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PHOTIUS. LES SÉQUELLES DE LA CRISE


(oui. je puis l’appeler mien, pour bien des raisons et parce que, plus que tous les autres, il a soutenu mes affaires), ce Jean, donc, viril par l’esprit, viril par la piété, viril dans sa haine de l’injustice, et de l’impiété, capable de manier a la fois les lois saintes et celles de la politique, habile à tout remettre en place, celui-là, donc, par ses légats, a souscrit les prescriptions du concile (de 879-880) relatives au symbole. » Photius parlerait-il ainsi d’un pape qui, à sa connaissance, aurait déchiré les stipulations d’août 879 et les décisions du concile de Constantinople ?

IV. Les séquelles de la crise photienne.

Ainsi donc, la crise ouverte en 808 semblait terminée en 880, à la satisfaction des deux Églises de Rome et de Constantinople. Comment se trouva-t-elle prendre, dans les années suivantes, une nouvelle virulence ? Comment finit-elle par aboutir à une nouvelle déposition de Photius ? Comment se prolongea-t-elle ensuite en des luttes acharnées qui durèrent au moins vingt ans ? Sur tous ces points, nous sommes dans l’incertitude. Les documents relativement nombreux que nous avions sur la période 868-880 nous abandonnent tout à coup et c’est à l’aide de récits sommaires, de pièces officielles transmises par des intermédiaires peu sûrs que nous devons reconstituer, et de quelle manière conjecturale, la liquidation de cette longue aventure. — 1° Rome et Photius jusqu’à la deuxième déposition de celui-ci. 2° Rome et les partis constantinopolitains nés de l’affaire photienne.

I. ROME ET PBOTIUS JUSQU’A LA DEUXIÈME DÉPO-SITION DU PATiu arche. — 1° Attitude des papes successifs. — Le pape Marin (décembre 882-avril 884) arrivait au trône pontifical dans des conditions assez irrégulières, comme on l’a expliqué à son article. Nous avons vu aussi, col. 1582 et col. 1593, qu’à un moment donné il avait encouru, à Constantinople, la colère de Basile I er. Il ne semble pas qu’en dernier lieu, malgré la part prépondérante que Marin avait eue au VIIIe concile, Photius eût conservé contre lui de l’animosité. Il s’est conservé une lettre, d’ailleurs insignifiante, que le patriarche lui adressa, alors qu’il était évêque de Cère. Ci-dessus, col. 1548. Si. comme nous pensons l’avoir prouvé, Photius était encore en communion avec Rome à la mort de Jean VIII, Marin aurait dû lui envoyer sa synodique. L’a-t-il fait ? Nous ne saurions le dire. Mais, comme nous allons le voir bientôt, il est certain qu’il ne fut pas reconnu comme pape par l’empereur Basile I er. Photius fut-il pour quelque chose dans cette attitude du souverain ? Faute de documents, il est impossible de répondre à ces diverses questions. Il nous paraît cependant que, pendant les 16 mois du pontificat de Marin, la communion fut interrompue entre Rome et Constantinople.

Le pape Adrien III (avril 884-août 885) avait assisté au concile romain de 879 qui avait reconnu Photius. Celui-ci parle d’une lettre synodique qui lui fut envoyée par Adrien. Mystagogia, n. 89, P. G., f en, col. 381 ; cf. Jaffé, n. 3399. Hergenrother reconnaît qu’il n’est pas possible de considérer cette donnée comme sans fondement. Photius, t. ii, p. 662. C’est sans doute la lettre pontificale qui donna à Basile I er l’occasion d’écrire à Rome une lettre où il prenait vivement à partie le pape Marin. Cette lettre ne s’est pas conservée, mais elle nous est connue par la réponse qui fut adressée de Rome, en 886, par le successeur d’Adrien, Etienne V. Dôlger, n. 505, considère la lettre Impériale, comme adressée à Marin lui-même.

Le pape Etienne V (ou VI) 1885-891) répondit, en effet, à ce document, Jade, n. 3403 ; c’est la 6e pièce du dossier formant la IIIe partie des actes du Y III" concile. Encore qu’elle ne parle pas de condamnation à l’endroit de Photius. cette lettre ne laisse pas de constituer une manifestation très grave contre le patriarche.

Etienne V commence par reprocher, de manière véhémente, au basileus son ingérence dans les alTaires de l’Église. Le souverain n’a pu agir ainsi que sous une influence étrangère : il n’avait, en effet, aucune raison à objecter à l’élévation de Marin. Que ceux qui prétendent que Marin a été évêque avant d’être pape le prouvent (raisonnement bien étrange sous la plume d’un pape qui ne pouvait ignorer le curriculum vitæ de Marin ! Mais tout est étrange dans les pièces de ce dossier !). A supposer même qu’il l’eût été et que les canons, ce qui n’est pas, interdisent cette translation, la multitude des Pères, leur autorité, leur jugement pouvait l’établir sur le premier siège. Le basileus se plaint que l’Église romaine ne communique pas davantage avec Constantinople ; c’est que Constantinople n’a pas de patriarche. Si ce n’était par considération pour l’empereur, Rome aurait procédé plus sévèrement contre Photius. — Ne pressons pas trop les termes de cette lettre, dont on aimerait à pouvoir collationnerLi teneur originale avec la traduction grecque que fournit l’excerpteur des actes conciliaires. Quoi qu’il en soit, d’ailleurs, ce ne fut pas Basile qui reçut de Rome cette lettre ; mort le 29 août 886, il avait été remplacé par son fils (putatif) Léon VI, celui que l’on appelle le Sage ou le Philosophe. Voir Léon le Sage, t. ix, col. 365.

La deuxième déposition de Photius.

Un des

premiers actes du nouveau souverain avait été de se débarrasser de Photius. Pour quelles raisons, il est difficile de le dire. D’une manière générale, Léon s’inscrivit en vive réaction contre les actes de son père légal, Basile I er (Léon était, en réalité, le fils de Michel assassiné par Basile) ; on comprend assez qu’il ait voulu se débarrasser de celui qui, depuis 876 au moins, avait eu tant d’influence sur l’empereur défunt. L’amitié étroite qui unissait Photius avec Théodore Santabarénos, lequel, du vivant de Basile, avait causé de sérieux ennuis à Léon, dut aussi être pour quelque chose dans la décision du basileus. N’y avait-il pas aussi le désir de faire une place à son jeune frère Etienne ? Qui le dira ? Il est curieux d’ailleurs que la Vita Euthymii, n, 22, ne donne aucune raison du débarquement de Photius qu’elle raconte avec quelques détails. Voir édition C. de Boor, Berlin, 1888, p. 5.

Quoi qu’il en soit, un procès criminel fut intenté à Photius et à Santabarénos, qui furent accusés d’avoir voulu susciter un compétiteur à Léon. Théodore fut condamné à perdre les yeux et ultérieurement expédié à Athènes. Quant au patriarche, il ne put être convaincu de crime politique ; mais sa déposition resta un fait acquis ; on l’autorisa à se retirer dans un monastère. C’est après ces événements, mais sans que l’on puisse préciser aucune date, qu’il composa la Myslagogie. Si, comme l’ont pensé quelques-uns, la Mijstagogie fait allusion, n. 88, col. 37 7 B, au concile « cadavérique » qui condamna, à Rome, le feu pape Formose, elle serait postérieure à 897 et peut-être faudrait-il faire vivre Photius jusqu’aux premières années du xe siècle. En tout cas, l’absence de tout témoignage sur son activité, après 886, montre bien que sa retraite fut complète et qu’il ne tenta pas de se mêler à l’agitation politique et religieuse qui continua longtemps après sa déposition. Sur la date « le la mort de Photius, voir Lapôtiv, dans les Études, t. lui, 1891, p. 252 sq ; et Jean VIII, p. 69. Cf. Papadopoulos Kérameus, ’O — xrp. <ï>(i’mo< ; lue - : <T7 ; p ôtvioç, dans Byzant. Zeitschr., t. viii, L899, p. 649 sq.

II. ROME ET LES PARTIS CONSTANT/ AOI’OLITAINS

i / DE L’AFFAIRE PHOTIENNE. -Pour remplacer Photius, Léon VI avait fait choix de son jeune frère Etienne, qui Dit’consacré à Noël de 886 par Théo-. phane de Néocésaréc. Une fois de plus, le lait du prince se substituait au jeu normal des institutions