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Grégoire au IVe livre de ses Dialogue » soul ils autre

chose que des allégories ? Quoi qu’il en soit, l'Écriture ne prouve pas la thèse des Latins, et saint Grégoire la

ruine lui-même en disant que les tantes légères des justes peuvent être ou bien compensées dés cette vie par de bonnes œuvres, ou bien expiées a la mort, par la crainte, ou enfin remises après la mort par l’elîet des prières offertes à leur intention.

L’autorité de l'Église romaine, à elle seule, ne sutfit pas à dirimer la controverse : si le concile est réuni, c’est que précisément on entend bien ne pas s’en tenir à renseignement d’une Église. Si l’on persiste à juger d’après les coutumes particulières, chaque parti pourra toujours opposer une fin de non-recevoir aux raisons de l’adversaire, et il n’y aura pas de raison d’en finir.

Enfin les Latins font appel à la raison et tirent argument de la justice divine. Les Grecs ne sont pas à court d’arguments pour appuyer leur sentiment. Présentement ils se bornent à esquisser quelques-unes de leurs raisons. Suivent dix chefs d’arguments, empruntés textuellement, sauf un seul (le troisième), au mémoire de Marc d'Éphèse (Marc avait onze chefs d’arguments ; Bessarion a laissé tomber le premier et le neuvième et en a ajouté un, le troisième, de son propre cru). Nous reproduisons ici les dix arguments, dans la traduction du P. d’Al ès, op. cit., p. 20-21 (P. O., p. 56-60, p. 76-79).

(Le premier argument de Marc d'Éphèse était : Si l’amour divin purifie les âmes ici-bus, pourquoi le même amour ne les purifierait-il pas après cette vie. A quoi bon le feu du purgatoire ?)

1. Il convient moins à la bonté de Dieu de négliger un léger mérite que de punir une légère faute. Or, le peu de bien qui est dans les grands pécheurs n’obtient aucune récompense, à cause de la surabondance du mal : donc il ne convient pas que le peu de mal qui est dans les saints soit puni, en dépit de la prépondérance du bien ; car, en l’absence de faute grave, une faute légère apparaît négligeable. Donc il ne convient pas d’admettre un feu purificateur.

2. Il en est du peu de mal des bons comme du peu debien des méchants. Mais le peu de bien des méchants ne saurait appeler une récompense, mais seulement une différence dans le châtiment. Ainsi le peu de mal des bons ne saurait appeler un châtiment, mais seulement une différence dans la béatitude. Donc il n’y a pas lieu d’admettre un feu purificateur.

3. La justice du châtiment éternel apparaît surtout dans la disposition irrévocable de la volonté déréglée des pécheurs : car à la perversion éternelle de la volonté est dû un châtiment éternel ; inversement et par voie de conséquence, si la volonté irrévocablement fixée dans le mal est punie d’un châtiment éternel, celui qui n’est pas puni éternellement n’a donc pas une volonté irrévocable ; car une volonté irrévocable du mal serait destinée à un châtiment éternel ; une volonté irrévocable du bien n’appelle aucun châtiment, puisqu’elle mérite des couronnes. Mais vous-mêmes reconnaissez que ceux qui seraient purifiés par ce feu ont une volonté irrévocable : ils n’ont donc pas à être purifiés par le feu (argument propre à Bessarion).

4. Si la parfaite récompense pour la pureté de cœur et d'âme consiste à voir Dieu, et si tous n’y ont point également part, c’est donc que tous ne sont pas également purs. Donc nul besoin de feu purificateur si en quelques-uns la purification laisse â désirer, car ce feu même produirait en tous une égale purification et les disposerait tous également â voir Dieu. Ce qui arriva sur la montagne de la Loi, en symbole et en figure ; car alors tous n’apparaissent pas au même lieu ni au même rang, mais en des rangs divers selon la mesure de leur purification respective, suivant Grégoire le Théologien.

5. Le grand Grégoire le Théologien, dans son discours théorique et anagogique sur la Pâque, en vient à dire : « Nous n’emporterons rien et ne laisserons rien pour le lendemain, et il explique en termes clairs et nets qu’après cette nuit il n’j a pas de purification, entendant par nuit la vie présente de chacun et n’admettant aucune purification ultérieure.

6. Le même, dans son discours sur la plaie de la grêle, s’exprime ainsi : « Je ne parle pas des expiations d’outre-tombe, auxquelles une pensée indulgente ici-bas livre (les pécheurs) ; car mieux vaut se laisser présentement instruire et purifier

que d'être livre aux tourments de l’autre vie, ou il ne s’agit

plus de purification, mais de châtiment » ; donnant clairement a entendre qu’il n’y a pas de purification, au delà de Cette vie, mais rien que l'étemel châtiment.

7. Le Seigneur, dans l'évangile selon Luc sur le riche et Lazare, enseignant quel sort atteignit l’un et l’autre, dit que Lazare a sa mort lut porté par les anges dans le sein d’Abraham, et que le riche à sa mort fut enseveli, que son âme fut tourmentée dans l’enfer ; ainsi, par le sein d’Abraham, il a désigné l’exaltation dans le bonheur réservé aux amis de Dieu ; par l’enfer et les tourments, la condamnation finale et le châtiment éternel des pécheurs ; il n’a point laissé entre deux un lieu de tourments temporaires, mais rien qu’un grand et infranchissable abîme, séparant les uns de* autres et manifestant la profonde et irréconciliable opposition de leur sort.

S. L'âme délivrée du corps, totalement incorporelle et immatérielle, ne semble pas pouvoir être châtiée par un feu corporel après que son corps, qui devait donner prise au leu, a péri. Mais après la résurrection elle retrouvera un corps impérissable ; toute la création sera transformée ; le feu sera partagé, nous dit-on ; alors elle en éprouvera sans doute un châtiment correspondant, et non pas elle seulement, mais encore les démons, eux aussi ténébreux, revêtus de matière de grossièreté, de corps aériens ou ignés, selon le grand Basile. Mais avant de retrouver son propre corps, n'étant qu’une forme exempte de matière bien que subsistant par elle-même, comment l'âme serait-elle châtiée par un feu corporel ?

(Neuvième argument de Marc d'Éphèse : Si le péché originel, qui est bien plus grave, n’est pas puni ]>ar le feu dans l’autre vie, pourquoi punir le péché véniel par le feu ?)

9. Nos saints Pères, qui ont mené sur terre une vie angélique, initiés en bien des lieux et bien des fois par des visions, des songes et d’autres miracles au châtiment éternel et au sort des impies et des pécheurs qu’il afflige, et faisant part de leurs lumières, contemplant et exposant ces mystères comme présents et actuels, ainsi que la parabole de l'évangile selon Luc décrit la condition du riche et de Lazare, n’ont jamais fait allusion au feu purificateur temporaire.

10. La doctrine de l’apocatastase et de la fin du châtiment éternel, due à Origéne et acceptée par quelques personnages ecclésiastiques, comme Didyme et Évagre, doctrine qui met en avant la bonté divine et trouva bonaccueil parmi les lâches, selon le mot du divin Jean, architecte de l'échelle céleste, n’en a pas moins été proscrite et anathématisée par le saint concile Ve œcuménique, comme dissolvante des âmes et encourageant la lâcheté chez les lâches, qui escomptent la délivrance de leurs tourments et l’apocatastase promise. Pour les mêmes raisons, la doctrine proposée du feu purificateur semble devoir être rejetêe de l'Église, comme énervant les âmes vaillantes et les détournant de faire tous leurs efforts pour se purifier en cette vie, par la perspective d’une autre purification.

4° Réponse de Jean de Turrecremata, au nom des Lulins (P. O., p. 80-107, le texte latin original dans O. C, t. xvii, p. 215-243). — La réponse des Grecs, déclare-t-il, fonde l’espoir d’une entente, car un point capital est déjà mis hors de doute : l’efficacité des prières de l'Église pour les âmes des défunts quand ces âmes ne sont pas assez pures pour entrer immédiatement au ciel, ni assez coupables pour être jetées en enfer. C’est sur cette catégorie moyenne que doit désormais se concentrer le débat. Mais, pour mettre de côté tout préjugé, pour examiner à fond la question à la lumière des seules Écritures et de l’enseignement des Pères, les Grecs devront s’abstenir d’une réponse qui semble bien une fin de non-recevoir : « Jamais nous n’avons parlé de la purification par le feu ! jamais nous n’en parlerons ! » Ce qu’il faut, c’est prier Dieu pour lui demander simplement le triomphe de la vérité.

L’orateur latin distingue quatre parties dans la réponse des Grecs :

1. Le premier point concerne l'état des âmes saintes après la mort. Sont-elles enlevées immédiatement au ciel ? Pareillement, les âmes que la mort a trouvées en éfat de péché mortel descendent-elles aussitôt en enfer pour y être châtiées ? Ou bien les unes et les autres attendent-elles le jour du jugement dernier et la résur-