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RELATIONS DIVINES. DONNÉES DOGMATIQUES


de relation, qui ne divisent pas la substance dans celui qui engendre et dans celui qui est engendré, mais signifient une seule et même nature, de telle sorte que, l’un nommé, l’autre est évoqué aussitôt. » P. L., t. lxv, col. 205. Cf. Ad Ferrandum, col. 399.

Il faut encore citer Boèce : « C’est dans la prédication de la relation en Dieu que se réalise la pluralité de la trinité ; mais l’unité est conservée en tout ce qui est commun, substance, opération ou tout attribut absolu (secundum se). Ainsi donc, la substance contient l’unité, la relation multiplie la trinité. » De unitate Trinilalis, c. vi, P. L., t. lxiv, col. 1254.

Une formule brève et saisissante du dogme sera fournie par saint Isidore de Séville : « Dans la relation des personnes, la Trinité ; dans la substance de la nature, un seul Dieu, qui est le Père, le Fils et le Saint-Esprit. » Difjerentiæ, t. II, difꝟ. 2, P. L., t. lxxxiii, col. 71.

On pourrait invoquer encore l’autorité d’Alcuin, De fide sanctissimæ Trinilalis, t. I, c. iii, v, P. L., t. ci, col. 16, 17 ; de saint Anselme, dans son livre De fuie Trinilalis et son traité De processione Spiritus sancti contra Grsecos, P. L., t. clviii, col. 259 sq. ; 285 sq. ; et de saint Bernard, Episl., exc, c. iii, P. L., t. clxxxii, col. 10.(8. Mais nous avons déjà dépassé l'époque où l'Église, recueillant l’enseignement traditionnel qui lui vient de la révélation par le canal des Pères, a proposé le dogme des relations divines.

Les conciles.

1. Le XIe concile de Tolède. Ce

synode, tenu le 7 novembre 675, a été déclaré » authentique » par Innocent III, dans sa lettre à Pierre de Compostelle. P. L., t. ccxiv, col. 682. Sans lui attribuer une autorité comparable au concile de Carthage de 416 contre les pélagiens, ou au IIe concile d’Orange contre les semipélagiens, il convient cependant de s’y référer, parce qu’il exprime la foi de l'Église universelle. Or, il présente la doctrine de la relation comme un élément de la croyance au mystère de la Trinité : « C’est dans les noms relatifs des personnes que le Père est rapporté au Fils, le Fils au Père, le Saint-Esprit à l’un et à l’autre ; les trois personnes ne sont dites que relativement l’une à l’autre, mais on ne croit qu'à une seule nature ou substance… C’est dans la relation que se discerne le nombre des personnes ; dans la substance même de la divinité ne peut être conçu le nombre en Dieu. Le nombre ne peut exister que dans les relations des personnes les unes aux autres ; et le nombre disparaît dans la considération de ce qu’elles sont en soi. » Denz.-Bannw., n. 278, 280 ; Cavallera, Thésaurus, n. 577, 579. On retrouve des échos de cette doctrine dans la protestation du XVe concile de Tolède, Denz.-Bannw., n. 294 ; et dans la profession de foi du XVIe concile, id., n. 296 ; Cav., n. 583, 584.

2. Le IVe concile du Latran (1215). — Joachim de Flore, voir t. viii, col. 1432, en exposant contre Pierre Lombard ses idées sur la Trinité, admettait en Dieu une sorte de quaternité. Il concédait que le Père, le Fils et le Saint-Esprit sont une essence, une substance, une nature, mais il ne considérait pas cette unité comme vraie et proprement dite ; pour lui, c’est une unité simplement collective et de ressemblance (collecliva et similitudinaria), compromettant par là L’unité divine. Sans doute, la doctrine de la relation n’est pas nommément en cause dans l’erreur de l’abbé Joachim. Cependant, au fond, c’est la question des relations divines qui est à la base de la controverse. C’est parce que Joachim de Flore cherche ailleurs que dans la relation, c’est-à-dire dans quelque chose d’absolu, la raison de la distinction des personnes, qu’il en arrive à concevoir une sorte de quaternité en Dieu.

Le concile rappelle les principes traditionnels, tout en apportant une précision qui appuiera la conception

de la relation subsistante, à savoir l’identité des personnes, quant à leur perfection, avec l’essence ou la substance divine ; leur distinction entre elles, en raison de leurs rapports d’origine : « Chacune des trois personnes est cette chose, c’est-à-dire la substance, l’essence ou nature divine, qui seule est le principe de toutes choses, principe en dehors duquel il est impossible d’en trouver un autre ; mais cette chose n’est ni engendrant, ni engendrée, ni procédant ; c’est le Père qui engendre, le Fils qui est engendré, le Saint-Esprit qui procède, de telle sorte que les distinctions sont dans les personnes et l’unité dans la nature. » Denz.Bannw., n. 432 ; Cav., n. 601.

3. Le concile de Florence.

C’est dans le Décret pour les jacobites que fut promulguée authentiquement la doctrine catholique sur les relations divines. Après la confession de l’unité de Dieu et de la trinité des personnes, réellement distinctes l’une de l’autre, le Fils engendré par le Père, le Saint-Esprit procédant du Père et en même temps du Fils, le concile conclut : « Ces trois personnes sont un seul Dieu, et non trois dieux : parce que les trois personnes ont la même substance, la même essence, la même nature, la même divinité, la même immensité, la même éternité : tout en Dieu est un, là où ne se rencontre pas l’opposition de la relation. » Denz.-Bannw., n. 703 ; Cav., n. 603.

La célèbre formule : Omnia sunt unum, ubi non obviai relationis oppositio est empruntée à saint Anselme, qui avait écrit, dans son De processione Spirilus sancti, c. n : Nec unitas amiltal aliquando suam consequentiam ubi non obviai aliqua relationis oppositio. P. L., t. clviii, col. 288 C.

Au concile de Florence, l’accord des Grecs et des Latins sur ce point avait été complet. Le théologien latin Jean (de Baguse) l’atteste expressément : Est vero secundum doclores lam græcos quam latinos sola relalio quæ mulliplicat personas in divinis produclionibus, quæ vocatur relatio originis, ad quam duo tantum speclanl : a quo alius et qui ab alio. Du côté des Grecs, Bessarion affirme le même point de vue : Quod personalia nomina Trinilalis relativa sunt, nullus ignorai. Hardouin, Concil., t. ix, p. 203, 339. Aujourd’hui encore, l’axiome de la théologie latine, inséré dans le Décret pour les jacobites, est accepté par la théologie grecque, qui l’accommode cependant à sa conception particulière de la procession de l’Esprit-Saint : In divinis nihil est absolulum, quod omnibus personis non compelat ; et nihil relalivum quod uni et son non compelal. Cf. M. Jugie, Theologia dogmalica christianorum orienlalium, t. ii, p. 230.

4° Conclusion : noie théologique de ce fondement dogmatique. — Bien que l’assertion du concile de Florence ne constitue pas une définition proprement dite, cependant la plupart des théologiens sont d’accord pour reconnaître que l’existence de relations réelles en Dieu est article de foi. A défaut en effet d’une définition proprement dite, l’assertion du magistère ordinaire, s’exprimanl dans la déclaration de Florence, suffit à manifester cette vérité comme révélée de Dieu et authentiquement proposée par l'Église à la foi des fidèles.

Dans son Commentaire sur les Sentences, saint Thomas déclarait « certain près de tous les catholiques » qu’il y a des relations en Dieu. In lum Sent., dist. XXVI, q. ii, a. 1. Mais dans le De potentia, q. viii, a. 1, il affirme que c’est là un enseignement de la foi catholique. C’est la note que nous trouvons chez beaucoup de sententiaires, In Ium Sent., dist. XXVI ou XXXIII, et, parmi les modernes, chez Billot, De Deo Irino, th. vi ; Galtier, De SS. Trinitate in se et in nobis, p. 185 ; Diekamp, Theologiæ dogmalicæ manuale, t. i, p. 379 ; Hugon, Tractalus dogmatici, 1. 1, p. 357 ; Hervé, Manuale, t. ii, n. 190 ; Ch. Pcsch, Compendium Iheol.