Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 13.2.djvu/197

Cette page n’a pas encore été corrigée
1807
1808
RAYMOND DE PENYAFORT


restituer les yeux et les mains à un jeune homme, dont les brigands avaient crevé les yeux et coupé les mains. La relation authentique de ce fait, écrite par Raymond lui-même, est éditée dans Raymundiana, fasc. 2, Rome, 1901, p. 3-5. Raymond s’adonna à Bologne avec assiduité à l'étude du droit et il y connut et fréquenta les professeurs et étudiants, qui dans la suite se sont acquis du renom, tels Accurse, Tancrède, Pierre de la Vigne, Roffredo le Gibelin, Sinnibaldo Fieschi (plus tard Innocent IV), Claro, Roland de Crémone, Moneta, Paul de Hongrie, Conrad d’Allemagne, (ces deux derniers, auteurs eux aussi d’une Summu de pœnitenlia), Gilbert de Frachinet, Jacques Buoncambio, Martin de Fano, etc. ; ces sept derniers sont entrés dans la suite également dans l’ordre des dominicains. Après six ans d'études, Raymond fut promu docteur en droit en 1216 et obtint la licenlia ubique docendi. Il resta à Bologne pour y enseigner à son tour le droit. Ses cours étaient fréquentés surtout par les nobles et les lettrés. Comme il n’exigeait aucune rémunération de la part des étudiants qui suivaient ses 1 çons, la ville de Bologne lui accorda un subside annuel.

En 1218 Bérenger IV de Palou, évêque de Barcelone, était venu à Bologne, dans l’espoir d’y rencontrer saint Dominique, afin de lui demander quelques frères pour une fondation à Barcelone. A peine entré dans la ville, il entendit parler dans les termes les plus élogieux de Raymond de Pe : iyafort. Il conçut aussitôt l’idée de le gagner pour lui et d’en faire un professeur du séminaire qu’il avait l’intention de fonder à Barcelone, conformément aux décrets du IVe concile du Latran, pour l'éducation du clergé. Ce n’est toutefois qu’après longue et mûre réflexion que Raymond accepta l’offre de l'évêque de Barcelone. A la fin du mois d’octobre 1219 ils partirent tous les deux pour Viterbe, afin d’y rencontrer saint Dominique, qui résidait à la cour pontificale d’Honorius III. Ayant obtenu quelques frères, ils se mirent en marche pour Barcelone, où ils durent arriver au début de 1220. Raymond fut bientôt nommé chanoine de la cathédrale et, peu de temps après, prévôt du chapitre de Barcelone. Il abandonna le clergé séculier le vendredi saint 1222 pour s’enrôler dans l’ordre des dominicains. Au début de sa vie religieuse, Raymond eut une large part dans la fondation de l’ordre de la Merci. Après un fervent sermon dans la cathédrale de Barcelone, il revêtit lui-même saint Pierre Nolasque et ses compagnons, en présence du roi Jacques I effet de l'évêque Bérenger de Palou, de l’habit blanc et du scapulaire. Parmi les différentes dates alléguées par les historiens, il semble qu’il faudrait placer le fait de la prise d’habit de saint Pierre Nolasque et conséquemment de la fondation de l’ordre de la Merci de préférence au 10 août 1223 ou 1222. Voir E. Vacas Galinda, O. P., San Raimundo de Peitaforl, fundalor de la orden de la Merced, Rome, 1919, p. 460 sq. Saint Raymond rédigea pour ce nouvel ordre, dévoué à la rédemption des captifs, un corps de prescriptions et de règles, inspirées de celles de son ordre à lui. Les clercs récitaient le bréviaire dominicain et, en dehors de la règle commune, ils avaient accepté certains extraits des constitutions des frères prêcheurs, principalement par rapport à la vie ecclésiastique. C’est encore saint Raymond qui obtint de Grégoire IX, en février 1235, l’approbation définitive de l’ordre des mercédaires, de sorte qu’il doit être considéré de fait et de droit comme le co fondateur de cet ordre.

Saint Raymond remplit les plus graves et les plus importantes fonctions et missions, d’abord auprès du cardinal Jean Helgrin d’Abbeville, légat du SaintSiège en Espagne, puis à la cour pontificale. En 1229, Jean d’Abbeville fut envoyé en Espagne dans un

triple but : prêcher la croisade contre les Maures déclarer nul le mariage contracté entre Jacques d’Aragon et Éléonore de Castille, faire la visite canonique des églises et mettre en vigueur, là où besoin était, les décrets du concile du Latran. Il s’attacha comme coopérateur saint Raymond, qui parcourait les villages pour préparer le peuple à recevoir le légat. Bien que nous ne possédions que deux documents officiels attestant que saint Raymond a participé aux actes de la légation du cardinal Jean d’Abbeville en Espagne, nous savons cependant par l’Ancienne vie du saint qu’il a coopéré très activement à tous les actes importants de cette légation. Sur cette légation on peut consulter Potthast, Regesta ]>onlificum romanorum, n. 8335, 8336 (6 février 1229) : Auvray, Registres de Grégoire IX, n. 267 ; cf. Guiraud, Registres de Chment V, p, 2.S ; E. Berger, Registres d’Innocent IV, p. 212. Après l’accomplissement de sa mission, Jean d’Abbeville retourna en septembre 1229 à la cour pontificale et le 25 novembre il était déjà à Pérouse, auprès du pape, pour lui rendre compte de sa mission en Espagne et du concours précieux que saint Raymond lui avait prêté. Aussi le pape chargea-t-il, le 28 novembre, Raymond et le prieur de Barcelone de prêcher dans les provinces d’Arles et de Narbonne en faveur de l’expédition de Majorque, entreprise contre les Maures par le roi Jacques d’Aragon. Lettre du 28 novembre 1229, dans Raymundiana, fasc. 2, p. 12-13.

Peu après, en 1230, Grégoire IX appela saint Raymond à la cour pontificale et le choisit comme confesseur. Il le fit ensuite son chapelain et pénitencier ; en cette qualité Raymond rédigea un grand nombre de documents, dont un certain nombre ont été publiés dans Raymundiana, fasc. 2. Pendant son séjour à la cour pontificale, il prit une part active à l’introduction de l’Inquisition en Aragon et, le 30 avril 1235, il donna, sur l’ordre de Grégoire IX, une consultation touchant la procédure à suivre à l'égard des hérétiques de la province ecclésiastique de Tarragone. Raymundiana, fasc. 2, p. 41-45. Pressé par le pape d’accepter l’archevêché de Tarragone, devenu vacant par la mort d’Esparrago, Raymond refusa énergiquement et fit nommer Guillaume de Montgri à sa place, à la fin de 1234. Grégoire IX adressa à ce dernier une réponse touchant 1 es peines à infliger aux hérétiques qui ont abjuré leurs erreurs. Raymundiana, fasc. 2, p. 39-41. Grégoire IX chargea saint Raymond de faire une nouvelle collection de toutes les décrétales et décisions pontificales, destinée à remplacer les multiples collections déjà existantes. Le nouveau compilateur mena son œuvre avec une grande activité et acheva, dans le bref espace de quatre ans, la nouvelle collection qui, par la bulle Rex pari ficus du 5 septembre 1234, envoyée de Spolète aux universités de Paris et de Bologne, fut revêtue du caractère de collection officielle. Exténué de fatigue et brisé par la maladie, saint Raymond, sur le conseil des médecins, quitta Rome en avril 1236 pour regagner son pays natal, où il arriva en juin ou juillet de la même année. Le 15 octobre il prit part aux Cortès de Monçon, convoquées pour préparer l’expédition de Valence et présidées par le roi Jacques d’Aragon. Procès-verbal dans Raymundiana, fasc. 2, p. 54-59. Le 5 février 1237, Grégoire IX chargea Raymond d’absoudre le roi Jacques d’Aragon de l’excommunication qu’il avait encourue pour l’attentat, auquel il s'était livré, par ses agents, contre l'évêque élu de Saragosse passant par Ilucsca, pour aller se faire sacrer à Tarragone. Raymundiana, fasc. 2, p. 59-60. De nombreux documents publiés dans Raymundiana, fasc. 2, p. 5472, il résulte que Raymond exerça encore les fonctions de pénitencier pontifical jusqu’en 1237 et peut-être jusqu’au début de 1238,