Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.2.djvu/90

Cette page n’a pas encore été corrigée

1015

PIE II. LES ANTÉCÉDENTS

L616

le panégyrique de saint Ambroise. Mansi, t. xxx, col. 1207-1216.

Doux partis restaient en présence : celui du pape. qui proposait Florence ou une autre ville italienne, et celui du cardinal d’Arles. Louis Aleinan, qui optait pour Avignon. Devant leur violente opposition, .Eneas demeurait hésitant. « OÙ est la vérité, Dieu seul le sait. écrivait-il à son ami Pierre de Noceto, le 21 mai 1437, éd. Wolkan, t. i a. p. 74. Les œuvres de Dante exerçaient sur lui une profonde influence ; comme l’auteur de la Monarchia à l’époque d’Henri VII, il ne voyait de salut, pour l’Italie et la chrétienté, que dans l’intervention de l’empereur. Lettre à Sigismond, 15 juin. éd. Wolkan, p. 76. Mais celui-ci mourut le 9 décembre. Barthélémy Visconti, envoyé par le duc de.Milan pour presser Albert II d’accepter la couronne impériale, décida son ancien familier à l’accompagner à Vienne, et ce fut pour —Eneas l’occasion d’écrire un éloquent mémoire dont les arguments se révélèrent efficaces. 27 avril 1438, dans Pez, Thésaurus anecd. nov., t. vi, 3e part., p. 232.

Sur ces entrefaites, Eugène IV avait transféré à I-’errare le concile qu’il avait convoqué à Elorence et Cesarini l’avait rejoint, avec d’autres membres influents de la minorité bàloise. Plein d’admiration pour le cardinal d’Arles, devenu le chef de l’assemblée, -Eneas suivit avec intérêt l’action de Louis Aleman qui devait aboutir bientôt au vote de la déposition du pape. La peste noire, après avoir frappé plusieurs de ses amis, l’atteignit à son tour. Ce fut pour lui, qui menait une vie dissolue, l’occasion d’une conversion sincère, bien qu’assez éphémère. Le bruit de sa mort lui fit perdre son bénéfice milanais, mais le concile lui octroya, en compensation, un canonicat de Trente et le nomma lui-même collateurde bénéfices. Haller, Concil. Basil.. t. vi a, p. 373 et 613. De cette époque date le beau discours sur la réforme du clergé et le choix des évêques, où il s’écrie avec indignation : « Nous laissons distribuer la sainte eucharistie par des prêtres dont nous ne souffririons pas la présence à notre table. » Haller, Eine Rede des Enea Siluio Piccolomini, Rome, 1900, p. 90. Conscient, sans doute, de sa propre indignité, il refusa l’offre que lui faisait le concile de l’admettre en un jour aux ordres mineurs, au sous-diaconat et au diaconat pour qu’il put prendre part à l’élection du nouveau pape. Comrnentarii, p. 813. Il se contenta d’assister à titre de « cérémoniaire » au conclave d’où Amédée de Savoie sortit pape sous le nom de Félix V (5 nov. 1439).

-Eneas devint alors le secrétaire de l’antipape. Non content de rédiger les bulles pontificales, il écrivit, pour défendre l’assemblée de Bâle, un Libellus dialogorum de concilii auctoritate (1440) et composa un mémoire pour la diète qui se tint à Francfort en 1442. C’est ici que, dans des circonstances demeurées obscures, il reçut des mains de l’empereur la couronne des poètes. On l’a accusé de n’avoir pas hésité, pour obtenir ce titre envié, à seconder les vues ambitieuses de Gaspard Scblick en rédigeant pour lui de fausses lettres de noblesse. Thea Buyken, Enea Siluio Piccolomini, p. 111°). Mais il ne nous paraît pas nécessaire de faire intervenir ce personnage, qui venait précisément d’être remplacé à la chancellerie impériale par l’évêque de Trêves, Jacques de Sierck, dont la sympathie pour /Eneas est bien connue. La bienveillance de l’évêque Sylvestre de Chiemsce et l’influence du nouveau chancelier suffisent, à plus forte raison, à expliquer que Frédéric III ait manifesté le désir de faire du prince des poètes un secrétaire de sa chancellerie.

A la ruur impériale.

L’idée de se fixer en paj s

germanique ne souriait guère à l’humaniste. /Eneas tint du moins à obtenir l’assentiment de Félix V et ne quitta la curie pontificale qu’après s’être ménagé

une possibilité de retour. Bulle du 29 octobre I 112. Cf. Pérouse, Le cardinal Louis Aleman, p. 425, n. l. Il allait trouver à Vienne le chemin de la fortune. Ce ne fut pas, toutefois, sans avoir d’abord beaucoup souffert dans un milieu et des fonctions dont il nous a tracé dans son De curialium miseriis un tableau peu flatteur. On a exagéré son influence politique à la cour impériale. Son rôle se bornait, en somme, à revêtir de la splendeur de son style les idées et les plans de Gaspard Schlick qui n’avait pas tardé à retrouver ses fonctions. Cf. Hufnagel, Kaspàr Schlick als Kanzler Eriedrichs III., Inspruck, 1901. Cependant, le Pentalogus qu’il rédigea au commencement de 1443 montre qu’il continuait de souhaiter une intervention de l’empereur en Italie.

Le voici au tournant de sa vie. Une grave maladie venait de l’amener à pleurer ses égarements, dans une émouvante Hymne sur la passion ; et il avait fait ses adieux à la vie mondaine, dans une nouvelle intitulée Lucrèce et Euryale, quand s’ouvrit à Nuremberg la diète du 21 mai 1444. A côté des délégués d’E)ugène IV et de Félix V, /Eneas y assista comme représentant du roi des Romains. Il proposa, pour mettre fin au schisme, la convocation d’un IIIe concile à Constance, et fit décider que des ambassades seraient envoyées pour le préparer, à Rome et à Bàle. Luimême conduisit la première. Arrivé à Rome, il se fit absoudre de l’excommunication par deux cardinaux, et il présenta à Eugène IV, en même temps que la proposition de Frédéric III, ses propres excuses pour ses erreurs passées. Comrnentarii, p. 10. A ce propos, Voigt, Haller, Kraus, Hofmann, Brockhaus, etc., ont prononcé le mot de trahison ; Weiss, Pastor, etc., ont parlé de conversion. La réalité est plus simple : il avait simplement compris, après Capranica, Cesarini, Nicolas de Cuse, et beaucoup d’autres, que l’unité de l’Église ne pouvait se réaliser qu’autour du pape.

Eugène rejeta le projet d’un IIIe concile, mais voulut continuer les pourparlers avec Frédéric. Les efforts conjugués de son légat, Jean Carvajal, et d’/Eneas Sylvius achevèrent, de gagner l’empereur à la cause du pape (février 1446). C’est alors qu’/Eneas reçut, à Vienne, les ordres sacrés et devint secrétaire apostolique. Survint la déposition par Eugène des archevêques de Cologne et de Trêves (9 févr. 1446). —Eneas sut habilement conjurer l’orage provoqué par cette mesure en prodiguant au pape ses avis éclairés, en gagnant l’archevêque de Mayence et quelques autres personnages, puis en rédigeant, à la diète de Francfort, les Avisamenla des princes électeurs, de manière à les rendre acceptables pour Frédéric et à enlever à Félix V son dernier espoir de voir la neutralité allemande prendre fin en sa faveur. Quand les messagers porteurs des conditions de paix furent reçus en audience par le pape (7 janv. 1447), il prononça un discours qui recueillit l’approbation unanime, Mansi, t. xxxi, col. 25-34, et il joua ensuite un rôle décisif dans les négociations qui aboutirent à l’accord appelé le concordat des princes (5-7 févr. 1447). Eugène IV eut le temps, avant de mourir, de le récompenser en lui attribuant l’évêché de Trente, puis, l’annonce de la vacance ayant été prématurée, de le nommer sousdiacre du pape.

5° Évêque de Trieste, puis de Sienne. —.Eneas remplit les fonctions (le diacre au couronnement de Nicolas Y, 19 mars, et fut définitivement nommé par lui au siège de Trieste, le 19 avril 14 17. Il se rendit ensuite au congrès d’Aschaflenbourg (12 juillet), à Cologne, où il adressa au recteur de l’université une Epistola retractationis (13 août), et a Milan sur laquelle Frédéric ; i : ri t des prétentions. Il fut sacré à Vienne par le cardinal de Saint-Ange et alla prendre possession de son siège. Ses fréquentes absent es de la cour impé-