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PROCÈS ECCLÉSIASTI01 ES

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l’équipement Intérieur dont est muni un homme appelé à se mouvoir parmi le réel el à diriger sans re lâche sa conduite. Elle répond à la nécessité déjuger du bien et du mal sur le plan de l’acl ion concret !. Elle consiste en un ensemble « le ressources morales el intellectuelles, spirituelles et sensibles, grâce à quoi se réalise au mieux de nos vertus l’incessante adaptation

qu’exigent de nous le train <les choses et nos propres icissi tudes. Aucune Soin me ne supplée cette éducation intérieure. Moins féru de casuist ique, on jugera mieux de ce qui convient, si la prudence veille au-dedans de l’âme. En n’exploitant que secondairement cet héritage de l’ancienne théologie, le probabilisme s’est privé de la ressource essentielle qui dût favoriser précisément ses fins pratiques et toutes concrètes. Jusqu’aujourd’hui même, il ne semble pas s’être avisé encore de la perte qu’il a subie.

A la vérité, nous le comprenons bien. Que la prudence, au sens (, 11e nous venons de rappeler, ait cessé d’être, dans les théologies morales, cette pièce organique qu’elle fui jadis ; que son étude et sa recommandation n’y tiennent qu’un rang modeste, bien inférieur à l’exposé des systèmes moraux, il y a là plus qu’une coïncidence. On s’est passé d’elle au nom du même esprit que nous avons observé au long de cette histoire, et dont nous répétons qu’il a donné au probabilisme sa consistance. La prudence est rendue peu nécessaire dans une doctrine où l’on insiste moins sur l’élaboration du propre jugement pratique que sur le choix d’une opinion parmi celles qui ont cours, et de moins en moins à mesure qu’on tend à élargir la liberté du choix. Elle n’est plus guère requise dans une conception de la vie morale où il semble qu’on acquitte ses obligations comme on exécute une consigne, exactement mais sans amour. Car il faut remarquer en fin de compte cette curieuse réduction de l’acte humain à laquelle pratiquement se tiennent certains moralistes : ni l’intention initiale du bien et l’empressement de le trouver, d’où dérive dans l’action, si l’on peut dire, sa sève ; ni la délibération intérieure avec ses qualités et ses difficultés propres ; ni la détermination convaincue du devoir, telle que l’enquête objective y a conduit l’esprit, aucun de ces moments ne leur semble ofîrir de l’intérêt ou demander une attention et une vertu spéciales. Du livre à l’exécution, du livre où est inscrite toute faite la formule de l’action à l’exécution qui s’y conforme de justesse, ne semble-t-il pas que trop d’auteurs raisonnent comme si l’acte humain ne comportait rien d’autre ? En ces conditions, il est clair que la prudence, même si l’on en parle, est d’un prix diminué. Elle prend au contraire toute sa valeur dans une morale où l’homme tout entier se livre en ses actes, où l’action se détache de lui comme un fruit mûr et savoureux. Il est certain qu’on n’agit bien qu’avec toute son âme. Du jour où tous les moralistes entendront cette formule avec la même force, peut-être leurs différends particuliers se composeront-ils plus facilement et le probabilisme aura-t-il cessé d’être des uns aux autres un objet litigieux.

Th. Deman.

    1. PROCÈS ECCLÉSIASTIQUES##


PROCÈS ECCLÉSIASTIQUES. — I. No tion et histoire. II. Le pouvoir judiciaire de l’Église (col. (523). III. Des procès en général (col. 627). IV. De quelques procès en particulier (col. 635). Y. Des causes de béatification et de canonisation (col. 638). VI. De quelques procédures spéciales (col. 6 11).

I. Notion et histoire.

Xotion.

Trois termes

principaux servent habituellement à désigner, dans le langage juridique comme dans le langage courant, l’ensemble des actes par lesquels une personne revendique ses droits devant l’autorité publique : jugement, procès et procédure. Employés souvent l’un

pour l’autre, ils 11e sont pourtant pas synonymes.

1. I.e jugement, judicium, qui désigne originairement une opération de l’esprit, consiste avant tout

dans la connaissance’le la cause, d’où découle la définition du droit controversé ; le Jugement proprement

dit commence a la citation et se termine normalement par la sentence.

2. Dans le droit déerétalien, le mot procès marqua surtout les actes judiciaires posés par le juiic : en ce sens, le procès n’est qu’une partie du jugement. Cf. Béer., I. II. lit. ix, c. 5 ; I. I, tit. iii, c. 22 ; I. I, tit. xxi, c. 18 : 1. Y, tit. xi, c. 2 in Clem.

Chez les modernes, au contraire, il désigne tous les actes à poser pour découvrir la vérité et protéger le droit : le terme a donc une extension plus grande que le mot jugement puisqu’il comprend tous les actes préliminaires aussi bien que toutes les fonctions executives qui accompagnent ordinairement la conclusion d’une cause. C’est dans ce sens plus large qu’il faut entendre le titre inscrit en tête du 1. IV du Code, De processible. La signification de ce mot est générique : il désigne non seulement la série des actes requis pour régler les litiges entre particuliers, mais encore la manière d’expédier toutes les affaires ou contestations dans lesquelles le bien publie est intéressé, par exemple le culte à rendre aux serviteurs de Dieu, ou la façon de procéder dans certaines questions d’ordre semiadministratif, semi-pénal. Plus rarement le terme procès est employé, au sens restreint de jugement, pour désigner simplement l’ensemble des actes à développer devant les tribunaux dans un ordre déterminé : c’est ainsi que l’on parle parfois de procès contentieux, procès criminel, publication du procès. Can. 1859.

3. La procédure est plutôt l’évolution extérieure et pratique d’un procès. Le mot est tiré du Code civil français ; il est souvent employé comme synonyme de jugement ou de procès.

4. Nous avons du jugement ecclésiastique une définition authentique au canon 1552 du Code : Controversise in re de qua Ecclesia jus habet cognosetndi. coram Iribunali ecclesiaslico. légitima disceplalio el deflnitio.

a) Ce qui spécifie et limite le jugement ecclésiastique, c’est avant tout son objet : res de qua Ecclesia habel jus cognoscendi ; il doit porter sur une matière qui est du ressort de l’Église, soit de pai le droit divin, soit par concession, dévolution, ou à tout autre titre. Cet objet est en général un droit controversé, un conflit de volontés, pour la solution duquel il est fait appel à l’autorité sociale. De façon plus précise, le. can. 1552, § 2, spécifie que le jugement a pour objet en premier lieu les droits des personnes physiques ou morales ; seules en effet ces personnes peuvent avoir des droits, qu’elles poursuivent ( persequenda) s’ils sont personnels, qu’elles revendiquent (vindicanda) s’ils sont réels. Le jugement peut porter en second lieu sur des faits juridiques que le juge a pour mission de déclarer. Les faits juridiques sont ceux dont dépend l’habilité à acquérir ou à exercer des droits, ou bien encore L’acquisition même, la mutation ou la perte de ces mêmes droits : par exemple l’état matrimonial, l’état libre, la majorité, la qualité d’héritier, la léuit imité de la naissance, le paiement d’une dette, etc. Enfin, les délits peuvent être l’objet d’un jugement lorsqu’une information est ouverte à leur sujet en vue d’infliger une peine ou de la déclarer.

b) Le sujet du jugement est double. Il y a le sujet passif : ce sont les parties en cause, bien qu’elles soient actives par rapport a la controverse : elles portent les noms de demandeur, ador (qui prend le litre d’aceusalor dans les causes criminelles), et de prévenu, reus. Le sujet actif est le juge, c’est-à-dire la personne lésii-