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REDEMPTION. DONNEES DU PAGANISME


théories d'école ou des thèses reçues : l’idée fondamentale impliquée dans ces termes appartient à la formule de la foi catholique pour exprimer l'œuvre de rédemption surnaturelle éminemment réalisée par le sacrifice de la croix.


II. GENÈSE DE LA FOI CATHOLIQUE. —

Plus l'Église se montre affirmative sur notre rédemption par la satisfaction et le mérite du Christ, plus il importe de vérifier les titres qui assurent à ce dogme une place légitime dans le dépôt de la révélation. —
I. Religions païennes. —
II. Message chrétien (col. 1926). —
III. Tradition patristique : « Perpétuité de la foi » (col. 1932). —
IV. Tradition patristique : Essais de construction doctrinale (col. 1938). - —
V. Théologie médiévale (col. 1942). —
VI. Organisation définitive : Dans l'Église catholique (col. 1947). —
VII. Organisation définitive : Dans les Églises protestantes (col. 1951).

I. Religions païennes. —

D’après J. de IVIaistre, la rédemption serait « une idée universelle ». Éclaircissement sur les sacrifices, à la suite des Soirées de Saint-Pétersbourg, Lyon, 1836, t. ii, p. 392, et il entendait par là, d’une manière toute spéciale, « la rédemption par le sang ». Ibid., p. 389. Principe qui, après l’esquisse du célèbre penseur, allait inspirer l’ouvrage de B.-J. Schmitt, Grundideen des Mylhus oder Spuren der gôlllichen gecfjenbarten Lehre von der Welterlôsung in Sagen und Urkunden der àlteslen VôUcer, Francfortsur-M’Mii, 1826, aussitôt traduit en français par R.-A. Henrion, Paris, 1827, dont la traduction est passée dans Aligne, Démonstrations évangéliques, t. xiii, col. 1081-1208, sous ce titre significatif : La Rédemption du genre humain annoncée par les traditions et les croyances religieuses, figurée par les sacrifices de tous les peuples.

Ces rapprochements, d’où le traditionalisme croyait pouvoir tirer une apologétique, sont aujourd’hui copieusement exploités par l'école dite religionsgeschichllich pour expliquer scientifiquement l’idée chrétienne de rédemption, en la ramenant au niveau des autres croyances religieuses dont elle serait une forme plus évoluée, sinon même un plagiat. Voir La foi en la rédemption et au médiateur dans les principales religions (d’après O. Pfleiderer), dans Revue de l’histoire des religions, t. iv, 1881, p. 378-382 ; t. v, 1882, p. 123137 et 380-397 ; J.-G. Frazer, The scapegoat, Londres, 1913 ; J. Wach, Der Erlôsungsgedanke und seine Deutung, Leipzig, 1922 ; pour les religions orientales, R. Reitzenstein, Bas iranische Erlôsungsmyslerium, Bonn, 1911, et Vorchristliche Erlôsungslehren, Upsal, 1922 ; pour les religions de l’antiquité gréco-romaine, H. Lietzmann, Der Wellheiland, Tubingue, 1908 ; J. Toutain, L’idée religieuse de rédemption et l’un de ses principaux rites dans l’antiquité grecque et romaine, en tête de l' Annuaire 19 16-1917 publié par la Section des sciences religieuses à l'École pratique des HautesÉtudes ; A. Loisy, Les mystères païens et le mystère chrétien, Paris, 1919.

Une enquête préalable sur le paganisme s’impose de ce chef à la théologie, à titre pour ainsi dire de préface obligatoire, en vue de maintenir au mystère chrétien son indépendance et son originalité. Dans ce sens, voir K. Staab, Die Lehre von der stellvertrelenden Genugluung Christi, Paderborn, 1 908, p. 6-38 ; E. Krebs, Der Logos als Heiland im erslen Jahrhunderl, Fribourgen-Br., 1910 ; Semaine internationale d’ethnologie religieuse, IV* session (Milan, 1925), Paris, 1920, p. 237304 ; A. Médebielle, art. Expiation, dans Dict. de la Bible, supplément, fasc. 12, col. 1-48.

Principaux thèmes.

Il ne saurait, d’ailleurs,

être question d’instituer ici une étude complète, qui appartient à la science des religions et mériterait une monographie. En attendant, il suffit au théologien d’une orientation synthétique à travers les divers

courants du monde non chrétien dont la science incroyante a principalement voulu tirer parti.

1. Idée générale de rédemption.

Certaines classifications distinguent un groupe de religions dites rédemptrices ou religions de salut. A prendre les choses de haut, il n’est pas de religion, par le fait que toutes impliquent un commerce avec une divinité secourable, qui ne mérite, en réalité, ce qualificatif. Seulement rien n’est plus variable que le genre de bienfait qui en est espéré.

a) Au plus bas degré de l'échelle se placent les religions qui sont ou semblent absorbées par le souci des biens temporels. Encore est-il qu’attendre de Dieu ou des dieux soit la inarche heureuse, soit le rétablissement normal des forces naturelles, en matière de santé, de récoltes, de guerre et de paix, signifie un besoin de protection et, s’il y a lieu, de pitié miséricordieuse auquel, pour humble qu’en soit l’objet, le concept générique de rédemption peut convenir.

Jusque chez ces « primitifs » où l'Être suprême est indifférent à son œuvre, il est suppléé dans son rôle de Providence terrestre par « un Sauveur ou Civilisateur », généralement identifié à 1' « Ancêtre tribal ». W. Schmidt, Origine el évolution de la religion, trad. A. Lemonnyer, Paris, 1931, p. 258.

b) Sans toujours atteindre un niveau bien élevé, les grandes religions classiques donnent déjà plus d’ampleur, chacune suivant son génie propre, à la notion de salut.

Dans le parsisme, Zoroastre découvre à ses fidèles la parole divine qui leur permet de triompher des mauvais démons. Le mythe d’Héraclès passe communément pour traduire, dans le monde grec, l’action tutélaire des dieux contre les maux qui accablent l’humanité. Plus tard, le Logos fournit le cadre dans lequel les cercles cultivés aimaient à présenter cette œuvre bienfaisante, non sans l'étendre à toutes les formes de la civilisation, tandis que le personnage populaire de Mercure servait parfois à revêtir ces abstractions des couleurs de la vie. Cf. E. Krebs, op. cit., p. 20-39.

Il s’en faut pourtant que le souci des réalités matérielles y perdit ses droits. A cet égard, les souverains, en tant qu’expression visible de la Providence divine, finirent, la flatterie aidant, par accaparer de plus en plus le titre de « Sauveurs ». Voir dans II. Lietzmann, Der Weltheiland, p. 1-26, la série des inscriptions où il était abondamment décerné par leurs panégyristes officiels à toutes sortes de rois et d’empereurs, soit en Orient, soit en Occident.

c) Au lieu du bonheur collectif, c’est le souci de la destinée individuelle qui prime dans le. bouddhisme. Il s’agit de trouver ici-bas la paix intérieure, plus encore d'échapper à l'épreuve des existences futures en vue d’atteindre le nirvana. De ce chef, « la délivrance est la raison d'être du bouddhisme ». L. de La Vallée-Poussin, Bouddhisme, Paris, 1909, p. 107. Et le moyen pour cela, « c’est la suppression du besoin par l’anéantissement complet du désir », où, dans son fameux sermon de Bénarès, le Bouddha lui-même proclamait avoir trouvé la « rédemption de son esprit ». Voir Chantepie de La Saussaye, Manuel d’histoire des religions, Paris, 1904, p. 380-381.

2. Idée spéciale d’expiation.

Peu de religions

cependant — et peut-être faudrait-il dire aucune, à y bien regarder — se renferment dans ces conceptions terre à terre. Un minimum plus ou moins consistant de vie spirituelle y apparaît, de manière à situer dans l’ordre moral la norme des bons rapports entre Dieu et l’homme, avec une certaine préoccupation des moyens propres à les rétablir.

a) Le péché. - — Rien de plus rudimentaire que la notion du mal chez beaucoup de peuples, où dominent