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REDEMPTION. DOCTRINE : CONCILE DU VATICAN


noster Jésus Christus, qui, cum essemus inimici (Rom., v, lot, propler nimiam charilatem qua dilexil nos (Eph., ii, 4), sua sanctissima passione in ligno crucis nobis justiflcationem meruit et pro nobis Deo F’alri satisfecit.

Notre-Seigneur Jésus-Christ,

lequel, » alors que nous étions ennemis, en raison du grand amour qu’il nous port ait », par sa passion très sainte sur le bois de la croix nous a mérité la justification et a satisfait à Dieu son l'ère pour nous.

Des deux agents principaux qui concourent à notre justification le rapport mutuel est facile à établir. La réalisation appartient au l'ère : effleiens [causa] misericors Deus qui gratuite ablu.il et sanctifteat, mais avec le concours de la passion du Fils à titre de moyen déterminant. Il est d’ailleurs assez curieux de voir appliquer à celui-ci un texte que l’Apôtre, Eph., ii, 4, écrivait de celui-là. Preuve sans nul doute que ce « grand amour » qui met tout en branle est commun aux deux.

C’est d’abord le concept de mérite qui sert à spécilier le rôle du rédempteur. On le trouvait déjà per Iranscnnarn au c. iii, Denzinger-Bannwart, n. 795, sous la forme de meritum passionis ; on le retrouve au canon 10, ibid., n. 820, où il est question de cette Christi juslilia per quam nobis meruit. Cf. sess. xix, c. viii, ibid., n. 905.

Mais celui de satisfaction lui est aussitôt associé. En toute rigueur de termes, on pourrait même dire que ce dernier n’est, en somme, qu’une modalité du précédent, puisque les deux sont compris sous la désignation générale de causa meriloria. Ce qui invite, sans négliger la nuance de chacun, à ne pus perdre de vue la réalité commune à laquelle ils sont l’un et l’autre coordonnés. La « satisfaction » du Christ devait également reparaître plus tard, à propos de celle que le sacrement de pénitence laisse au compte du pécheur. Sess. xix, c. vin et eau. 12, Denzinger-Bamrwart, n. 904, 905 et 922. Ainsi encore dans le texte condamné de la 59e proposition de Baïus. Ibid., n. 1059.

Il ne s’agit d’ailleurs pas là d’une définition doctrinale que rien n’appelait. Par le fait d'être ainsi incorporées dans le décret solennel relatif à la justification, les deux catégories de satisfaction et de mérite, déjà courantes dans l'École pour qualifier l'œuvre du Christ, n’en prenaient pas moins, en quelque sorte, un caractère officiel.

c) Session xxii : Sacrifice du Christ. — Quel que fût son désir de revendiquer, à rencontre des protestants, la valeur sacrificielle de la messe, l'Église, précisément pour la mettre in tulo, ne pouvait pas ne pas rappeler qu’elle est identique au sacrifice de la croix. Aussi bien cette mention revient-elle à maintes reprises au cours du décret promulgué à la session xxii, c. i et ii, can. 3 et 4, Denzinger-Bannwart, n. 938, 940, 950 et 951. Ce qui a l’intérêt de montrer, en ce qui concerne la rédemption, que les vocables nouveaux de satisfaction et de mérite n’enlèvent pas sa raison d'être à l’un des mieux accrédités parmi les anciens.

Aucune explication n’est, d’ailleurs, fournie par l'Église sur le sens des termes par elle adoptés. L’exposé pour ainsi dire officieux du Catéchisme romain, v, 3-5 et xxiv, 1, peut servir à montrer comment elle faisait sien le langage reçu dans l'École, avec une tendance notoire à faire prédominer sur les autres le concept de satisfaction, qui semble dès lors propre à les synthétiser.

2. Condamnation des sociniens. A l’extrême gauche de la Réforme néanmoins, dès la seconde moitié du XVIe siècle, la secte des unitaires, héritière des Socin, ne voulait reconnaître à la mort du Christ que la valeur d’un exemple. C'était la première opposition Systématique à laquelle se soit heurtée la toi traditionnelle en la rédemption.

Sans doute parce qu’elle intéressait plutôt les des tinées internes du protestantisme, l'Église n’a tout d’abord pas accordé d’attention spéciale à cette hérésie. En cas de besoin, elle pouvait, du reste, paraître suffisamment exclue par le chapitre du concile de Trente qu’on vient d’analyser.

Bientôt cependant la propagande faite en Italie par les sociniens allait amener Paul IV à prendre contre eux des mesures directes de répression (7 août 1555). Censures que le pape justifie par l’indication de leurs erreurs, dont l’une consiste à nier eumdem Dominum nostrum Jesum Christum subiisse acerbissimam crucis morlem ut nus a peccatis et ab œlerna morte rcdimerel et Patri ad vitam reconciliaret. Denzinger-Bannwart, n. 993. Formule où s’affirme une fois de plus la croyance de l'Église au caractère objectif de notre rédemption, mais sans ajouter aucun appoint de précision technique aux données acquises du langage courant.

La constitution de Paul IV fut renouvelée sans changement par Clément VIII (3 février 1603).

3° Période contemporaine : Un projet de définition. — Soit pour combattre le rationalisme croissant du protestantisme moderne, dont la théologie de Hermès et de Gùnther accueillait trop aisément les suggestions, soit pour donner à l’architecture du dogme catholique son complet achèvement, le concile du Vatican avait mis à son programme une constitution générale de doclrina catholica. Le dogme de la rédemption y devait figurer en bon rang.

Jn avant-projet fut soumis aux Pères dès le 10 décembre 1869. Le chapitre consacré à la personne du Christ se terminait par quelques lignes sur son œuvre, ramassée autour des notions de mérite et de salis/actio vicaria, dont la négation aurait dû comporter la note d’hérésie. Primum schéma const. de doctrinal catholica, c. xiv, dans Collectio Lacensis, t. vii, col. 515. Deux longues adnotaliones, 33-34, ibid., col. 543-544, expliquaient, à rencontre des objections qu’elle soulève, la manière exacte d’entendre la satisfaclio vicaria.

Le schéma remanié retenait également le mérite ainsi que la satisfaction du Christ, et celle-ci était présentée comme « ce qui fait la vertu de son sacrifice ». Schéma const. de pnecipuis mysteriis fidei, c. iv, 7-8, ibid., col. 501. Aussi la possibilité et la réalité de cette satisfaction étaient-elles consacrées par les deux canons suivants : Si guis a/firmare prsesumpserit salisfaclionem vicariam, unius scilicet mediatoris pro cunctis hominibus, justifias divinæ repugnare, A. S. — Si quis non confiteatur ipsum Deum Verbum, in assumpta carne paliendo et moriendo, pro peccatis nostris poluisse salisfacere, vel vere et proprie satisfecisse, A. S. Can. 5 et 6, ibid., col. 566.

Bien que ces documents n’aient pas d’autorité canonique, ils ne laissent pas d'être précieux pour vérifier l'état normal du magistère ordinaire et voir d’après quelle ligne s’orienterait une définition dogmatique, si elle devait un jour avoir lieu.

Au total, il résulte de ces divers textes que l'Église a bien l’intention d’imposer une foi très ferme, sinon définie, en matière de rédemption. Elle ne rattache pas uniquement le salut de l’humanité à la mission générale du Christ, mais avec une particulière insistance au drame de sa mort. A celle-ci elle ne reconnaît pas seulement la valeur d’une leçon : elle y voit un moyen objectivement et souverainement ellicace de rétablir entre Dieu et l’homme les rapports qu’avait rompus le péché.

Pour caractériser cette action, elle ne se contente pas de retenir les expressions communes de la langue biblique et religieuse ; elle adopte officiellement la terminologie plus précise mise en cours depuis le Moyen Age par ses théologiens. « Mérite » et « satisfaction i du Christ recouvrent donc plus que des