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1935 RÉDEMPTION. CHEZ LES PÈRES : PREMIERS DÉVELOPPEMENTS 1936

quelles « réussir n’est pas sans profit », mais échouer est sans péril ».

Remis dans leur contexte, ces passages ne visent que la part faite à la spéculation, une fois la régula fidei préalablement mise in luto. La preuve en est qu’un peu plus haut, I, x, 1, col. 549, le même Irénée donnait comme l’un des articles de la foi universelle le fait que « le Fils de Dieu s’est incarné pour noire salut : Chez Grégoire, on lit pareillement. Or.. i., 28, P. G., t. xxxvi, col. 061, que, pour être sauvés, « nous avions besoin de l’incarnation et de la mort d’un Dieu ».

D’autres ont allégué, d’une manière non moins malencontreuse, un mot de saint Augustin, Cont. Faust., xxvi, 7, P. L., -t. xlii, col. 483, déclarant renoncer à dire, pour l’abandonner à Dieu, cur omnia Ma in carne ex utero feminæ assumpta poli Christus] voluerit. Ce qui réserve seulement le problème spéculatif de savoir pourquoi l’incarnation a eu lieu « dans une chair i en tout semblable à la nôtre, tandis qu’ailleurs les credenda de Christo, pour l'évèquc d’Hippone, comprennent expressément, De flde et oper., ix, 14, P. L., t. xl, col. 206, qux perpessus et quare.

Il suffirait, au demeurant, de se rappeler que tous les Pères ont lu et plusieurs commenté le symbole. Saint Ambroise atteste à quel point la portée dogmatique de ses formules était alors réalisée, quand il déclare, lu Luc., vi, 101, P. L., t. xv (édition de 1866), col. 1782 : 7p.se est enim Christus qui nalus est ex Virgine, … ipse qui mortuus est pro peccatis nostris et resurrexit a mortuis. Unum si relraxeris, retraxisli salulem tuam.

2. Assertions courantes.

Rien de plus facile, au contraire, que de se rendre compte avec quelle force et quelle netteté l'Église tenait la mort du Christ comme le moyen objectif de nous obtenir devant Dieu la grâce de la rédemption. Non pas que d’autres lins secondaires ne viennent également s’y ajouter, alors comme aujourd’hui, sur lesquelles il serait inutile de s'étendre ; mais, plus ou moins développée, celle-là se retrouve partout comme une constante qui apparaît dès l’origine et ne se dément jamais. Voir Le dogme de la rédemption. Essai d’i’tude historique, p. 1(11-278.

a) Il en est ainsi déjà chez ceux qu’on peut nommer les primitifs. « C’est à cause de l’amour qu’il avait pour nous, écrit saint Clément de Rome, I Cor., xlix, 6, que Jésus-Christ a donné son sang pour nous, suivant la volonté de Dieu, et sa chair pour notre ; chair et son âme pour nos âmes. » Saint Ignace aime à le représenter comme souillant la mort « à cause de nous » (Si' rJ.àcA, Polgc, iii, 2 ; Snu/rn., i, 2 ; Trait., ii, 2, et « de nos péchés » (urcèp twv àj^apTiôiv 7)u.côv). Smyrn., vii, 1. Ailleurs, Rom., vi, 1, il s’inspire visiblement de saint Paul, Rom., iv, 25, tandis que saint Polycarpe, Pliil-, viii, 1 et ix, 2, unit au même texte celui de saint Pierre, I Pctr., ii, 22-24. Il n’est pas besoin d’autres sondages pour mesurer le niveau moyen de la foi chrétienne dès le premier jour. Avec les Pères apologistes, qui s’adressent au monde païen, le Christ est surtout présenté comme le maître des intelligences et le vainqueur du démon. Mais saint Juslin ne laisse pas de connaître le rôle salutaire, Apol., i, 32, 50 ; Dial., 71, 134, 135, et, soit d’après le rituel lévitique, Dial, 40-41, 111, soit d’après le chapitre un d’Isaïe, Dial., 13, 89, ( »."), la valeur expiatoire de sa passion. Clément d’Alexandrie, qui, dans ses traités philosophiques, ne semblerait admettre qu’une rédemption de caractère intellectuel ou mystique, Prolr., 10-11 ; Pœd., i, 8 et ni, 12, n’ignore pas non plus que le Christ s’olTrit en « sacrifice pour nous », Strom., v, ii, P. (>.. t. ix. col. 108, et que sa mort « expia celle que nous devions pour nos péchés », Quis dives sain., 23, tbtd., col. 628. Cꝟ. 37 et 12, col. (il 1 et 649.

b) Reaucoup plus riche est, naturellement, la pensée des théologiens immédiatement postérieurs.

A notre déchéance saint Irénée oppose notre « récapitulation » dans ci par le Christ, en soulignant, avec Clément de Rome, le mystère de substitution qui préside à notre rachat, Cont. tuer., V, i, 1, P. G., t. vii, col. 1121, et plus souvent encore, d’après saint Paul, l’obéissance réparatrice du nouvel Adam, ibid., III, xviil, 5-7 et Y, xvi. 3, col. 935-938 et 1168, qui « nous a rendu l’amitié de Dieu en apaisant pour nous le Père contre qui nous avions péché ». V, xvii, 1, col. 1169. Cf. Y, xiv. 3, col. 1 162-1163 ; Dem. apost. præd., 31-42. Voir Irénée (Saint), t. vii, col. 2469-2179.

Origène applique tour à tour au Sauveur, en les entourant de longs commentaires, et la page d’Isaïe sur le serviteur souffrant, In Johan., xxviii, 14, P. G., t. xiv, col. 720-721 ; cf. In Lev., i, 3, P. G., t.xii, col. 408, et le texte de saint Jean sur « l’agneau immolé devenu, d’après des lois ineffables, la purification du monde entier », In Johan., vi, 35, P. G., t. xiv, col. 292, et ceux de saint Paul sur notre réconciliation avec Dieu par le sang du Christ, In Rom., ni, " 8 ; iv, 12 et v, 1, P. (i.. t. xiv, col. 946-951 et 1002-1005. Voir Origène, t. xi, col. 1542-1543.

En Occident, Tertullien emprunte à saint Paul le parallèle des deux Adam, Adv. jud., 13, et revendique énergiquement, à rencontre des docètes, la réalité de la chair du Fils de Dieu, qui lui permit de s’offrir en sacrifice pour nos péchés, ibid. 14 ; cf. Adv. gnost. scorp., 7 et Adv. Marc, ni, 18, de nous racheter, De fuga, 12, et de nous réconcilier avec Dieu au prix de son sang, Adv. Marc, v, 17, de substituer sa mort à celle des pécheurs. De pud., 22. Toutes assertions qui foisonnent en termes plus ou moins équivalents chez saint Cyprien. Voir^ld Fort., 3 et 5 ; Ad Demetr., 26 ; De bono pat., 6 ; De lapsis, 17 ; De opère et eleem., 1-2 ; Epist., lxiii, 4, 13, 14 et 17.

Il n’est pas jusqu'à l’uniformité de ces témoignages qui ne traduise l’identité d’une même foi sous la variété convergente de ses expressions.

Premiers développements.

Sur ces données

élémentaires la méditation des intelligences ne manquait d’ailleurs pas de s’exercer. Effort encore tout occasionnel et qui n’aboutit qu'à des vues fugitives, mais auquel la doctrine de l'Église est déjà redevable de précieux enrichissements.

1. Justification dogmatique.

En plus des innombrables citations partielles qui font valoir l’un ou l’autre des passages où s’exprime la parole de Dieu, on trouve dès ce moment quelques véritables démonstrations.

Que Jésus-Christ ait été une victime pour le péché et qu’il se soit offert pour la purification des pécheurs, toutes les Écritures l’attestent », écrit Origène. Pour le prouver, l’auteur de réunir les principaux témoignages de saint Paul, avec une conclusion qui en dégage la portée. In Rom., vi, 12, P. G., t. xiv, col. 1095. Cf. S. (.vrille d’Alexandrie, Derecla fidead reginas, P. G., t. i.xxvi, col. 1289-1297.

Un dossier beaucoup plus considérable, où figurent, avec paraphrase à l’appui, tous les textes, soit de l’Ancien, soif du Nouveau Testament, qu’exploitent encore aujourd’hui nos manuels, est constitué par saint Augustin au cours de la controverse pélagienne. Y’oir De pecc. meritis et remiss., i, xxvii, 40-xxviii, 56, P. L.. t. xi. iv, col. 131-141. Enquête dont il totalise ainsi le résultat, 56, col. 141 : Universa Ecclesia tenet, quæ adversus omnes pro/anas novilales vigilare débet, omnem hominem separari a Dco nisi qui per medialorem Christian reconciliatur Deo. née separari qucmqucim nisi peccatis interctudenlibus posse, non ergo reconciliuri nisi peccalorum remissione… per imam viclimam verissimi sacerdotis.