Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.2.djvu/736

Cette page n’a pas encore été corrigée
2899
2900
PRÉDESTINATION. LES DISCIPLES DE S. AUGUSTIN


icrtaiiie et restreinte. Elle est gratuite, parce que la grâce, sans laquelle l’homme ne peut faire aucun bien salutaire, est un don de la pure miséricorde de Dieu. De verit. prædeslin., 1. I. La prédestination est certaine, en vertu de la toute-puissance de l’immuable volonté de Dieu. Ad Mon., i, xii. Elle est enfin restreinte aux élus appelés à manifester la miséricordieuse bonté de Dieu. Ibid., i, xxvi ; De verit. prædeslin., II, n. 33.

Quant à la volonté salvifique, saint Fulgence la limite comme le faisait saint Augustin dans les textes où il parlait de la volonté salvifique infailliblement efficace. Cf. De verit. prædesl., III, n. 14-15, 17-22, col. 658 sq. ; Epist., xv, 15, col. 441. Il ne nie pourtant pas cet autre point de la doctrine augustinienne : Deus impossibilia non jubel, ou Dieu veut rendre réellement possible à tous l’accomplissement des préceptes, qui sont la voie du salut. Saint Fulgence rejette nettement la prédestination au péché, Ad Mon., i, iv-vn, xviixxx, et il explique que ceux que Dieu n’a pas élus, il les abandonne justement soit à cause du péché originel, soit à cause de l’orgueil qui en est la suite. Ibid., i, xvir.

4° Saint Césaire d’Arles (470-543) conserve aussi dans ses sermons la doctrine de saint Augustin sur la prédestination. Comme le dit P. Lejay (article Césaire d’Arles, t. ii, col. 2178) : « Le problème du salut et de la damnation est résolu de la même manière que dans saint Augustin. Si la méchanceté des pécheurs les conduit à l’endurcissement, c’est que Dieu leur a soustrait sa grâce (Serm., xxii, 4). Si l’on demande pourquoi Dieu donne aux uns la grâce et la refuse aux autres, Césaire répond comme Augustin : Judicia Dei plerumque sunt occulta, numquam tamen injusla (Serm., cclxxv, 1). Et il oppose, comme saint Augustin, les textes connus : O altitudo ! O homo tu quis es ut respondeas Deo ! »

On voit cependant que saint Césaire, comme son maître, distingue entre la permission divine du péché, sans laquelle celui-ci n’arriverait pas, et la soustraction divine de la grâce, qui, comme une juste peine, suppose au contraire la prévision du péché. C’est ainsi qu’il écrit : « Le pharaon est endurci par la soustraction de la grâce, mais aussi à cause de sa méchanceté. » (Serm., xxii.)

Le mystère reste dans la permission divine des péchés qui ne seront pas remis. Dieu relève souvent des péchés qu’il a permis, souvent, mais pas toujours ; c’est là le mystère même.

5° Le IIe concile d’Orange (529), où saint Césaire d’Arles eut une influence prépondérante, mit fin aux luttes entre augustiniens et antiaugustiniens, en Gaule, en approuvant les points fondamentaux soutenus par Augustin. Il contient d’abord huit canons extraits par Césaire des œuvres d’Augustin (1-8), plus (n. 10), une autre proposition ajoutée par l’évêque d’Arles, ensuite 16 propositions (9 et 11-25) tirées par Prosper des œuvres d’Augustin et envoyées par le pape Félix IV. Le pape suivant, Boniface II, confirma, le 25 janvier 531, ces décisions auxquelles Rome avait eu déjà une grande part et il déclara la profession de foi du synode consentanea catholicis Patrum regulis.

Dans ces canons du concile d’Orange, sont clairement affirmées la nécessité de la grâce pour tout bien surnaturel et sa gratuité ; par là le semi-pélagianisme était définitivement écarté. Sur la question de savoir si l’efficacité de la grâce dont parle ce concile est intrinsèque ou extrinsèque, c’est-à-dire si elle est indépendante ou non de la prévision divine de notre consentement, les théologiens modernes ne s’accordent pas. Ceux qui, comme les augustiniens et les thomistes, admettent l’efficacité intrinsèque de la grâce, citent surtout les canons suivants : can. 3, Si quis invocatione humana graliam Dei dicii posse conferri, non uulem

DICT. DE THÉOL. CATHOL.

    1. IPSAH QRATIAM FACKitE ut invocetur a nobis##


IPSAH QRATIAM FACKitE ut invocetur a nobis, conlradicil Isaiæ prophétie, vel Apostolo idem dicenti : « Inventus sum a non quærentibus me ; palain apparui his, qui me non interrogabant. » (Rom., x, 20 ; Is., i.xv, 1.) — Can. 4, Si quis, ut a peccalo purgemur, voluntatem noslram Deum exspectare contenait, non autem, ut eliam purgari velimus, per Sancli Spiritus infusionem et operationem in nos FIERI confitetur, resislit ipsi Spirilui Sanclo per Salomonem dicenti : « Præparatur voluntas a Domino » (Prov., viii, 25), et Apostolo salubriter prædicanti : « Deus est, qui operatur in vobis et velle et perficere pro bona voluntate » (Phil., ii, 13). — Can. 6, Si quis… non ut obedienles et liumiles sirrius ipsius grati/e donum esse consentit, resislit Apostolo dicenti : « Quid habes, quod non accepisti ? » (I Cor., iv, l), et « Gratia Dei sum id, quod sum » (I Cor., xv, 10).

— Can. 9, Quoties enim bona agimus, Deus in nobis atque nobiscum, ut operemur, operatur. — Can. 10, Adjulorium Dei eliam renatis et sanatis semper est implorandum, ut ad fwem bonum pervenire, vel in bono possint opère perdurare. — Can. 12, Taies nos amat Deus, quales fuluri sumus ipsius dono, non quales sumus nostro merilo. — Can. 20, Nulla facit homo bona, quæ non Deus præstat ut facial homo. — Can. 22, Nemo habet de suo nisi mendacium et peccalum. La théologie en précisera plus tard le sens : l’homme ne fait aucun bien surnaturel sans le secours surnaturel de Dieu, ni aucun bien naturel sans un secours d’ordre naturel.

Le concile d’Orange n’affirme rien de positif sur la prédestination à la gloire et à la grâce ; mais on voit que celle-ci est la conséquence des canons que nous venons de citer, en particulier du canon 20 : Nulla facit homo bona, quæ non Deus præstat ut facial homo. Ces dernières paroles et celles du canon 12 : Taies nos amat Deus, quales fuluri sumus ipsius dono, non quales sumus nostro merilo, unies au Quid habes quod non accepisti, ne reviennent-elles pas à dire que nul ne serait meilleur qu’un autre s’il n’était plus aimé et plus aidé par Dieu, et que, dans l’œuvre du salut, tout est de Dieu, en ce sens qu’on ne peut y trouver le moindre bien qui serait exclusivement de nous et non pas de lui ? L’Indiculus de gratia Dei annexé à la lettre xxi du pape Célestin parlait de même ; cf. Denzinger, n. 134, 135, 139, 142 : Ad confitendum graliam Dei cujus operi ac dignalioni nihil penitus subtrahendum est, salis sufficere credimus quidquid secundum prædictas régulas aposlolicæ Sedis nos scripla docuerunt : ut prorsus non opinemur catholicum, quod apparueril præfixis sententiis esse conlrarium.

Enfin le concile d’Orange réprouve nettement la prédestination au mal : Aliquos vero ad mal uni divina potestate prsedestinalos esse, non solum non credimus, sed eliam, si sunt qui tantum mali credere velint, cum omni detestatione illis anathema dicimus. Denzinger, n. 200. Au même endroit, le concile affirme que tous les baptisés peuvent se sauver s’ils veulent accomplir les commandements : Hoc eliam secundum fidem catholicam credimus quod, post acceplam per baplismiun graliam, omnes baplizali Christo auxiliante et coopérante, quæ ad salutem animæ pertinent, possint et debeanl, si fideliler laborare voluerint, adimplere. Denzinger, ibid. C’est l’équivalent de la parole de saint Augustin que le concile de Trente (Denzinger, n. 804) citera contre les protestants : Deus impossibilia non jubel, sed jubendo monel et lacère quod possis et pelere quod non possis (De nul. et gral., xliii, 50), et Deus sua gralia semel fustificaios non deseril, nisi ab eis prius deseratur (ibid., xvi, 29).

Par là étaient affirmés les deux aspects extrêmes du mystère : là gratuité et la nécessité de la grâce d’une part, et de l’autre la réelle possibilité du salut au moins pour tous les baptisés.

T. — XII — 92