Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 13.1.djvu/605

Cette page n’a pas encore été corrigée
1191
1196
l’URGATOIUK. L’EXPIATION DM) UT I'. H-TO MB E


darde. — Les sordes étant différcntes des peccata, leur purification ne se fera pas de la même façon : les souillures seront purifiées en passant par le feu ; les iniquités, en y restant. Le juste, comparable à l’or, ne fera que déposer dans le feu son alliage de plomb ; le pécheur sera englouti dans le feu pour y être longuement purifié. Les textes déjà cités sulliraient à établir cette opposition. On peut y ajouter In ps. XXXVI, n. l, t.xii, col. 1337, et surtout In Levit., hom. viii, n. 4, où Origène interprète allégoriquement la durée des purifications légales par rapport à la purification des derniers temps. « C’est au bout d’une semaine de jours qu’arrivera la consommât ion du monde. Tandis que nous sommes encore revêtus de notre chair mortelle, il nous est impossible d’atteindre à une pureté sans tache, sinon au huitième jour, c’est-à-dire au moment où arrivera le temps du siècle à venir. En ce jour-là, toutefois, celui qui est mâle et aura agi virilement, aussitôt à l’entrée du siècle à venir est purifié… ; il recevra de la résurrection une chair purifiée de tous ses vices (c’est-à-dire le juste sera instantanément purifié). Mais si, au contraire, en lui-même il n’a rien montré de viril pour s’opposer au péché, si dans ses actions il s’est conduit en lâche et en efféminé, s’il s’est laissé aller surtout à commettre un péché tel qu’il ne peut être remis ni en ce siècle ni en l’autre (Matth., xii, 31), il devra passer une ou deux semaines dans son péché ( c’est-à-dire subir une purification de très longue durée), et ce n’est qu’au commencement de la troisième semaine qu’il sera purifié… » P. G., t.xii, col. 497.

c. Époque des purifications. — L'épreuve par le feu étant commune aux justes et aux pécheurs, il ne peut y avoir d’opposition quant à leur époque initiale, qui est le jour du jugement coïncidant avec la conflagration finale. Mais, puisque l’une est instantanée, son époque coïncidera exactement avec le dernier jour ; l’autre, étant de longue durée, se prolongera dans les siècles. Fidèle à la conception de l’eschatologie juive, Origène, comme Justin et frénée, enseigne que les justes trouveront après leur mort, une demeure dans un lieu caché. C’est, pour les âmes justes, le paradis, préparatoire au véritable paradis de délices que l'âme n’obtiendra qu’après le jugement dernier. Cf. De principiis, 1.11, c. xi, n.6, P. G., t. xi, col. 1642 ; In Ezechiclem, hom. xiii, n.2, t. xiii, col. 763 ; In Numéros, hom. xxvi.n. 4, t.xii, col. 776. De même, les pécheurs attendentle dernier jour pour subir l'épreuve du feu. In Exodum, hom. vi, n. 3, t.xii, col. 334. Mais cette attente ne constitue pas en réalité un véritable recal : pour Origène comme pour Clément d’Alexandrie, la fin du monde est imminente ; cf. De principiis, t. III, c. v, n. 6, t. xi, col. 330, et l’on peut donc encore, même dans cette hypothèse, parler de l'épreuve du feu comme d’une épreuve qui nous attend au sortir de la vie. Cf. In Lucam, hom. xxiv, P. G., t. xiii, col. 1861-1865. Toutefois, c’est biui au jour du jugement, après la résurrection générale qu’a lieu l'épreuve du feu : la pensée d’Origène est ferme sur ce point. Cf. In Jeremiam, hom. ii, t. xiii, col. 280-281 ; In Leviticum, hom. viii, n. 4, t.xii, col. 497 ; In Exodum, hom. vi, n. 3, t.xii, col. 334 ; In Lucam, hom. xiv, t. xiii, col. 1836 ; In ps. vi, fragment tiré de l’Apologia pro Origène, t.xii, col. 1177-1178. L'épreuve des justes ne se prolongera pas au-delà de ce dernier jour ; aussitôt la consommation des temps arrivée, elle se fera, elle sera faite ; aussitôt baptisé dans le feu, le juste passera au bonheur auquel il aspire. In Lucam, hom. xxiv, t. xiii, col. 1865. L'épreuve des pécheurs, au contraire, se prolongera longtemps après le dernier jour, non seulement pendant tout le siècle à venir, mais encore pendant les siècles des siècles. Sur l’expression origéniste, siècles des siècles, cf. In Exodum, hom. vi, n. 13, t.xii, col. 340 ; De principiis. t. II, c. m. n. 3, t. xi, col. 183184 ; In Joannem, tom. xix, n. 3, t. xiv, col. 551 ;

voir Iluet, Origeniana, I. II, c. ii, q. xi, n. 26, dans P. G., t. xvii, col. 1013 sq.

d. Instrument de la purification. — Des oppositions relevées ci-dessus entre la purification des pécheurs et celle des justes, on peut déduire, semble-t-il, une considération importante touchant la nature de l’instrument de la purification. Peut-être pourrait-on dire que la purification des justes, ou plus exactement l'épreuve du feu à laquelle sont conviés tous les hommes à la fin du monde, se fait par le moyen d’un feu réel, tandis que le châtiment des impies se fait par le moyen d’un feu métaphorique, succédant à l'épreuve du feu réel. La thèse du feu métaphorique de l’enfer est très certainement d’Origène : si tous les damnés doivent un jour être réconciliés avec le Christ, à quoi servirait un feu réel dans l’enfer, vide de ses victimes ? Sur le feu métaphorique voir De principiis, t. II, c. x, n. 4 ; Conl. Celsum, t. IV, n. 13 ; t. VI, n. 71, P. G., t. xi, col. 236-237, 1042-1043, 1405-1408 ; In Numéros, hom. xxvii, n. 8, t.xii, col. 789 ; In Matth., commentariorum séries, n. 72, t. xiii, col. 1716. Cf. Feu de l’enfer, col. 2201. Mais il paraît bien que l'épreuve générale du feu au dernier jour et, partant, la purification des justes, dite baptême par le feu, se font, au sentiment d’Origène par un feu réel. Ici, en effet, il s’agit d’une épreuve passagère, d’une purification instantanée, laquelle peut emprunter le feu de la conflagration générale, ce feu agissant sur les corps ressuscites pour purifier en eux les sordes peccati.

e. Conclusion. — On a noté que la purification des justes est réservée, selon Origène, à l’esprit du jugement. Cet esprit du jugement, que dans l’homélie In Jeremiam Origène oppose à 1' « esprit de combustion », purifie cependant par le feu — tous les autres textes l’affirment — et probablement par le feu réel de la conflagration dernière, les justes qui, sans exception, ont tous à se dégager de quelque souillure avant d’entrer au ciel. Sans doute, la conception qui envisage une purification de tous les justes sans exception est erronée. Voir Feu du jugement, col. 2244. Sans doute encore, la conception qui recule au jour du jugement la purification des justes qui peuvent en avoir besoin renferme une erreur de perspective ; mais elle est excusable chez Origène comme chez tant d’autres Pères qui l’ont commise avant ou après lui. Mais nous pouvons retenir, comme expression certaine d’une croyance à la purification des fautes légères dans l’au-delà, la conception origéniste du baptême par le feu, c’est-à-dire de la purification des justes avant leur entrée au paradis. Cette conception est spécifiquement différente de l’apocatastase : elle fournit donc un témoignage nouveau et doctrinalement bien plus certain que l’apocatastase en faveur de la croyance primitive au purgatoire. En ce sens, il est permis de saluer en Origène non le fondateur, mais le premier témoin du dogme catholique.

3. Après Origène.

La conception d’un feu purificateur au moment du jugement se continue, après Origène, en Orient, tout comme nous la retrouverons en

Occident. L’un des adversaires les plus acharnés de l’origénisme, Méthode d’Olympe, enseigne expressément qu' « après la résurrection, il n’y aura aucune nouvelle loi, aucun nouvel enseignement, mais le jugement et le feu : oùxs-rt. [lezàt. Taor /]v (se. àyvstav) sasaOai voaov 7) StSacrxxXîav szkpxv, àXXà xpïaiv xal Trîjp ». Convivium, x, 4, P. G., t. xviii, col. 200. Ce feu aura pour objet la purification et le renouvellement du monde. Voir Fin du monde, col. 2530. Méthode ne parle pas de la purification des âmes ; toutefois, il nous avertit que, si des châtiments nous éprouvent en cette vie à cause de nos péchés antérieurs, nous devons nous en réjouir, parce que le jugement nous deviendra facile. De dist. cib., ii, 2, éd. Bonwetsch, p. 428. Cf. Atzberger, op. cit., p. 490.