ceux-ci sont dans la pauvreté.

3. Restitution prévue par un contrat.

a) Les dettes

de contrat onéreux sont à acquitter au lieu fixé expressément ou tacitement par la convention. Si sur ce point il n’y a eu aucune entente, les coutumes régionales, en vigueur dans les contrats semblables, devront être suivies.

b) Les contrats gratuits (donation, legs, etc.) s’exécutent là où étaient les biens lorsqu’ils furent donnés ou légués, à moins qu’il n’en soit disposé autrement par le testateur.

5° Quand doit se faire la restitution ? — 1. Restitution immédiate ; 2. Restitution différée.

1. La restitution immédiate.

D’une manière générale, la restitution est obligatoire aussitôt que l’on sait être débiteur ou injuste détenteur d’un bien d’autrui. Ce principe est absolu quant à l’acte intérieur. La résolution de mettre fin à l’injustice doit être pour ainsi dire mathématiquement immédiate.

2. La restitution différée.

Quant à la restitution réelle, elle s’exécute au jour fixé s’il y a contrat mutuel, sinon le plus tôt possible moralement, lorsque cela sera commode et sans un inconvénient personnel notable ou plus grave que celui qui adviendrait à celui qui a été lésé, si sans raison excusante et volontairement on diffère de lui retourner son bien. L’exécution admet donc des retards légitimes, car il est indispensable de prendre en considération les circonstances de temps, de lieu, les difficultés actuelles des personnes en jeu et la valeur même de la chose à rendre. Par exemple, celui qui, en chemin de fer, se souvient qu’il est redevable d’une somme d’argent à un de ses amis éloigné, doit immédiatement former le projet de restituer, bien qu’il soit obligé d’en différer l’exécution. Cf. S. Alphonse, t. III, n. 676, n. 079 ; Praxis confess., n. 43.

Le débiteur qui, sans raison suffisante, se refuse à re îdrele plus tôt possible, alors qu’il en ala commodité, ou qui veut seulement le faire par partie, bien qu’il ait la possibilité de remettre le tout, ne peut pas être absous, car il n’a pas le, ferme propos : Sires aliéna, propter quam peccatum est, reddi possit, et non redditur, pxiiitentia non admittitur, sed simulatur. Si uutem veraciler agitur, non remittitur peccatum, nisi restituatur ablatum si, ut dixi, restitui potest. Décret de Gratien, causa XIV, q. vi, c. 1. La règle canonique est aussi catégorique : Peccatum non dimittitur, nisi restituatur ablatum. Reg. 4, de regulis juris, in VI.

Pour obtenir le pardon divin, la restitution mentale ou interne suffit, mais le débiteur qui a promis plusieurs fois en confession de restituer et qui ne s’est pas réellement exécuté ne peut pas recevoir l’absolution à moins qu’il ne se soit produit un nouvel événement, qui autorise le prêtre à la donner une fois de plus.

Celui qui est à même de s’acquitter durant sa vie et qui remet cette obligation à l’article de la mort ou la laisse à ses héritiers, n’a pas non plus la contrition requise pour être purifié de son péché, sauf s’il s’agit d’éviter une infamie ; le débiteur aurait alors le droit de réparer par testament.

Causes qui excusent de la restitution.

1. Les unes

suspendent l’obligation ; 2. Les autres l’éteignent.

1. Causes qui suspendent l’obligation de restituer. — a) L’ignorance de droit ou de fait excuse du délai qui est apporté à la restitution, quand, unie à la bonne foi, elle n’est pas coupable.

b) Un dommage à craindre. — Le débiteur est-il tenu de restituer aux créanciers lorsqu’il prévoit que ceuxci en abuseront pour commettre le péché ou pour nuire à autrui ?

a. Pour commettre le péché. — D’une manière générale, si le créancier veut user du bien rendu pour commettre le péché, pour corrompre son semblable, s’adonner aux plaisirs mauvais, pratiquer fa simonie, ou pour s’enivrer, c’est une obligation de charité, admise par la plupart des théologiens, que de différer la restitution. Il faut, en effet, écarter tout dommage du prochain quand cela est possible sans grave inconvénient personnel.

Parfois cependant ce retardement n’atteint pas la fin recherchée, si le créancier obtient de l’autorité judiciaire que son bien lui soit remis ou trouve facilement un autre moyen qui lui permette de perpétrer son forfait. Dans ces cas il est licite de restituer, car ce n’est plus un acte considéré comme nocif en lui-même. Il en est ainsi également s’il est prévu que le créancier réclamera de nouveau son dû avec une intention de péché. car le délai lui offrirait plutôt une occasion de multiplier les péchés que de les éviter.

b. Si le créancier doit abuser de son bien pour nuire ù autrui, tous admettent qu’il faut différer la restitution, si cela est possible sans plus grave ou égal inconvénient. Sur ce point saint Thomas s’exprime en ces termes : Quando res restituenda apparct esse nociva ei cui restitutio facienda es/ vel alteri, non débet lune restitui ; quia restitutio ordinatur ad utilitatem ejus, cui restituitiir : omnia enim quæ possidentur, sub ratione utilis cadunt ; née tamen débet ille, qui detinet rem aliénant, sibi appropriare, sed vel reservare, ut congruo tempore restituât, vel etiam alii traderc tutius conservandam. II a -lP’, q. i.xii, a. "). ad l"m.

Bien qu’ici le précepte de la charité intervienne probablement, c’est surtout, semble-t-il. une obligation de justice qui motive le retard. Dans l’hypothèse envisagée, en effet, la restitution revêt les caractères d’une véritable coopération contre la justice, étant donné que le débiteur fournit, pour ainsi dire, l’instrument qui servira à nuire à autrui. S. Alphonse, t. III, n. < ;) ?.

c) L’impuissance. — Elle est physique ou morale : a. Quand elle est physique, le débiteur est excusé de restituer actuellement, car à l’impossible nul n’est tenu. selon la règle de droit : Nemo potest ad impossibile obligari. Reg. (i, de regulis juris, in VI ; cf. Décret de Gratien, causa XIV, q. vi, cl. Non remittitur peccatum, nisi restituatur ablatum. sed ut dixi, cum restitui potest. Plerumque enim qui aufert. amittit, sive alios patiendo malos, sive ipse maie vivendo, nec aliud liabel, unde restituât. Hinc certe non possumus dicere : Rcdde quod abstulisti.

b. Il y a impuissance morale, si la restitution entraîne pour le débiteur un notable et plus grand détriment que celui subi par le créanciei du fait du retard. Il sera permis de différer quand il y aura péril pour le salut de l’âme (au cas, par exemple, où il faudrait recourir à des moyens peccamineux), pour la santé du corps, pour la bonne renommée, ou, même s’il y avait eu faute, le risque de perdre un état de vie honnête et justement acquis. S.Alphonse, t. III, n. 697-698, n.702 ; Wouters, t.i, n. 1021, 3. L’excuse ne vaudrait pas dans cedernicr cas, s’il n’était question que de diminuer le train de vie ou d’abandonner une situation obtenue malhonnêtement.

En pratique, il faut appliquer ces principes avec modération et sagesse et considérer qu’il s’agit non seulement du dommage subi par le débiteur en personne mais aussi de celui des siens. Par celle appellation entendons ses parents, son épouse, ses enfants, vraisemblablement aussi ses frères et sœurs qui seraient jeunes et incapables de se suffire, ou même qui seraient d’un âge plus avancé et qui, sans qu’il y ait de leur faute, seraient tombés dans une grave nécessité.

d) La nécessité. — Celle-ci excuse de la restitution immédiate. Cependant si, du fait de ce délai, le débiteur et le créancier se trouvent dans une égale nécessité,