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    1. PHOTIUS##


PHOTIUS. LE PATRIARCHE, CONCLUSION

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amené à faire une démarche contraire et à écrire à Rome pour demander que l’on envoyât de là-bas XeipoTovtocv orÙToS (l’ordination de qui* ? de Photius ? des photiens ? de lui-même ?) et la permission de communiquer avec eux des photiens ?). Mais, à cette demande, le pape Jean IX demeura sceptique, se demandant si l’on ne se moquait pas de lui et, finalement, il répondit dans les termes suivants. Suit la lettre de .Jean. Jaffé, n. 3522, qui est explicite à souhait. Le pape déclarait y reconnaître dans leur ordre Ignace, Photius, Etienne. Antoine (et doue aussi les ordinations faites par eux). Texte dans llardouin. t. v, eol. 1 1 15 E : Mansi. t. xvi, col. 452. Voir l’art. Jkan IX. Il est curieux de lire, immédiatement à la suite de cette lettre, la démonstration du pamphlétaire qui veut prouver, contre toute évidence, qu’en définitive le pape ne reconnaissait ni la valeur de l’ordination de Photius. ni celle des consécrations faites par lui. Ce n’est pas perdre son temps que de lire cette déclamation où abondent les paralogismes ; on se rendra compte par là de l’état d’esprit qui régnait dans les milieux intransigeants, fidèles au souvenir d’Ignace. Or. il est bien digne de remarque que c’est par l’intermédiaire de ces milieux que nous a été transmise la grosse niasse des documents relatifs au VIIIe concile, et que la Vie d’Ignace par X’icétas reflète cet état d’esprit. C’est dire de quelles précautions doit s’entourer l’historien qui étudie l’affaire photienne. On trouvera des suggestions intéressantes, mais qu’il faut savoir discuter, dans l’art, de Papadopoulos-Kérameus cité plus haut, Byzunt. Zeitschr., t. viii, 1899, p. 651 sq. ; voir surtout la note 3 de la p. 651.

Comment se termina ce schisme véritable qui déchira l’Église de Contantinople pendant quelques années encore ? Il n’est pas facile de le dire. Voir, pour l’essentiel, l’art. Nicolas le Mystique. Ceci, du reste, n’appartient plus à l’histoire de l’affaire photienne elle-même.

V. Conclusion. Signification générale de l’épisode de Photius. — Au terme de cette étude où l’on a voulu surtout faire l’histoire du conflit, il importe de fixer la signification générale de l’épisode que l’on vient de narrer. C’est à l’article Schisme d’Obient qu’il conviendra de l’encadrer dans les grandes lignes de l’évolution générale qui a détaché de Rome les Églises de langue grecque.

1° L’affaire plu, tienne n’est qu’un épisode. — A bien des reprises, depuis le v 1’siècle, la communion avait été rompue entre Rome et Constanlinople, et ces ruptures avaient parfois duré fort longtemps. Que l’on songe au schisme acacien, à la crise monothélite, à la très longue crise de l’iconoclasme. En comparaison de ces ruptures, l’épisode photien est de très courte durée. Somme toute, la communion ne fut suspendue qu’entre 863 et 867, le paroxysme étant marqué par le concile tenu cette année 867 à Constantinople par Photius. Quand celui-ci est rétabli, c’est finalement l’accord avec Rome, et la deuxième déposition, en 886, n’est pas le fait d’une action pontificale. Quelque obscurité qui règne sur la période comprise entre la mort de Jean X’1 1 1 et cette deuxième déposition, on peut dire que, durant ces quatre années, il n’y a pas eu d’éclat. Entre la querelle de Photius avec Nicolas I er et Adrien II et celle de Michel Cérulaire avec Léon IX. d’autres difficultés surgiront. En 915. lors de l’affaire de la tétragamie, le pape sera rayé une fois de plus des diptyques de Constantinople (vers 915) ; les frictions ont été considérables vers l’an mille, a l’époque où Basile II le Bulgaroctone entre en lutte avec les Otto nides pour la possession de l’Italie. Il semble bien que, à l’avènement de Michel Cérulaire, les relations étaient inexistantes entre les deux capitales religieuses. Voir l’art. Michel Cérui wr.i. col. 1677.’fout ceci ten drait à montrer que la rupture du milieu du i’siècle ne fut, en somme, qu’un épisode très bref et sans portée considérable. Pourtant, l’importance qui, au moins à partir du xiir siècle Unissant, a été attachée de part et d’autre à l’affaire photienne invile à réformer ce jugement trop sommaire.

2° L’épisode photien eut de très graves conséquences. - Outre la question particulière qu’il souleva, il lit. ré fléchir et l’Occident et l’Orient sur le problème de la constitution de l’Église. Ce problème est double : quels sont les rapports entre l’Église et l’État ? quels sont les rapports entre les différentes Églises ? Sur ces deux points, au milieu du ixe siècle, s’affrontent les idées de l’Orient et de l’Occident.

1. Les conceptions occidentales.

Le passage sur le trône pontifical du pape Nicolas I er a fait prendre plus nettement conscience à la papauté de l’indépendance de l’Église, d’une part, et du rôle unificateur de l’Église romaine, d’autre part.

La disparition de Charlemagne, la faiblesse de ses successeurs amènent les papes à concevoir plus nettement le pouvoir ecclésiastique comme coordonné au pouvoir civil, bien plus, comme exerçant sur lui un certain contrôle dans les questions d’ordre moral. Ce n’est plus, comme sous Charlemagne, l’empereur, le souverain qui, dans les affaires ecclésiastiques, juge les questions de personnes ou de doctrines ; l’Église entend bien dirimer elle-même et les questions ecclésiastiques et les questions politiques qui confinent à la morale. Le Xe siècle, à la vérité, amènera de ces idées une éclipse presque complète ; mais, dès le second tiers du xie siècle, les précurseurs de la réforme grégorienne les feront revivre.

De même feront-ils revivre les conceptions de Nicolas I effet de ses successeurs immédiats sur le rôle de Rome comme centre de l’Église universelle. Sans doute, le droit de regard de Rome, la sollicitude) du pape sur toute la chrétienté, a été connu et pratiqué de date immémoriale. Quand Anastase le Bibliothécaire rédige, au nom de Nicolas I er ou d’Adrien II, les lettres pontificales relatives à l’affaire photienne, il lui arrive plus d’une fois de citer amplement les textes des anciens papes qui expriment les mêmes idées qu’il veut inculquer aux gens de Contantinople. Il est incontestable, r.éanmoins, que des papes comme Nicolas I er, Adrien II, Jean VIII ont du rôle souverain de l’Église romaine, une conception plus arrêtée que les pontifes contemporains de Pépin le Bref et de Charlemagne. Et leur conception n’est pas seulement théorique ; les rapports de Borne avec les évêques latins témoignent qu’elle vise sans cesse à s’inscrire dans la pratique. La tendance devait naître, dès lors, pour la curie romaine d’étendre, de manière de plus en plus fréquente, à d’autres Églises que l’Église latine, aux autres patriarcats, l’application de cet incontestable droit de regard.

2. Les conceptions orientales.

A l’époque de Photius, et partiellement sous son action, les idées orientales sur les deux mêmes points se fixent, mais d’une manière toute différente.

La fusion entre l’Église et l’État s’était réalisée de très bonne heure dans l’empire d’Orient. L’idée remontait à Constantin ; elle avait pris corps sous Justinien ; à tout instant, elle s’était manifestée, aussi bien dans les questions dogmatiques que dans les questions de personnes. Bien n’était jamais venu la contrecarrer sérieusement.

Le triomphe de l’orthodoxie, sous Irène d’abord, sous Théodora ensuite, n’avait été obtenu, somme toute, que par des coups d’État. A partir de 843, les « estes analogues se répètent : déposition d’Ignace en 858, de Photius en « 67, retour de Photius. ci. S7X, deuxième déposition de Photius en 886 et nomination d’Etienne I er, nomination directe de Théophylacte en