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photius. la reconnaissance : par.je an VIII

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Santabarénos, tout dévoué au patriarche qui l’avait jadis ordonné higoumèrie du Sti udion. était député à Rome pour y porter les explications de celui-ci. Le basileus, de son côté, envoyait une ambassade ; pressenti, le pape Jean VIII avait déclaré que cette légation serait à Rome la bienvenue.

III. LA RBCOHNA.ISSANCE DE PBOTIUS l’Ail JEAX VIII.

— Nous avons peu de chose à ajouter ici à ce que nous avons écrit à l’article Jean VIII ; en particulier, nous n’insisterons plus sur les motifs qui ont déterminé le pape à reconnaître purement et simplement Photius moyennant de légères satisfactions. Deux causes, avons-nous dit. ont pu agir sur lui. L’une est politique : dans le danger que fait courir à l’Italie la dissolution de l’empire carolingien, Jean ne voit plus d’autre secours que le basileus ; celui-ci, tout le montre, veut le maintien de Photius sur le siège patriarcal ; il y aurait imprudence à aller à rencontre de ses désirs. L’autre cause est d’ordre religieux : la curie romaine avait pris, avec quelle énergie, parti pour Ignace ; or, celui-ci s’était montré ingrat. De là à regarder avec d’autres sentiments l’adversaire de c< lui-ci, il n’y avait qu’un pas. En reconnaissant Photius, on pouvait peut-être maintenir les droits de Rome sur la Bulgarie ; on était certain, d’autre part, de faire la pacification religieuse dans Constantinople ; en même temps, on resserrait entre les deux Romes les liens que l’obstination d’Ignace avait contribué à détendre. On obtenait ainsi un résultat qui, du seul point de vue religieux, n’était pas sans intérêt. Restait seulement à mettre in luto les droits souverains de l’Église romaine en obtenant, si possible, de Photius un désaveu de l’attentat commis contre Nicolas I er en 867.

L’ambassade byzantine arrivait à Rome à l’été de 879, au moment même où Jean VIII revenait de ce congrès de Troyes. qui avait fait écrouler tous ses rêves. Elle fut très pressante, on ne saurait en douter, et finit par obtenir la reconnaissance, à peu près inconditionnée, de Photius par Jean VIII. Un cardinal romain, Pierre, fut chargé de rejoindre au plus vite Paul d’Ancône et Eugène d’Ostie demeurés à Constantinople. Les lettres que Pierre emportait sont datées du mois d’août 879.

Sur la double rédaction en laquelle sont conservées trois de ces lettres nous nous sommes expliqué à l’article Jean VIII, col. 605. Sans tenir mordicus à l’hypothèse que nous avons alors émise, nous pensons encore qu’elle est psychologiquement défendable, au même titre que celle d’une « falsification » consciemment perpétrée par Photius. Resterait à envisager une autre supposition que nous a suggérée l’article du P. Vitalien Laurent cité plus haut, col. 1554. La rédaction grecque des lettres ne nous est conservée que dans les actes du concile photien de 879-880. Quelle est l’authenticité des actes tels que nous les lisons aujourd’hui ? Les réflexions de Jean Beccos sur la teneur des actes de ce concile, réflexions que l’on trouvera au long dans l’article cité, ne sont-elles pas de nature à faire supposer que les actes conciliaires ont été fortement retouchés au xive siècle ? C’est l’hypothèse à laquelle s’arrête également Fr. Dvornik, op. cit., p. 324 sq. Il convient toutefois, avant de s’y rallier, de faire observer qu’Yves de Chartres, au commencement du xiie siècle, a connu de la lettre Jaffé, n. 3271, un texte latin qui s’apparente de très près au texte grec transmis par les actes, et que, par ailleurs le texte de la collection Deusdtdit suppose un original latin tout voisin de noire grec. Ce latin pourrait bien être une simple traduction du texte photien, conservé dès cette époque aux archives pontificales. Mais alors le texte photien, au moins pour cette partie, et quoi qu’il en soit des deux dernières séances, serait antérieur au xiie siècle. Il est clair, en définitive, qu’aucune solution ne saurait

DICT. DE TI1ÉOL. CATHOL.

être donnée, tant que n’aura pas été élucidée la question de l’origine des actes publiés aujourd’hui dans les collections conciliaires.

Pour apprécier toute la portée du geste fait par Jean VIII, il convient d’analyser sommairement le contenu du courrier expédié en août 879, selon la teneur même du registre conservé à Rome. On verra si les concessions du pape sont considérables. — La l re lettre, Jaffé, n. 3271, adressée aux basileis, commence par reconnaître que l’Église romaine a le droit de s’incliner devant le fait accompli (la réintégration de Photius par l’autorité impériale). Ce n’est point là aller contre les canons, lesquels prévoient que, en certaines circonstances, il faut céder à la nécessité. Le pape peut donc supprimer les décisions du concile précédent. Avec le consentement des patriarches orientaux, il reconnaît Photius et ceux qui ont été condamnés avec lui, satisfaciendo alque misericordiam quærendo. Il est entendu que ceci ne saurait créer un précédent en ce qui concerne l’élévation de néophytes aux dignités ecclésiastiques. Le patriarche, d’autre part, se gardera d’empiéter sur la Bulgarie. La fin de la lettre est relative à la conduite à tenir à l’endroit des ignaciens : il faut en finir avec les semeurs de zizanie ; sans doute, il convient de rendre leur situation aux évêques et aux prêtres ordonnés par Ignace ; mais, s’ils demeurent dans l’opposition, ils seront excommuniés parles légats pontificaux et le concile, eux et leurs adhérents. —Adressée aux évêques du patriarcat de Constantinople et aux titulaires des autres sièges patriarcaux, la 2e lettre, Jaffé, n. 3272, après avoir constaté l’unanimité qui s’est faite autour du patriarche restauré, déclare que l’autorité pontificale adhère à cette restauration. Ceci ne devra pas créer un précédent pour l’avenir. Devant le synode, Photius devra demander miséricorde, coram synodo misericordiam quærcndo. (Le texte grec, tout en atténuant l’expression, fait mention néanmoins de la miséricorde de l’Église romaine, que Photius proclamera devant le synode.) — La 3e lettre, Jaffé, n. 3273, est adressée à Photius lui-même et répond à la lettre que celui-ci avait expédiée à Rome. Elle débute par les actions de grâce du pape à l’endroit de la divine Providence qui sauve tous ceux qui espèrent en elle et protège ceux qui la cherchent dans la vérité. Lin mot excuse l’attitude des légats qui se sont montrés hésitants. Voir ci-dessus, col. 1586. Mais, quoi qu’il en fût, il convenait que, désormais, prissent fin toutes les dissensions et que tout fût fait en faveur de la paix. Le pape passait donc l’éponge sur le passé (veniam pro pace Ecclesiæ concedimus) ; il y mettait pourtant des conditions dont la principale est ainsi exprimée : si satisfaciens coram synodo… misericordiam poslulaveris. Une mention discrète était faite du synode d’Adrien tenu à Constantinople et qui a interdit l’accession des néophytes. (La rédaction grecque rapporte cette allusion au concile tenu du temps du pape Adrien I er, c’est-à-dire au IIe concile de Nicée. Il faut noter surtout la modification profonde introduite à la fin : « Nous avons annulé, est censé dire Jean VIII, la sentence du concile tenu antérieurement, parce que notre prédécesseur Adrien n’y a pas souscrit. » ) — Plus caractéristique encore des dispositions de Jean VIII est la 4e lettre adressée aux adversaires de Photius, Jaffé, n. 3274, qui, la chose vaut d’être notée, ne figure qu’au registre et non aux actes conciliaires, et dont l’authenticité est dès lors indiscutable. Adressée à plusieurs hauts fonctionnaires laïques et aux métropolites, Stylien de Néocésarée, Jean de Syla, Métrophane de Smyrne, elle est extrêmement sévère à l’endroit de tous ces personnages, chefs reconnus de l’opposition ignacienne. Le pape regrette vivement de les voir, depuis plusieurs ann dans le schisme ; scélérats et perfides, ils osent déchirer la robe sans couture du Sauveur. Jean NUI leur

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