L519 QUESNEL. ATTAQUES CONTRE LES « RÉFLEXIONS MORALES
1520
- i Amsterdam, approuva la résistance de « ces fidèles
servantes de Dieu », qui s’exposaient « à tout plutôt que de trahir leur conscience par l’approbation d’un écrit calomnieux » ; d’autres amis désapprouvaient la résistance, mais ils ne furent pas écoutés. On n’a pas à raconter ici les détails de cette triste histoire, car ils n’intéressent point la théologie. Le monastère fut détruit le 29 octobre 1709.
Sur 1 ; < destruction de Port-Royal, on peut lire les écrits du temps et particulièrement les Mémoires sur la destraction de Port-Rogal-des-Champs, 1711 ; Mémoires historiques et chronologiques de Guibert, t. m-vi ; llist. abrégée de lu dernière persécution, par Olivier Pinaud, 3 vol. in-12, 17.">0 ; Gémissements d’une Ame vivement touchée de la destruction du monastère de Port-Royal-des-Champs, in-12, 1734 fil y en a quatre) ; Sainte-Beuve, Port-Royal, tout le 1. VI ; Albert Le Itov, Ln France et Rome île 1700 -< 1715, p. 234294 ; Mlle Gabier, llist. ilu monastère de Port-Rogal-desChamps, in-8°, Paris. 1929, C. vi-x,
XIII. Fénelon et Quesnel, — Féiielon, qui avait si vivement attaqué le jansénisme, regardait Quesnel comme l’auteur responsable de cette nouvelle poussée janséniste au début du xviiie siècle. Le cardinal de Iiausset, dans son Histoire de Fénelon, t. V, p. 350358, parle d’une première lettre de Fénelon à Quesnel, dans laquelle l’archevêque de Cambrai accueille avec bonté la proposition qui lui aurait été faite par Quesnel de s’entretenir avec lui sur la question du jansénisme : « Si nous ne pouvions pas nous accorder sur les points contestés, au moins tâcherions-nous de donner l’exemple d’une douce et paisible dispute, qui n’altérerait en rien la charité. » Le fait est peu probable car le P. Quesnel écrivait, le 19 octobre 1709, à M. Schort, médecin anglais converti à la morale janséniste : « On dit que M. l’archevêque de Cambrai va se mettre à traiter le dogme sur l’affaire du jansénisme. Ce prélat aura peine à se tenir dans de justes bornes : il s’est barbouillé des opinions moliniennes et, s’il suit leurs idées, il se rendra digne de la censure des plus habiles théologiens. » Correspondance de Quesnel, t. ii, p. 303.
En fait, en 1710, Fénelon écrivit deux lettres à Quesnel, « chef de parti », pour répondre aux écrivains sans nom de son école, dont il est responsable. La première lettre demande au Père ce qu’il pense devant Dieu de l'écrit intitulé : Denuntialio bullic Clémentines quæ incipit : Vineam Domini. :., facta universiv Ecclesiæ catholicæ, dont le titre seul est un blasphème contre l’autorité de l'Église et du Saint-Siège et contre Clément XI, qu’il accuse d’avoir ressuscité le pélagianisme et détruit la grâce de Jésus-Christ par sa bulle du 15 juillet 1705. D’après le dénonciateur, la bulle renverse la grâce par laquelle nous sommes chrétiens, expose l'Église au scandale de ses ennemis, augmente et irrite de nouveau les dissensions, qualifie d’hérétique, sous le nom de jansénisme, la doctrine qui est le premier principe et le fondement le plus assuré de la piété chrétienne, de l’humilité, de la reconnaissance de l’espérance cf de la charité. Bref, la bulle est un monumeni de ténèbres, tandis que le livre de Jansénius est a un livre divin et tout d’or », manifestement conforme à la doctrine de saint Augustin. L’auteur du libelle est un ancien doyen de la collégiale de Malines, nommé de Witte, qui, dit-il, i trouvant l’enseignement de son pays infecté de pélagianisme, est allé chercher en Hollande l’asile de la foi catholique ». Fénelon, après avoir souligné le scandale de cette dénonciation en citant de nombreux passages, montre à Quesnel que cet excès révoltant est la conséquence logique des principes qu’il a lui-même posés et que ses partisans, s’ils sont sincères, doivent logiquement aboutir aux mêmes conclusions que le dénonciateur, sans s’amuser à la vaine distinction du
fait et du droit. « Il faut que la grâce de Jansénius soit hérétique si la bulle n’est pas pélagienne, ou que la bulle soit pélagienne, si la grâce de Jansénius n’est pas hérétique et opposée à celle de saint Augustin. » Œuvres, t. xiii, p. 267-368.
La seconde lettre de Fénelon (ibid., p. 369-445) se rapporte à la Relation du cardinal Rospigliosi sur la paix de Clément IX. Dans la Lettre à M. l’archevêque de lUunbrai.au sujet de sa Réponse à la seconde lettre de M. l'évêque de Saint-Pons, 1709, l’auteur pour légitimer le silence respectueux, avait invoqué la Relation du cardinal Rospitjliosi, dans laquelle on raconte les pourparlers qui avaient abouti a la paix de Clément IX. Contre cette affirmation, Fénelon montre à Quesnel que cette Relation condamne formellement et ouvertement le silence respectueux et que l’on a tronqué les textes du cardinal. Pour légitimer le silence, on ne peut prétendre que l'Église, infaillible pour ce qui regarde le texte sacré, est faillible pour l’intelligence des textes doctrinaux qu’elle condamne comme hérétiques ou qu’elle propose à la foi comme catholiques et fondés sur l’autorité divine. L'Église ne peut prononcer que sur des textes ; elle ne saurait prononcer « sur des sens en l’air et détachés de toute expression qui les fixe et qui les transmette ».
A cette mise en demeure, qui le regarde comme le chef du parti et l’auteur responsable des attaques contre Home, Quesnel réplique par une Réponse aux deux lettres de M. l’archevêque de Cambrai au P. Quesnel, 1711, in-12. Il se défend d’avoir des disciples : « Je n’ai ni école, ni disciples. Je ne suis chef d’aucun parti ; je n’en ai aucun ; j’ai eu horreur tout parti ; ma loi, c’est l'Évangile ; les évêques sont mes pères, et le souverain pontife est le premier de tous. » Après cette profession de foi, Quesnel attaque la conduite de Fénelon dans l’affaire du livre des Maximes des saints ; il accuse les jésuites d'être des idolâtres, des corrupteurs de la morale et des négateurs de la vraie grâce de Jésus-Christ. Il soutient que le système des deux délectations auquel Fénelon attribue le point de. départ du jansénisme n’est en réalité que le système des thomistes, tel qu’ils l’ont exposé dans les congrégations De auxiliis. La Relation du cardinal Respigliosi est abandonnée par Quesnel comme « une pièce apocryphe, une rapsodie mal conçue, un discours en l’air, dont la source est inconnue, remplie de raisonnements pitoyables, de conséquences arbitraires, de dist incl ions Innées, d’explications incompréhensibles, de longues et ennuyeuses digressions et de tout ce qui peut rendre méprisable un écrit de ce genre ». P. 91.
D’après plusieurs lettres, écrites en 17Il et 1712, il semble bien que Fénelon se proposait de réfuter la Réponse de Quesnel : mais il en fut détourné par diverses considérations, en particulier, pour éviter de mettre en cause le cardinal de Noailles, avec lequel le P. Quesnel aurait voulu le brouiller définitivement.
XIV. Les attaques contre le livre des Réflexions MORALES ». A mesure que les éditions des Réflexions morales se succèdent, les attaques de multiplient. La fuite du P. Quesnel dans les Pays-Bas et surtout son incarcération dans les prisons de l’arche vêque de Malines attirent l’attention sur Quesnel et sur son livre.
Déjà, en 1694, le docteur l’romageau avait signalé près de deux cents propositions comme censurables et il publia un Extrait critique pour en souligner le sens tout janséniste. Cependant, Noailles, par son mandement du 25 juin 1005. en recommandait la lecture aux curés du diocèse de Châlons : On trouve ramasse dans ce livre tout ce que les saints Pères ont écrit de plus beau et de plus louchant sur le Nouveau Testament et on en a l’ail un extrait plein d’onction et de lumière. Les plus sublimes vérités de la religion y