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PIC DE LA MIRANDOLE JEAN]

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    1. PIAGGIO Jean##


PIAGGIO Jean, frère mineur capucin de la province « le Gênes (fin du xviie et débul « lu xviiie siècle). Il est l’auteur « le Deflnitiones omnes in universam theologiam moralem ex celebrioribu’s auctoribus nec non quæstionibus variis elucidatse. Cet ouvrage manuscrit, ((imposé en 1710, est conservé dans la bibliot hèque du couvent des capucins de Sestri Ponente, de la province de Cènes. Ce travail, rédigé par ordre alphabétique, esl divisé en cinq pallies, dont chacune compte un millier de pages. Composé avec soin, cet ouvrage n’est pas dénué de valeur et pourrait être très utile aux moralistes.

Francesco Zaverio Molfino, <). M. C, / cappuccini genovesi, Note biografiche, t. i, Gênes, 1912, p. 54-55.

Am. Teetæht.

1. PIC DE LA MIRANDOLE Jean, naquit le 24 février 1463, d’une famille importante, en possession du château de la Mirandole, dans le duché de Modène, et du comté de Concordia, dont l’empereur Sigismond lui avait conféré l’investiture en 1414. Son père était Jean-François Pie de la Mirandole, sa mère, Giulia de’Bojardi. Des prodiges, raconte son neveu, marquèrent sa naissance. Lui-même fut, de bonne heure, considéré comme un prodige. Doué d’une grande beauté physique, d’une intelligence vive, d’une curiosité universelle, d’une ardeur étonnante pour l’étude, il représentera l’un des types les plus sympathiques de cet humanisme italien du xve siècle, héritier direct de Dante et de Pétrarque, en passant par saint François d’Assise, sainte Catherine et Savonarole, tout fait d’amour et de liberté, cherchant sa voie dans l’harmonie de la civilisation antique et de la civilisation chrétienne, dans la conciliation des droits de la raison avec l’autorité de la foi, et qui doit trouver son épanouissement au siècle de Léon X, en de grands artistes comme Michel-Ange et Raphaël. Ce dernier nous en laissera la plus belle expression dans l’École d’Athènes faisant face à la Dispute du Saint-Sacrement.

Jean Pic de la Mirandole renonce, en faveur de ses frères, à ses droits féodaux, étudie d’abord la jurisprudence à Bologne, puis abandonne cette étude pour se donner tout entier à la philosophie et à la théologie. Il ira s’asseoir sur les bancs des principales universités d’Italie et de France, apprendra, en outre, le latin, le grec, l’hébreu, le syriaque et l’arabe. Il avait acquis, d’un juif de Sicile, seize manuscrits en langue hébraïque, où il crut trouver, sur la foi de son vendeur, un texte mystérieux écrit par ordre d’Esdras, et contenant tous les secrets de la religion et de la nature. Pic, pendant longtemps, crut à la Cabale, et l’on n’a pas de peine à en retrouver les rêveries jusque dans ses théories philosophiques. Comme son maître et ami, Marsile Ficin, il oppose Platon à Aristote, le grand prophète de cette scolastique devenue alors trop souvent un fatras sans âme et un verbiage sans objectivité. Mais il était surtout un éclectique, et cet humaniste représente, à certains égards, une réaction contre les excès mêmes de l’humanisme. N’oublions pas qu’il fut un dirigé de Savonarole et que celui-ci l’aima au point de prononcer son éloge funèbre. Il étudia les sources hébraïques, y compris le Talmud, et n’hésita pas à prendre de la scolastique ce qu’elle avait de meilleur ; il professait une grande admiration pour saint Thomas, mais surtout, comme ses amis néoplatoniciens, pour saint Augustin.

Son Heptaplus est une curieuse exposition mysticoallégorique de la création, où l’on retrouve un peu trop du Sepher iezeroth de la Cabale, avec de superbes envolées, comme celles du VIIe livre, sur le souverain Bien : le vrai bonheur, pour l’homme, n’est pas en lui-même, mais en Dieu, son principe, son bien, sa fin. L’homme n’y peut atteindre par lui-même, mais il y doit être tiré et tiré, comme dit le Chiist, par le

Père. etc. Dans le De ente et uhû, il expose à la suite des passages du Pentateuque, de Platon et d’Aristote. Enfin, ce cabaliste prit position contre l’astrologie, si en vogue de son temps. Ses Dispu.tation.es, parues en

I 195, marquent le début d’une nouvelle période dans l’histoire de l’esprit humain. Chose curieuse, dans ce traité il adopte les formules des Sommes scolastiques.

l’ic est surtout connu par son fameux déli de 1486.

II était revenu à Rome, et y fit paraître un in-folio intitulé Conclusiones philosophicse, cabalisticse, ’theologicæ, etc., contenant 900 thèses qu’il s’engageait à soutenir contre tout contradicteur. Il promettait de payer les frais du voyage à quiconque voudrait venir prendre part à la discussion publique. Innocent VIII crut devoir condamner treize de ces thèses comme hérétiques et interdit la soutenance. Voir les indications nécessaires dans Denzinger-Bannwart, Enchiridion, n. 736. En réalité, cette masse indigeste révèle surtout la curiosité universelle et l’érudition du jeune protagoniste, autant que les « à peu près » de la science de son temps. Plus tard, Alexandre VI l’absoudra de la note d’hérésie ; et Pic se défendra en écrivant Y Apologia, où se trouvent à l’occasion des propositions attaquées ou condamnées, de vrais traités de théologie, dans lesquels l’auteur se réclame souvent de l’autorité de saint Thomas et des pins insignes docteurs de la scolastique. A noter une discussion approfondie sur l’éternité des peines dues au péché morteL

Dépité de son peu de succès, il avait fait le voyage de Paris ; mais il revint à Florence, où il faisait partie de l’Académie et jouissait de la faveur de Laurent de Médicis. Il y fit un commentaire sur la Canzona di amore de Benivieni, subtile et parfois charmante exposition de l’amour selon Platon. Lui-même avait cédé aussi, étant plus jeune, au démon poétique et avait chanté l’amour en cinq livres d’élégies latines qu’il traduisit en italien. Toute cette production poétique fut brûlée par lui religionis causa, lors de sa retraite dans la solitude de Corbula, où il mena, en grand chrétien, une vie toute d’étude, de pénitence et de piété. Il ne reste de la muse de Pic de la Mirandole que quelques Sonetti publiés par Ceretti à l’occasion de son quatrième centenaire, en 1894. Enfin, nous avons ses Lettres (publiées à Paris en 1499) qui nous renseignent sur ses préoccupations intellectuelles, sessentiments intimes, la beauté de son âme profondément religieuse, ses bonnes œuvres et ses relations avec les plus grands parmi ses contemporains. Il mourut à Florence, à l’âge de 31 ans, le 17 novembre 1494, deux mois après Politien, le jour même où Charles VIII y faisait son entrée. Frère Jérôme Savonarole, qui l’avait revêtu, sur son lit de malade, de l’habit dominicain, lui donna la sépulture parmi ses frères de Saint-Marc et fit son éloge public dans l’église de Sainte-Reparata. Sa Vie et ses œuvres complètes ont été publiées par les soins de son neveu, Jean-François, héritier de sa pensée, et qui fut, lui aussi, une des belles figures del’humanisme florentin. (Voir art. suivant.) , Œuvres. — Conclusiones DCCCC dialccticæ, morales, physieæ, mathematiese, publiée dispulandæ, s. 1. n. d., in-4° (Rome) ; Apologia, Rome, 1487 ; Heptaplus de septiformi sex dierum Geneseos enarralione. Florence, 1 196 ; Disputation.es adversus astrologos, Bologne, 1495 ; De ente et uno ; Commenti sopra una canzone d’amore di Girolamo Benivieni, Venise, 1550 ; Aurese epistolœ^ Paris, 1499 ; Opéra omnia, Bologne, 1495 et 149C ; Paris, 1517, 1557 et 1601. Cette dernière édition est la meilleure.

Vita, par son neveu Jean-François, en tête des Opéra omnia ; Biografla par Ceretti, en tête des Sonetti inediti…, Mirandola, 1894 ; V. de Giovanni, Giovanni Pico delta Mirandola, Palerme, 1894, et Mirandola, 1899 ; Léon Dorez » Lettres inédites de Jean Pie de la Mirandole (1482-1492)>