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    1. PRÉDESTINATION##


PRÉDESTINATION. S. AUGUSTIN, LE DÉCRET ÉTERNEL

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(’f.lil ; i venir. ( et te presci ; me est hors de la pndest nation, parce que son objet, dans le cas présent, est hors de l’élection : dicuntur electi a nescientibus quid /uliiri sint.

De ceux qui ne persévèrent pas, Augustin dit enfin : Appellamus ergo nos et elerlus et Christi discipulos et Dei lilios. quia sic appellandi sunt, quos régénérâtes pie vipère cernimus… ; si autan perseverantiam non luibent, itt est, in eo quod co ? permit esse non manent, non vere appellantiiT quod appellantur et non suni : apud eum enim hoe non sunt, eut notion est quod juluri sunt, id est, ex bonis mali. Ibid., ix, 22. col. 929. Dieu ne s’y trompe pas. Ne persévérant pas, ils ne sont pas élus : C’est à tort que nous leur donnerions définitivement ce titre ; Dieu, dans sa prescience : cui notum est (au passif) ne les considère pas comme tels.

Nous pouvons donc caractériser ainsi cette sorte de prescience : elle porte sur ceux qui ne sont pas prédestinés. Ils ne sont pas prédestinés, parce qu’ils n’ont pas été l’objet d’une élection efficace, ce que révèle leur non-persévérance. Mais de celle-ci, cette prescience n’est aucunement la cause, même indirectement, nous voulons dire en réglant l’élection. Elle prend acte à l’avance, si l’on peut dire, de ce résultat négatif. Parce qu’elle n’influe pas sur la non-persévérance et conséquemment sur la non-prédestination. parce qu’elle ne s’exerce pas, pour autant, voluntate vonjuncta, nous pourrions d’une certaine manière, et par un biais, la considérer comme l’un des cas de ce que nous appelons la science de simple intelligence. Il suffirait, en tenant compte toutefois de la permission divine du péché, de ramener son objet, plus abstraitement, à celui-ci : la persévérance ou la prédestination possible, en tant que possible. Mais ce serait subtiliser inutilement une doctrine de tendance si concrète. Il suffit qu’on se persuade que la prescience dont nous parlons n’a aucune relation de causalité avecla prédestination, ni celle-ci aucune relation de dépendance avec cette prescience.

2° La prescience divine dans la prédestination. Son objet. — Mais il est une autre sorte de prescience, dont l’objet et le rôle sont totalement différents. Celle-ci, à n’en pas douter, porte sur les prédestinés et opère leur prédestination. Elle s’exerce dans l’ordre d’intention et alors son objet, ce sont les élus, les discernés, ceux qui sont les bénéficiaires du décret divin : Non rnim sunt (qui perseveraturi non sunt) a massa illa perditionis præscientia Dei et prsedestînatione discreti, cl ideo nec secundum proposilum vocali, ac per hoc nec electi. De corr. et grat., vii, 16, t. xi.iv, col. 925 (où l’on remarque qu’Augustin ne sépare pas cette prescience de la prédestination : nous verrons plus loin I’étroitesse de leurs relations).

Son objet se retrouve dans l’ordre d’exécution : Hsec aiitem omnia, initium scilicet fidei et cetera usque in flnem dona sua, Deus largiturum se vocatis suis esse prœscivit. De dono pris., xxi. 56, t. xlv, col. 1028. Ce qui revient à dire qu’elle porte sur toute la réalisation de la prédestination, depuis la vocation à la foi, jusqu’à la collation du don de persévérance. Comme nous avons ramené, dans une certaine mesure, la prescience divine hors de la prédestination, à la science de simple intelligence (sans exclure, bien entendu, la permission positive du péché’, ainsi pouvons-nous ramener la prescience divine dans la prédestination, à la science dite par les théologiens de vision, son objet étant la prédestination effective comme telle.

Mais nous trouvons encore d’autres précisions sur cette prescience, bien que par voie de négation. Elle n’a aucun rapport avec le mérite des prédestinés : Keque enirn propterea eos promisit Abrahæ quia præscivila se ipsis bonos fuluros. De corr. ri grat., xii, 36, t. i. iv. col. 938. Parce qu’elle est une prescience, une

connaissance anticipée, son objet revêt, pour nous, le caractère du futur, mais il ne saurait s’agir que d’un futur absolu, le futur conditionné étant pour elle comme n’étant pas… Ilœc est Iota causa cur dictum est, a quoeumque sit dictum : « Iiaptus est ne malilia mutarel intellectum ejus. » Dictum est enim secundum périclita hujus vilæ non secundum præscienliam Dei qui hoc prsescivit quod julurum erut. non quod ftiturum non erat. De præd. sanct., xiv. 20, t. xi.iv, col. 979. Pour expliquer ce texte de la Sagesse, que sous prétexte de non-canonicité on lui avait reproché d’alléguer, Augustin écarte la prescience divine entendue au sens semi-pélagien. La prescience divine, qui opère dans la prédestination, a pour objet le futur absolu : Quod fulurum erat, non le futur conditionné : non quod futurum non eral, ce que le saint docteur concrétise par ces paroles : id est, quod ei morlem immaluram jueral largiturus (futur absolu) ut lenlalionum subtralieretur incerto ; non quod peccalurus effet qui mansurus in tenlatione non effet (futur conditionné). Ibid. C’est avec sévérité qu’Augustin s’insurge contre la doctrine contraire qu’il juge absurde : An eo rediluri sumus, ut adhuc disputemus quanta absurdilate dieatur. judicari hemines morluos eliam de his peccatis quæ præscivit eos Dcus perpelraturos fuisse si viverenl. De dono pers., ix, 22, t. xlv, col. 1005. Il ne refuse pas à Dieu, cela s’entend, la connaissance de tous les futurs, absolus ou conditionnés. Il écrit : Quæ præscivit et non : quæ præsciret. Mais il s’oppose, au nom du bon sens chrétien ou seulement humain, à l’explication de la prédestination par la prescience des futurs conditionnés : quod ita abhorre ! a sensibus christianis aul prorsus humanis, ut inde eliam refellere pudeat. Ibid. A quoi bon. explique le zélé pasteur d’Hippone, à quoi bon la prédication laborieuse que l’on fait de l’Évangile, si, par sa prescience, Dieu pouvait présumer, avant qu’il fût prêché, de la docilité ou de l’indocilité des hommes à l’entendre. Et comment expliquer la condamnation de Tyr et de Sidon, puisqu’il n’y avait chez elles aucune trace d’endurcissement et qu’elles se seraient converties, si elles avaient vu les miracles du Christ ?

C’est qu’Augustin avait très bien vu la contradiction (à base d’antropomorphisme) qui se trouve dans le système pélagien. Elle consiste à vouloir que Dieu prédestinant règle sa conduite sur des considérations purement conditionnelles et hypothétiques qui ne peuvent avoir aucun rapport avec sa prescience éternelle, en tant que celle-ci, pour qui tout est présent, concourt à la prédestination. Ce n’est là qu’un vain échappatoire, entaché d’une grossière erreur : Hoc ergo si non dieatur, de morluorum scilicet operibus, quæ facturi fuerant si viverenl, bonis aul malis, ac per hoc nullis et in ipsa Dei præscientia non futur is, quod cernitis quanto errore dieatur… Ibid., xii, 31, col. 101 1.

En examinant les rapports de la prescience et de la prédestination, nous achèverons de dégager la pensée du saint docteur sur cette prescience et son rôle dans l’économie du salut.

3° La prédestination. Saint Augustin enseigne-t-il la prédestination à la grâce seule ? — Après avoir étudié, selon saint Augustin, la prescience divine dans la prédestination, il nous faudrait, en rigueur de logique, cl sans aucune crainte de fausser la pensée du saint docteur, traiter de l’élection divine qui. dans l’ordre d’intention, précède la prédestination proprement dite. Deux considérations nous dissuadent de le l’aire. La première, c’est l’importance qu’il y a, pour une exacte compréhension de la doctrine d’Augustin, de séparer, chez lui, le moins possible les deux notions de prescience et de prédestination : on ne tardera pas a s’en convaincre. La deuxième, c’est que la prédestination (fui est postérieure à l’élection, est cille que les théologiens modernes appelleraient foritxaliter sumpta.