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    1. PRÉDESTINATION##


PRÉDESTINATION. S. THOMAS, ARGUMENTS SCRIPTUUAIUES

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ordinantur in Deo et in Iwmine. In homine mini electio prsecedil dileclionem, voluntas enim hominis movelw

ad amiiiidum ex bono quod in re aniata considérai, ratione cujus ipsam præeligit altcri et præelectæ suum onwrem impendil. Mais, quoi qu’en aient (lit les pélayicus et les semi-pélagiens, une telle dépendance et passivité ne peut se trouver en Dieu ; aussi saint Thomas continue-t-il : Scd volunlas Dei est causa omnis boni quod est in creaiura et ideo bonum, per quod una creatura pnvfertur clteri per modum electionis, conseguitur voluntatem Dei, qu.se est de bono illius, quæ pertinel ad rationem dileclionis. Et donc, conclut saint Thomas : « La prescience des mérites ne peut être la raison de la prédestination, puisque les mérites prévus sont elïets de la prédestination ; au contraire, les démérites, dont Dieu ne peut être nullement cause, sont la raison de la damnation Ce que saint Thomas trouve exprimé dans la parole d’Osée, xiii, 9 : Perditio lua ex te Israël, lantummodo in me auxilium luum.

Tel est le mystère que saint Thomas, après saint Augustin, trouve exprimé par saint Paul ; il ne cherche pas à diminuer son obscurité, ce serait diminuer son élévation. Mais il rapporte les objections de l’humaine raison prévues par saint Paul et il souligne ce qu’il y a de plus caractéristique dans la réponse de l’Apôtre.

L’objection faite par les pélagiens et les semipélagiens contre saint Augustin est celle qui se lit déjà dans l’épître aux Romains, ix, 14 : « Que dirons-nous donc ? Y a-t-il de l’injustice en Dieu ? » Y a-t-il injustice de la part de Dieu à distribuer si inégalement ses dons à des hommes égaux par nature ?

Saint Thomas remarque que saint Paul n’a pas répondu à cette objection en ayant recours à la prescience des mérites des élus, comme si elle était la raison de leur prédestination. Il a répondu en restant dans le mystère révélé au lieu de descendre au-dessous de lui : Xumquid iniquitas apud Deum ? Absit. Moysi enim dicil : « Miserebor cujus misereor et miserieordiam præstabo cujus miserebor. » Igitur non est oolenlis, neque currenlis, sed miserenlis est Dei… Ergo cujus vull miseretur, et quem vull indural. Saint Paul, remarque saint Thomas, répond par une affirmation nouvelle du principe de prédilection qu’il trouve révélé dans Ex., xxxiii, 19, en cette parole de Dieu à Moïse : « Je ferai miséricorde à qui je veux faire miséricorde, et j’aurai compassion de qui je veux avoir compassion. » Ainsi, l’élection ne dépend ni de la volonté ni des efforts, mais de Dieu qui fait miséricorde.

Saint Thomas, à propos des ꝟ. 15 et 16, dit de nouveau : l’effet de la prédestination ne peut être la raison de celle-ci ; or, le bon usage de la grâce ou le mérite est l’effet de la prédestination ; donc le mérite prévu ne peut être raison de la prédestination ; cette raison n’est autre que la seule volonté de Dieu. Or, continue-t-il, il n’y a pas à parler de justice ni d’injustice dans les choses de pure miséricorde, par exemple si, rencontrant deux pauvres, nous donnons à l’un et pas à l’autre ; ou si, de deux personnes qui nous ont également offensé, nous pardonnons à l’une et exigeons une réparation de l’autre. De même à l’égard des pécheurs, Dieu est miséricordieux envers celui qu’il relève, il est juste envers celui qu’il ne relève pas ; il n’est injuste envers personne. Saint Thomas conclut donc que, selon saint Paul, la prescience des mérites ne peut être cause de la prédestination, et il l’entend de la prédestination à la gloire, la seule digne de ce nom, car la prédestination à la seule grâce est commune aux élus et a bien des réprouvés ; de plus, les mérites qui suivent la justification, étant l’effet de la prédestination propre aux élus, ne peuvent être cause de celle-ci. La pensée de saint Thomas est des plus claires, elle sera encore plus nettement exprimée dans l’article de la Somme dont nous donnons ici les preuves.

Il termine le commentaire du c. ix de l’épître aux

Romains par l’examen d’uni’dernière objection que se fait saint Paul. 19 : « Tu me diras : De quoi donc-Dieu se plaint-il encore ? Car qui peut s’opposer à sa volonté ? » Saint Thomas entend ainsi l’objection ; Comment reprocher au pécheur de n’avoir pas fait ce qui n’était pas en son pouvoir : frustra requiritur ab aligna quod non est in ejus potestate. C’est l’objection bien connue ex insuffleienlia auxilii divini.

La réponse à cette difficulté est que Dieu ne commande jamais l’impossible, qu’il rend le salut réellement possible à tous ceux qui ont à suivre ses commandements ; en ce sens il veut les sauver tous, comme il est dit I Tim., ii, 4 ; mais, d’autre part, nul ne serait meilleur qu’un autre, s’il n’était plus aimé par Dieu. Et c’est, par une affirmation nouvelle du principe de prédilection que saint Paul répond, ꝟ. 21-23 : « Mais plutôt, ô homme ! qui es-tu pour contester avec Dieu ? Est-ce que le vase d’argile dit à celui qui l’a façonné : Pourquoi m’as-tu fait ainsi ? Le potier n’est-il pas maître de son argile pour faire de la même masse un vase d’honneur et un vase d’ignominie ? Et si Dieu, voulant montrer sa colère (sa justice) et faire connaître sa puissance, a supporté avec une grande patience des vases de colère, disposés à la perdition, et s’il a voulu faire connaître aussi les richesses de sa gloire à l’égard des vases de miséricorde, qu’il a d’avance préparcs pour la gloire… (où est l’injustice) ? »

Cette réponse de Paul à l’objection confirme tout ce qui précède ; de même ce qu’il ajoute, c. xi, 1-8 : « Est-ce que Dieu a rejeté son peuple ? Loin de là ! … (Comme au temps d’Elie), Dieu s’est réservé certains selon un choix de grâce. Or, si c’est par grâce, ce n’est plus par les œuvres : autrement, la grâce cesse d’être une grâce. »

Dans son commentaire sur la fin du c. ix de cette épître aux Romains, à propos des ꝟ. 21-23, saint Thomas remarque une fois de plus : Quidquid boni habel hemo débet boniluti divinæ quasi principali agenti adscribere (cf. Is., lxiv, 8 : kunc, Domine, pater es tu, nos vero lulum, el ficlor noster tu et opus manuum luan.m < mnes nos). Si vero Deus heminem ad meliora non premoveut, sed, in sua infumilate cum dimillens, dejnilal cum ad infimum usum, nultam ci facil injuriant, ut possit juste de Deo conqueri. Où est l’injustice, si Dieu permet dans le mauvais larron le péché d’impénitence finale dont il n’est nullement cause, et s’il relève l’autre pour faire connaître en lui les richesses de sa gloire ?

Résumé de celle argumentation scripluraire. — Dans la Somme théologique, I a, q. xxiii, a. 5, corp. et ad 3um, saint Thomas ne fait que résumer en l’ordonnant ce qu’il a dit dans son Commentaire sur l’épître aux Romains, c. ix. Le titre de l’article est : Ulrum præscientia merilorum sil causa prædestinationis, c’est-à-dire, comme il est expliqué au début du corps de l’article : Ulrum Deus pneordinaverit se dalurum cffeetuin prœdestinationis <dicui propler mérita aliqua. Cet article contient la même doctrineque celle qui est exposée dans le Commentaire sur les Sentences, 1, dist. XLI. q. i, a. 3, et dans le De veritale, q. vi, a. 2, mais elle s’exprime ici d’une façon à la fois plus simple, plus élevée et plus précise. Selon son habitude, dans le status quæstionis, saint Thomas pose trois difficultés, dont la principale est celle même qui est formulée par saint Paul, Rom., ix, 14 : Numquid iniquitas apud Deum ?

Il donne d’abord une réponse générale négative (arg. sed contra) : L’Apôtre écrit à Tite, m.."> : Ce n’est pas à cause des œuvres de justice que nous avons fuites, mais selon sa miséricorde que I lieu nous a sauvés. ( >r, comme il nous sauve de fait, il nous a prédestinés au salut. La prescience des mérites n’est donc pas cause ni raison-dé la prédestination. Il s’agit de la prédesti nation telle que saint Thomas l’a définie a l’article 1. c’est-à-dire de la prédestination a la gloire.