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RELIGION

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thèse liistorique) : « Eu face de la religion grecque, telle qu’elle apparaît au premier siècle de notre ère, le christianisme reste pour nous quelque chose de spécifique. Des deux principes caractéristiques du christianisme paulinien : valeur expiatoire de la passion du Christ, justification par la foi, c’est en vain qu’on chercherait l'équivalent dans le monde hellénique. Le christianisme a bénéficié de toute l'évolution religieuse des trois derniers siècles antérieurs à l'ère chrétienne, sans être le résultat de cette évolution. » P. 515-517. D’ailleurs voilà déjà quelque temps qu’en Allemagne, d’où nous viennent presque toutes les explications rationalistes du christianisme, on renonce à commenter le Nouveau Testament par un recours constant aux religions de mystères et au syncrétisme de l'époque hellénistique : l'école de l’histoire des religions a cédé le pas à celle de la Form-Geschichte, ou étude des formes de la tradition évangélique, qui, malgré ses négations arbitraires en ce qui concerne l’historicité des évangiles, a du moins le mérite de respecter la vivante originalité du christianisme naissant.

Le judaïsme posl-biblique.

« Il reste le dépositaire de précieuses valeurs spirituelles. Il est animé

d’une foi ardente au Dieu unique, qui même après sa scission d’avec le christianisme, a eu ses martyrs. Le récit du supplice d’Aquiba (en 135) est une des plus belles pages des littératures sacrées de tous les temps : « Lorsqu’on fit sortir Aquiba de prison pour le mener à la mort, c'était l’heure de la prière du Chema. On brossa sa chair avec des brosses de fer, et il priait, prenant sur lui le joug du royaume des cieux avec amour. Et ses élèves lui dirent : « Assez, Rabbi, assez ! » Et il leur dit : « Chaque jour je me désolais sur le passage : « Tu aimeras l'Éternel, ton Dieu, de toute ton àme » (le passage fait partie de la prière quotidienne du Chema) et je me disais : « Quand viendra ce moment ? » Et maintenant qu’il est venu, je n’accomplirais pas ce que je souhaitais ? » Et comme il disait : « L'Éternel est un » il allongea ce mot : « Un », jusqu'à ce que sortît son âme. Alors une voix du ciel se fit entendre disant : « Bienheureux es-tu, Rabbi Aquiba, dont l'àme est sortie en. criant mon unité, car tu es destiné à la vie éternelle ! » Mischni, traité Beraknth, Gl. Il serait donc injuste de faire du judaïsme une religion de pure crainte. « Plus grand est celui qui agit par amour que celui qui agit par crainte », disait Siméon ben-Eléazar. Traité Solah, 3. Très ferme aussi est restée la foi d’Israël dans la vie future et ses rétributions, et si la tendance se manifeste, en certains milieux juifs de nos jours, à ne plus croire qu'à une immortalité de l'àme fondée sur la philosophie, l’immense majorité des juifs s’attache encore aux données bibliques sur l’au-d 'là, y compris l’annonce de la résurrection.

La morale juive a cette force unique que l’impératif de la conscience puise dans la croyance religieuse ; elle Favorise singulièrement la vie familiale, impose des œuvres de charité et de miséricorde et invite ses tenants à être, dans leurs pays respectifs, de loyaux patriotes. Le culte d’Israël, particulièrement le rituel de la Pâque, est empreint d’une austère beauté.

Mais le souci trop exclusif de la jurisprudence et de la casuistique avait exercé sur le judaïsme une Influence desséchante dès le temps de Notre-Seigneur, tandis que l’impatience du joug romain exaspérait ses tendances nationalistes. Le judaïsme a m ilheureusement continué dans cette voie. « En dépit des prières officielles, personne n’attend plus le Messie Sauveur. C’est Israël lui-même qui sera son propre Messie et le rédempteur du monde. L’attachement à la loi diminue, et la Torah est abrogée en des prescriptions que l’on affirmait perpétuelles [le rituel des sacrifices]. Lentement mais sûrement, l'élément surnaturel diminue, la révélation se voit minimisée et rationalisée. Le |

judaïsme devient la simple expression d’un monothéisme qui observe la loi naturelle et, à part les obligations ethniques qui maintiennent le lien national, on ne voit plus trop ce qui sépare le juif fidèle d’un simple théiste quelconque. Par contre, le nationalisme est plus âpre que jamais, et dans ses prières comme dans ses publications, il aflirme très haut qu’Israël est le peuple élu et que c’est par lui que viendront dans le monde les temps messianiques de vérité, de justice et de paix. »

S’il en est ainsi c’est que le « christianisme constitue l'épanouissement normal de la révélation de l’Ancien Testament commun aux deux religions, tandis que le judaïsme n’en est qu’une déviation nationaliste qui va se minimisant de plus en plus ». E. Magnin, Correspondant du 10 juin 1933, compte rendu de H. Vincent, Le judaïsme, Paris, 1933, dont plusieurs passages sont cités textuellement.

I. Études d’ensemble. — Abbé de Broglie, Problèmes et conclusions de l’Iiistoire des religions, Paris, 1885, œuvre d’un précurseur ; Religion et critique, œuvre posthume recueillie par l’abbé C. Piat, Paris, 1906 ; G. Foucart, Histoire des religions et méthode comparative, Paris, 1912 ; René Dussaud, Introduction à l’histoire des religions, Paris, 1914 ; A. Loisy, La religion, Paris, 1917 ; H. Pinard de La Boullaye, S..1., L'étude comparée des religions, Paris, 1929, deux volumes, et Tables alphabétiques à part (3e édit.) ; c’est l’ouvrage fondamental ; G. Michelet, article Religion, dans Dictionnaire apologétique, t. IV, 1922 ; Baron Descamps, Le Génie des religions, 2e édit., Paris, 1930 ; Gaston Rabeau, professeur aux facultés catholiques de Lille, Apologétique, Paris, 1930 ; Dieu, Paris, 1933, les deux dans la Bibliothèque catholique des sciences religieuses ; du même. Introduction à l'étude de la théologie, Paris, 1931.

IL Ethnologie. — 1° En général. —.1. Bricout, Où en est l’histoire des religions ? 2 vol., Paris, 1911-1912 (en collaboration), t. i : Introduction, par J, Bricout, La religion des primitifs, par A. Bros ; J. Huby, Christus. Manuel d’histoire des religions (en collaboration), 2e édit., 1916, c. i. L'élude des religions, par le P. Léonce de Grandmaison, S..T. ; Pietro Tacchi Venturi, Storia délie Religioni (en collaboration), 1. 1, Turin, 1934, c. i. I.'indagine religiosa nella sua storia et nci suoi metodi. (La recherche religieuse : son histoire, ses méthodes), par Giuseppe Messina, S. J. ; P. W. Schmidt, Origine et évolution de la religion, trad. de l’allemand, Paris, 1931, dans la collection La oie chrétienne ; D r J. Montaadon, prof, à l'école d’anthropologie de Paris, La race et les races, Paris, 1933 ; du même, Traité d’ethnologie naturelle, Paris, 1934 ; Semaines d’ethnologie religieuse. Comptes rendus analytiques : l re session, Louvain, 1912, Paris, 1913 ; 2e session, Louvain, 1913, Paris, 1914 ; 3e session, Tilbourg, 1922, Enghien (Belgique i, 1923 ; 4' session. Milan, 1925, Paris, 1926 ; 5° session : Luxembourg, 1929, Paris. 1931 ; A. Bros, L’ethnologie religieuse, Paris, 19215, nouv. édit. en 1937.

2° Critique de l'évolutionnisme linéaire. — H. Pinard de La Boullave, L'élude comparée des religions, t. i, : î c édit., 1929, p. 419-442, t. iii, même édit., p. 196-241 ; Robert Lowie, professeur à l’Université de Californie, Traité de sociologie primitive, édit. française revue et complétée par l’auteur, Paris, 1935, introduction, conclusion et ensemble de l’ouvrage.

î" Lu méthode cyclo-culturelle. — IL Pinard, ibid. et surtout t. ii, c. vi, (Mi entier, p. 243-304 ; Er. Grabner, professeur à 15 nui. Méthode der Ethnologie, Ileidelberg, 1911 ;

P.-W. Schmidt, L’anthropologie moderne, en français et en allemand, dans la revue Anthropos, 1906, t. i, tirage à part, Salzbourg et Vienne, 1906, également en français el en allemand ; do même. Voies nouvelles en science comparée des religions et en sociologie comparée, extrait de la Revue des sciences philosophiques et théologiques, 1911, p. 46-74 (Kain, Belgique). Voir même revue. 1913, p. 218-243, sur la Méthode historico-cullurcllc.

1° Animisme. - Er. Bouvier, S. J., Animisme, préani misme, religion, dans Recherches de science religieuse, t. ii, 1911, p. SI sq. ; < ;. Marsot, art. Animisme, dans Dictionnaire de Sociologie, 1933 ; voir dans ce même dictionnaire Animaux i culte des l,

.">" Sur lu magie. - Er. Bouvier, articles dans Recherches de science religieuse, 1913, p. 100 sq., p. 393 sq. ; Raoul Allier, Magie et religion, Paris, 1935.