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    1. REFORME##


REFORME. DOCTRINES, L’EUCHARISTIE

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contre les anabaptistes que les enfants eux-mêmes ne sont purifiés dans le baptême que par la foi. C’est « de l’arrogance et de la témérité, selon lui, que d’affirmer que la foi ne peut convenir à cet âge ».

Si du baptême, Calvin passe à la confirmation, c’est pour refuser à ce rite tout caractère sacramentel. « Où donc, s’écrie-t-il, est la parole de Dieu qui promet ici la présence de Dieu ? Ils ne peuvent pas en montrer un iota. Comment peuvent-ils démontrer que leur chrême est le véhicule du Saint-Esprit ? Nous n’y voyons que de l’huile, liqueur épaisse et grasse, rien de plus… Si la confirmation vient des hommes, elle n’est que frivolité et vanité, s’ils veulent nous persuader qu’elle vient du ciel, qu’ils le prouvent ! »

L’imposition des mains pratiquée par les apôtres avait surtout pour but de conférer le pouvoir de faire des miracles, comme cela était nécessaire en ces débuts de l’Église. Mais l’imposition des mains n’avait rien à voir avec l’huile de la confirmation. « Pour moi, conclut Calvin, je prononce hardiment, non en mon nom, mais au nom du Seigneur, que ceux qui appellent l’huile une huile de salut abjurent le salut qui est dans le Christ, renient le Christ et n’ont aucune part au royaume de Dieu. » Laissons de côté les « engraisseurs ». C’est de ce sobriquet que Calvin affuble les évêques catholiques. Tout ce qu’il souhaite, à la place du faux sacrement de confirmation, ce serait une cérémonie dans laquelle les enfants de dix ans viendraient confesser leur foi en présence de l’Église, où ils seraient interrogés sur chaque chapitre du catéchisme et devraient répondre aux questions posées. Ce serait le meilleur moyen de guérir l’ignorance religieuse dans le peuple.

La théorie sacramentaire anglicane.

L’art. 25

de la confession anglicane est ainsi conçu : « Les sacrements institués par le Christ ne sont pas seulement des marques et des signes du chrétien, mais ils sont plutôt des témoins sûrs et certains et des signes efficaces de la grâce et de la bienveillance de Dieu envers nous, par lesquels il opère visiblement en nous et ne fait pas seulement naître mais aussi fortifie et confirme notre foi en lui. »

On retrouve une fois de plus dans ce texte ce mélange de doctrines qui caractérise les formules de transaction et de « juste milieu » qu’avaient voulu être les 3 !) Articles. L’expression « signe efficace de la grâce » est nettement catholique. Les mots « témoins sûrs et certains » sont du vocabulaire calviniste. Seul Zwingli est nettement réfuté. De même la confession anglicane veut que les sacrements « fortifient et confirment notre foi », ce qui est calviniste, mais peut aussi s’entendre au sens catholique. Mais elle prononce une énormité en disant que les sacrements « ne font pas seulement naître la foi », ce qui implique qu’ils la font aussi naître, en sorte que l’on peut présenter les sacrements à ceux qui n’auraient pas encore la foi, dans le but de la faire naître chez eux !

L’article continue : « Il y a deux sacrements institués par Notre-Seigneur Jésus-Christ dans l’Évangile, c’est-à-dire le baptême et la cène du Seigneur. Quant aux cinq autres appelés communément sacrements c’est-à-dire la confirmation, la pénitence, l’ordre, le mariage et l’extrême-onction, ils ne doivent pas être mis au rang des sacrements de l’Évangile. Les uns sont sortis d’une fausse imitation des apôtres, les autres sont des états de vie autorisés par les Écritures. Toutefois, ils n’ont pas la même nature de sacrements que le baptême et la cène, parce qu’ils n’ont pas de signe visible ni de rite institué par Dieu. »

Ici encore, on aperçoit une intention de ménagement pour les traditions. Calvin parlait un tout autre langage. Il ne serait pas opposé à la lettre de ce texte de distinguer deux sacrements majeurs et cinq sacre

ments mineurs comme l’ont fait, dans la suite, certains théologiens anglicans.

L’art. 26 précisait, contre l’antique donatisme, que l’indignité du ministre n’empêche pas l’efficacité du sacrement, ce qui, en territoire anglais, visait surtout les traditions du lollardisme, bien affaiblies du reste et noyées dans un foisonnement de sectes plus récentes issues du protestantisme.

L’art. 27 traitait du baptême. On y remarquera encore des restes de doctrine catholique : « Le baptême n’est pas seulement un symbole, une marque distinctive par laquelle les chrétiens se distinguent des autres hommes qui ne sont pas baptisés, mais c’est aussi un signe de régénération et de vie nouvelle. Par là, ceux qui le reçoivent sont greffés, comme à l’aide d’un instrument, sur l’Église ; les promesses de pardon du péché et de notre adoption comme fils de Dieu, par l’intermédiaire du Saint-Esprit, sont signées et scellées d’une manière visible. La foi est confirmée et la grâce augmentée par la vertu de la prière. Le baptême des enfants doit être, de toutes façons, conservé dans l’Église, comme très conforme à l’institution du Christ. »

V, DE l’eucharistie. — 1° Doctrine de la cène chez Luther. — Si nous avons rencontré, soit à propos du péché originel, soit à propos des sacrements en général, de graves divergences parmi les protagonistes de la soi-disant Réforme, nous arrivons, en abordant l’eucharistie, à un point de friction particulièrement violent. Autour de ces quatre mots : Hoc est corpus meum, les chefs du protestantisme se battirent entre eux avec acharnement et finalement ne purent aboutir à aucune entente réelle.

C’est ce que soulignait déjà, en septembre 1527, le fougueux Osiander, dans une lettre à Zwingli, qui mérite d’être citée : « Voyons donc, s’écriait-il, combien vous variez : Karlstadt comprend ainsi : « Voici mon corps qui est livré pour vous ». — Toi ainsi : « Ceci signifie mon corps. » Œcolampade ainsi : « Ceci est la figure de mon corps. » Un autre, que tu reconnais pour un des tiens, ainsi : « Ceci que vous mangez, c’est, cela devient votre corps, lequel, grâce à votre foi, est déjà mon corps », (Théorie de Théobald Billikan). Un autre (Urbain Rhegius), qui m’a trahi, avec la dernière impudence, comme ayant passé à votre hérésie, ainsi : « Ceci, c’est-à-dire cette chose extérieure, est mon corps pour vos âmes, comme ce pain est pour vos corps. » Un autre (Conrad Sam), dont je n’ai pas retenu le nom, ainsi : « Ceci, c’est-à-dire le pain en général est mon corps, c’est-à-dire qu’il se soutient, qu’il a grandi et s’est augmenté grâce au pain, tout comme il écrit : « Tu es poussière et tu retourneras en poussière, » au sujet de l’homme. » Voir cette lettre très étendue d’Osiander dans C. R., Opéra Zuinglii, t. ix, p. 232-276, le passage cité ici est à la page 243.

Luther, lui, était beaucoup plus rapproché de l’opinion traditionnelle, sur le fait de la présence réelle. Mais il en était très éloigné, quant à l’explication de cette présence. Il existe une quantité de travaux de Luther sur l’eucharistie. Au début, il n’écrivait que contre la doctrine catholique. Après 1523, il écrit surtout contre Zwingli.

Dans le Prélude de la captivité babylonienne (oct. 1520), il se plaint de trois choses : 1. on a retranché aux laïques l’usage du calice ; — 2. on a imposé comme un dogme l’opinion thomiste de la transsubstantiation ;

— 3. enfin on a fait de la messe un sacrifice. Pour lui, il prétend que l’usage de la communion sous les deux espèces est strictement obligatoire et il cherche à le prouver par les Écritures (à noter qu’il n’admet pas qu’il soit question de l’eucharistie au c. vi de saint Jean, mais seulement du pain de la foi). Sur le second point : la transsubstantiation, il se réfère aux théologiens nominalistes. Il rappelle les critiques de Pierre