Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 13.1.djvu/13

Cette page n’a pas encore été corrigée

1 1

    1. PRÉMONTRÉS##


PRÉMONTRÉS. ÉVOL1 ["ION

L2

sur l’Espagne. Il lit rentrer les abbayes dans la tradil Ion de l’ordre. Il permil cependanl à la circarie de conserver l’abbatial triennal, mais n nommerait lui-même le vicaire général d’Espagne, qui aurait toute autorité dans la province. l’Ius tard, sous divers prétextes, les prémontrés espagnols abandonnèrent l’habit et le bréviaire de l’ordre, que le pape Clément XI leur lit cependant reprendre en 1 7 < : i. Depuis lors, la province espagnole eut une vie fort autonome, qui dura jusqu’à la révolution de 18.’i.’{, laquelle anéantit toutes les institutions religieuses de la presqu’île ibérique. Cf. E. Valvekens, La congrégation des prémontrés d’Espagne, dans Anal, prsem., t. viii, 1932, p. 5-24.

Une autre réforme, fruit de tentatives personnelles de deux prémontrés, Daniel Picart et surtout Servais de Lairuels, porte le nom de réforme de Lorraine… Elle débuta à l’abbaye de Pont-à-Mousson et s’étendit rapidement en Alsace, en Lorraine, en Picardie, en Champagne et en Normandie : 12 monastères formèrent la congrégation de l’antique rigueur de Prémontré », qui fut approuvée par le pape Paul V en 1017 et parle pape Grégoire XV en 1621. Le Paige, op. cit., ]). 7 1 !) et 751. Cette congrégation obtint parla l’autorisation de se gouverner par son chapitre particulier, auquel présiderait l’abbé de Prémontré ou son vicaire général. Cette réforme est marquée par un retour à la vie commune, à l’abstinence perpétuelle, au chant des matines à minuit et au jeune continuel du 1-4 septembre à Pâques. Un second noviciat était imposé à tous les profès, mais le vœu de stabilité avait disparu, les religieux pouvant être transférés d’une abbaye à l’autre. Les chapitres généraux de l’ordre protestèrent contre ce qu’ils appelaient « un schisme… En 1661, un modus vivendi fut adopté entre la réforme de l’antique rigueur et l’observance commune. À l’usage de cette congrégation, la nouvelle édition des statuts de 1630, publiée par l’abbégénéral Saulnier (Étival, 1725), contient en annexe les : Articuli rejormationis seu conununitatis anliqtii rigoris nuncupatee. Voir E..Martin, Lairuels ci lu réforme des prémontrés, Nancꝟ. 1893 ; du même, De canonicis præmonstratensibus in Lotharingia et de congregatione antiqui rigoris, Nancꝟ. 1892.

Les abbayes allemandes avaient subi une réforme sérieuse vers le milieu du xv siècle, sous la direction de Jean Busch. Celles d’Angleterre avaient passé par une évolution similaire. La grande difficulté était l’assistance régulière aux réunions des chapitres généraux. Le primat de Cantorbéry, John Morton ( i 1500), fut l’artisan d’une réforme fort importante et Prémontré garda ses attaches en Angleterre, jusqu’à la destruction des ordres religieux par Henri VIII. Cf. Gasquet, Coltectanea anglo-prsemonstratensia, Londres, 1906.

L’ordre de Prémontré lui-même, s’inspirant des décrets du concile de Trente, adopta une réforme générale et élabora une nouvelle rédaction de ses statuts. Ceux-ci furent promulgués en 1630. Quand, en 1770, la Commission des réguliers, instituée en France par Louis XV, exigea la révision et la réimpression des statuts monastiques de la part des congrégations de France, les deux observances de prémontrés rédigèrent des statuts communs, promulgués en 177.’i. Ces statuts, qui n’obligeaient que les maisons de France, différaient peu de ceux de 1630. À la suite dis dispositifs généraux, elles contenaient en annexe vingt-trois articles à l’intention de la réforme de l’anl [que rigueur…

Mais déjà le XVIIIe siècle louchait à sa lin. Ce fut pour les prémontrés la grande catastrophe. Les querelles du jansénisme ne les avaient qu’effleurés, mais l’esprit du philosophisme pénétra dans leurs

cloîtres. L’œuvre néfaste fut commencée par i empereur Joseph II. [1 débuta parle décret du 2 1 mars 1781. défendant aux maisons religieuses de ses étals de

communiquer avec des supérieurs d’ordre demeurant

en pays étranger. C’était couper les liens et détacher

les abbayes de l’empire et des Pays-Bas de la maison mère de Prémontré, fin 178.5. il supprima les couvents contemplatifs ; les prévôtés et prieurés des sœurs lurent englobés dans cette décision. Par décret du 11 septembre 178.’$, il supprima l’exemption dis abbayes et les plaça directement sous la juridiction de l’Ordinaire. Dans rempile, d’après la prescription gouvernementale, les abbayes formeraient une province, avec un président à sa tête. Cette fonction fut supprimée à son tour, en 1813. Depuis 1785. les jeunes religieux des abbayes turent contraints d’aller suivre les cours dans les séminaires généraux érigés à cet effet, et d’y prendre le costume des séminaristes. Le collège de Prague lut supprimé cette même année. Par contre, chaque abbaye de l’empire fut chargée de desservir de multiples paroisses. En 1788. l’État confisqua tous les objets en argent qui se trouvaient dans les abbayes, lit transporter les documents d’archives aux archives de l’État, à Vienne, et confisqua les livres des bibliothèques des abbayes au profit des bibliothèques des universités.

La Dévolution lit crouler d’un seul coup l’édifice élevé par saint Norbert en détruisant l’abbaye mère et toutes les maisons de France et de Belgique. Les abbayes qui existaient encore en Allemagne furent victimes de la grande sécularisation. Sur la base de la paix de Lunéville iisoii et des pourparlers de Ratisbonne (1803), on concéda à la noblesse du pays, en compensation des biens qu’elle perdait sur la rive gauche du Rhin, les propriétés des diverses abbaves. Ce fut un désastre, non seulement pour la vie religieuse, mais aussi [jour tous les trésors d’art renfermés dans ces lieux saints.

Quand la Révolution fut passée, il ne resta plus que des ruines. Un moment, les religieux dispersés mirent leur espoir dans le concordat qui s’élaborait entre le pape et Napoléon (1801). mais aucune clause ne favorisa les abbayes supprimées. Le Congrès de Vienne (181-4-1815) n’accorda aucune attention aux pétitions qui lui furent adressées par les représentants de l’ordre de Prémontré. En France, le régime libéral » s’opposa a une reprise de la vie conventuelle. et, en Belgique, la mentalité calviniste de Guillaume l". roi des Pays Mas réunis, se cabra contre toute restauration des vieilles cités de la vie religieuse catholique. Entre temps les religieux survivants mouraient. L’Écuy, le dernier abbé de Prémontré, expira à Paris en 1831.

La révolution belge de 1830. en inscrivant la liberté d’association dans sa charte constitutionnelle, permit la restauration de quelques abbayes, mais peu nombreuses tant par manque de ressources que par manque de sujets. Kn France, les difficultés furent beaucoup plus grandes. Dès 1850. lévêque de Soissons. .Mgr de Garsignies, avait racheté l’antique abbaye de Prémontré pour y fonder un orphelinat. Plein de sympathie pour l’œuvre de saint Norbert, il donna l’habit au P. Edmond Boulbon, ancien trappiste, et lit venir quelques chanoines d’Averbode et de TongerlOO pour restaurer la vie religieuse à Prémontré. Mais la situation respective du prieuré et de l’orphelinat donna lieu à des difficultés et la restauration de Prémontré dut être abandonnée. Le P. Edmond Boulbon releva alors de ses ruines, en 1858, le couvent de l’rigolel. près Tarascon. tandis que l’abbaye de Grimbergen reprit et repeupla celle de Montlavc. en Calvados. Ces monastères ont actuellement quelques prieurés en annexe.