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PIK II. LE PONTIFICAT


rialc, jointes à la disgrâce du chancelier Schlick, font douter qu’il soit intervenu sérieusement dans les pourparlers préparatoires au concordat de Vienne qui marqua la fin de la neutralité allemande (17 févr. 1148).

Transféré à l’évêché de Sienne, le 24 octobre 1449, il fut chargé de négocier à Naples le mariage de Frédéric III avec l’infante Éléonore de Portugal et de solliciter pour l’empen ur la faveur d’être couronné à Rome. Mansi, Oraliones, t. i. p. 129 et 140. Son double succès lui valut d’être élevé au rang de prince et de conseiller d’empire. Après une mission en Bohême quillet-août 1451), il reçut Frédéric à Sienne, où sa fiancée vint le rejoindre, et le conduisit à Rome pour les cérémonies du mariage et du couronnement (16 et 19 mars 1452). Ce résultat atteint, il prononça, en consistoire public, un discours resté célèbre, pour préconiser la croisade contre les Turcs. Mansi, Orationes, t. i, p. 173.

L’année suivante, Constantinople tombait et Nicolas V appelait la chrétienté à se croiser. /Eneas, devenu nonce apostolique pour la Bohême, la Moravie et la Silésie (bulle du 18 avril 1452, dans Raynaldi, ad an., n. 6) et occupé, depuis son retour à Vienne, au rétablissement de la paix en Allemagne, mit son éloquence au service de la cause. Mais les discours qu’il prononça aux diètes de Ratisbonne (avril 145’4, dans Mansi, OraL, t. 1, p. 251), de Francfort (octobre, ibid., p. 263), et de Neustadt (février et avril 1455, ibid., p. 288, 316, 330), restèrent sans résultat pratique.

Nicolas V venait de mourir. iÉneas, chargé avec Jean Hinderbach d’aller prêter le serment d’obédience à Calixte III, au nom de l’empereur, s’attarda à Venise pour y parler de la croisade et n’arriva à Rome que le 10 août. Il resta dès lors en Italie.

Cardinal de Sainte-Sabine.

Une heureuse légation

auprès du roi de Naples, pour mettre fin aux exactions des bandes de Piccinino qui terrorisaient le pays de Sienne, et les promesses qu’il obtint d’Alphonse au sujet de la future croisade, lui valurent la dignité que, depuis longtemps, il convoitait : par bulle du 18 décembre 1456, il fut créé cardinal-prêtre du titre de Sainte-Sabine et autorisé à garder en même temps l’évêché de Sienne. Raynaldi, ad an., n. 73. Demeuré à Rome comme spécialiste des affaires allemandes, /Eneas n’échappa point personnellement aux critiques des adversaires de la papauté conduits par l’électeur de Mayence ; et Martin Mair, le chancelier de Thierry d’Erbach, lui reprocha amèrement la réserve générale jusqu’à concurrence de 20 000 ducats qu’il avait obtenue sur les bénéfices des provinces de Cologne, de Trêves et de Mayence. Lettre du 31 août 1457. Cf. Archiv fur œsterreichische Geschichte, t. xvi, p. 416. Le cardinal de Sienne rédigea lui-même la réponse du pape aux nouveaux grauamina de la nation allemande, bref du 31 août, dans Opéra, p. 340, repoussa avec dédain les manœuvres de chantage de ses adversaires, lettre du 20 sept., ibid., p. 822, et donna au nonce Laurent Rovarella des instructions détaillées sur les moyens de combattre le parti antiromain. Lettre du 1 er décembre, ibid., p. 821.

II. Le pontificat de Pie II.

Son élection.


Après la mort de Calixte III et le décès inopiné du cardinal Capranica qui allait être désigné pour lui succéder, le duc de Milan, le roi de Naples, le cardinal Barbo usèrent de leur influence en faveur d’/Eneas Sylvius, qui obtint, le 19 août 1458, neuf voix contre six données au cardinal d’Estouteville. Rodrigue Borgia, le futur Alexandre VI, donna le signal des « accessions » et Prosper Colonna acheva de faire pencher la balance du côté du candidat italien. Le nouveau pape, qui n’avait revêtu la pourpre que depuis vingt mois, prit le nom de Pie II. Agé seulement de cinquante-trois ans, il était physiquement « usé » par les souffrances que lui causaient la toux, la pierre et la goutte ;

mais son caractère était resté aimable, et son énergie morale allait le maintenir jusqu’au bout à la hauteur de sa tâche. Psychologiquement, il était prêt ; au milieu même de ses égarements, il était resté croyant et pieux ; ses passions étaient apaisées ou enfin domptées ; il connaissait les hommes avec leurs faiblesses et leurs ressources ; ses fonctions antérieures l’avaient mis au courant des besoins de l’Église, aussi bien que des courants de la politique européenne ; il avait acquis surtout une très haute idée de la dignité pontificale et du rôle que la papauté a mission de jouer dans le monde. L’orateur du conclave, Domenicho de’Domenichi, avait tracé au futur pape son programme : « Rendre à l’Église son prestige, affermir son autorité, réformer les mœurs, réorganiser la curie, propager la foi, racheter les captifs, recouvrer les villes perdues, armer les fidèles pour la guerre sainte. » Pastor, Hist. des papes, t. ii, p. 8. Pie II allait être le sage et énergique pontife capable de le réaliser.

La politique pontificale.

1. Le congrès de Mantoue

et la promulgation de la croisade. — On peut dire sans trop d’exagération que toutes les initiatives de Pie II furent orientées vers ce but suprême : la croisade contre les Turcs, dont les progrès, arrêtés un instant seulement par les exploits de Jean Hunyade devant Belgrade, mettaient en péril la chrétienté tout entière. Il n’avait pas eu besoin des avertissements de l’évêque de Torcello au conclave pour prendre conscience de la gravité de la menace ; il n’eut pas besoin non plus des encouragements du Sacré Collège pour entreprendre d’y parer dans toute la mesure de ses forces. Dès le 13 octobre 14.38, il convoquait, par la bulle Vocavil nos Pius, tous les princes chrétiens à étudier ensemble les moyens de conjurer le danger commun. Mais, malgré ses instances particulières auprès de chacun d’eux, il se trouva seul à Mantoue le 1 er juin 1459, jour fixé pour l’ouverture du congrès. Les princes avaient d’autres soucis : l’empereur, qui venait de se faire proclamer roi de Hongrie, guerroyait contre Mathias Corvin ; le roi de France, désireux de voir aboutir les prétentions de René d’Anjou au royaume de Naples, ne pardonnait pas à Pie II le couronnement de Ferdinand ; les républiques italiennes, dont le commerce faisait la prospérité, tremblaient pour leurs intérêts matériels. Les premières délégations qui se présentèrent : celles de Thomas Paléologue et du roi de Bosnie, ne venaient pas offrir, mais demander du secours. C’est le 26 septembre seulement, après l’arrivée de plusieurs ambassades, dont la plus brillante était celle du duc de Bourgogne, que le congrès put tenir séance. Le personnage le plus important qui fût présent était François Sforza, duc de Milan. Les ambassadeurs de Charles VII et de Frédéric III n’arrivèrent qu’en novembre.

Pie II, patiemment, se prodiguait, recevant successivement les uns et les autres ; mais, visiblement, la croisade ne passionnait que lui seul. La grande assemblée rêvée s’était muée en une série de rencontres où chacun venait poursuivre ses fins personnelles. Les Hongrois se plaignaient de l’empereur, les Français du pape ; les Polonais se retranchaient derrière’de vagues promesses ; les Italiens refusaient, les uns de fournir des hommes, les autres d’approuver les dîmes ; Venise osait réclamer, pour prêter quelques navires, non seulement le commandement en chef des opérations navales, mais les hommes, l’argent, et tout le butin ; Sigismond, duc de Tyrol, entendait faire régler à son profit un interminable conflit avec l’évêque de Brixen, Nicolas de Cuse. Le pape en était réduit à gémir, à supplier, à blâmer, à supporter jusqu’aux grossières insolences d’un Grégoire Heimburg. Les Allemands finirent bien par offrir, pour le printemps, une armée de 32 000 fantassins et 10 000 cavaliers, mais l’empereur entendait se faire assurer au préalable, par le légat