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RÉSERVE. CAS RÉSERVÉS, ÉNUMÉRATION

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pouvoir ordinaire d’accorder la juridiction pour entendre les confessions ou celui de porter des censures, peuvent aussi, sauf disposition contraire du droit, se réserver à eux-mêmes le jugement de certains cas ». Can. 893. Il s’ensuit que le souverain pontife a pouvoir de réserver des péchés pour l'Église universelle ; nous verrons qu’il n’use de ce droit que d’une façon très discrète. Au dessous du pape, les Ordinaires, au sens le plus large du mot, cf. can. 198, jouissent du même pouvoir mais seulement dans le ressort de leurs juridictions respectives ; le vicaire capitulaire. ainsi que le vicaire général non muni d’un mandat spécial, sont cependant formellement exceptés.

Quant aux Ordinaires religieux, le canon 89(> précise (à rencontre de l’ancienne discipline et de la doctrine communément admise avant le Code), que, dans une religion cléricale exempte, seul le supérieur général, et, dans les monastères indépendants (sui juris), l’abbé seul peuvent, de l’avis de leur conseil, réserver les péchés de ceux qui sont leurs sujets. Encore est-il que l’efficacité de cette réserve est limitée par les dispositions des canons 518 et 519 : le droit actuel oblige chaque maison cléricale exempte à posséder plusieurs confesseurs munis du pouvoir d’absoudre des péchés réservés dans la religion ; de plus, tout confesseur approuvé par l’Ordinaire peut, sans pouvoirs spéciaux, absoudre tout religieux qui s’adresse à lui, même des péchés ou censures réservés dans l’institut auquel appartient ce religieux.

Aux Ordinaires des lieux, comme aux supérieurs religieux, le Code donne des règles de sagesse et de discrétion quant à la réserve des péchés. Il va de soi que cette réserve devra toujours avoir caractère impersonnel, ne limitant pas les pouvoirs de tel ou tel individu, sinon elle serait odieuse. De plus, les Ordinaires ne l'établiront qu’après avoir discuté la question en synode ; s’ils prennent cette mesure hors synode, ils prendront l’avis du chapitre et de quelques prêtres des plus prudents et des plus appréciés parmi ceux qui ont charge d'âmes. Cette consultation faite, ils ne porteront la réserve que si elle apparaît comme nécessaire ou utile. Can. 895-896,

3. Péchés réservés au Saint-Siège.

a) D’après le droit général, un seul péché est, pour lui-même et indépendamment de la censure qui y est annexée, réservé au Souverain Pontife : c’est la dénonciation mensongère par laquelle on accuse, auprès des juges ecclésiastiques, du crime de sollicitation ad turpia, un prêtre innocent. Can. 891.

Cette discipline ayant été maintenue sans modification depuis son instauration par Benoît XIV (1 er juin 1741), c’est à la constitution de ce pape qu’il faudra se reporter pour interpréter le droit actuel. D’après ce document (Sacramentum pssnitentise), il n’rsl pas nécessaire, pour que la réserve soit encourue. que l’accusation soit portée par le dénonciateur luimême devant les juges ecclésiastiques ; le texte vise également ceux qui dénoncent par intermédiaire : vel scelestr procurando ut ab aliis (denunciatio) fiât..Mais cette dénonciation elle-même devra revêtir certaines formes : elle devra être laite à un juge ecclésiastique qualifié pour mener une enquête de ce genre et dans une l’orme qui puisse servir de base à une action judiciaire. En l’espèce, sont qualifiés pour recevoir une telle dénonciation : le Saint-Office, l’Ordinaire du lieu ou son d'.ltgu ; (chanceliii vicaire forain, cuii disign : à cette fin ; ceux-ci doivent sur-le-champ consigner par écrit la dénonciation, si elle est faite de vive voix, et la transmettre à l’Ordinaire, can. 1936). Cf. Inslr. S. OJlcii, 20 lévrier 1866, '2<> juillet 189(1, (lasparri. Fontes fur. can., t. iv, n. 990, 1123. Il n’y aurait donc pas de réserve, si l’affaire étail portée devant des laïcs OU devant un piètre non délégué par l’Ordinaire. OU

même devant l’Ordinaire par lettre anonyme ou à titre de simple relation privée. En aucune circonstance cette dénonciation ne saurait être considérée comme une accusation (au sens juridique du mot) ou action criminelle ; celle-ci ne saurait être admise de la part de personnes privées : le droit la réserve au seul promoteur de la justice. Can. 1934. Mais la dénonciation pourra servir de prétexte à une enquête, d’où pourra sortir une accusation criminelle soulevée par le ministère public.

Péché réservé ralione sui, la fausse dénonciation est en outre frappée ipso facto d’une excommunication spécialement réservée au Saint-Siège. Can. 23(13. Cette dernière sanction est une nouveauté ajoutée par le droit du Code. A noter que l’ignorance, assez facilement concevable, de cette censure, en excuserait conformément aux règles du canon 2229, mais cette ignorance ne supprimerait nullement la réserve du péché. D’autre part, la censure une fois encourue, sa réserve ne cesserait pas dans les cas où, aux termes du canon 900, cesse la réserve du péché. Commission d’interprétation, 10 novembre 1925, Acla a p. Sedis, t. xvii, p. 583.

b) Outre cette réserve de droit général, une seconde réserve de caractère tout spécial et qui intéresse surtout la France, a été portée le 16 novembre 1928 par la S. Pénitencerie, sur l’ordre exprès du souverain pontife, qui a approuvé et confirmé l’acte. Cette réservation vise à briser l’acoutumace de certains confesseurs qui, au mépris des instructions et déclarations du Saint-Siège, continuent à absoudre les adhérents obstinés et impénitents de l’Action française. Voici le texte de cet important document qui fait date dans l’histoire de la réserve par les dispositions singulières qu’il contient.

Etsi serio dubitari nequeat, post iteratas Sacra ; Pa-ni" tentiariæ apostolicæ resolutiones et declarationcs circa damnatam in Gall a factionem vulgo l’Action Française, qnin mortaliter peccent confessarii sacramentalem absolutionem impertientes hu.jus factionis sociis aut quomodocuruque eidemactu adhærentibus, nisi antea cam, ex animo penitus repudiaverint ; non desunt tamen ibidem sacerdotes qui, uti ex certis fontibus constat, propria ; conscient ia> fucum facientes, tam gravi facinore sese fœdare non vereantur.

Ad horum, ne pereant, pervicaciam [rangendam, cuin liortamenta, monita, mina ? niliil profeccrint, hancta Sedes, ecclesiastica' disciplina 1 custos et vindex, ad remédia graviora manus apponere, a-gre quidem sed necessario compellitur.

Quare de expresso Ssmi Domini Nostri mandata coque adprobante et confirmante. Sacra Psenitentiarla statirit ac decemit peccatum confessariorum sacramentaliter absolventium quos quomodocumque noverint factioni « L’Action française » actu adhérentes quique ab ipsis. uti tenentur, nioniti, ab ea se retrahere renuant, Sanctse apostolica : Scdi reservari.

Hujus réservations ea vis est ut in illis quoque casibus, in quitus jùxta canonicas dispositions quævis reservatio cessât, omis adluic remaneat pra’dictis sacerdotibus ad S. Pœnitentiariam recurrendi, sub pœna exconinninicationis specialiter Sanctse Sedi réservât », intra mensem a die obtentse sacramentalis absolutionis, vel postquam convaluerint si a’groti, et standi ejus mandatis..le. a u.p..S<<h, 1928, t. xx, p. 398-399.

Le document se termine par une recommandation pressante, adressée aux Ordinaires et supérieurs religieux, de porter aussitôt ce décret à la connaissance de leurs prêtres, afin qu’ils ne puissent alléguer de leur ignorance.

faisons simplement les remarques suivantes : a. Le péché ici visé, et la réserve dont il est frappé, n’est lias le péché des partisans de l’Action française, mais le péché des confesseurs qui coopèrent formelle ment à leur révolte <n les absolvant indûment. — b. Pour que cette coopération existe, il faut que le confesseur sache