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POSSKVINO (ANTONIO ;
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naiscs venaient d’être arrêtées par une résistanee, aussi imprévue qu’opiniâtre, sous les murs de Pskov et que la Diète commençait à refuser les subsides. Le 10 août 1581, Possevino fut reçu par Ivan le Terrible à Staril La, sur la Volga. Il ne put rien obtenir au sujet de l’union religieuse, pas même l’ouverture d’une église latine à Moscou pour les étrangers. Il revint donc au camp polonais négocier les conditions de la paix. Il laissa le P. Drenocki en Moscovie avec d’intéressantes recommandations où il insistait sur la piété et la prudence, mais armait le Père contre toutes les objections des orthodoxes contre la vérité catholique. Le 15 janvier 1582, après d’interminables marchandages, une trêve de dix ans fut conclue entre la Moscovie et la Pologne, « par égard pour le Saint-Siège », et, quoi qu’en disent certains historiens, à la satisfaction manifeste des deux parties. Possevino revint alors à Moscou où il tint plusieurs joutes théologiques — dont quelques-unes assez orageuses — avec Ivan le Terrible. Il insista sur l’envoi d’une ambassade à Rome pour traiter de la ligue et de la croisade contre les Turcs. Jacques Molvianinov fut désigné par le tsar et Possevino l’accompagna jusqu’à la Ville éternelle. L’ambassade fut inutile pour bien des raisons et Possevino revint en Pologne, chargé, cette fois ; de pouvoirs presque illimités et désigné spécialement pour prendre la direction générale de tous les séminaires et alumnats fondés par Grégoire XIII dans le nord de l’Europe, mais sa juridiction s’étendait, semble-t-il, jusqu’au Collegium Illyriciim de Lorette.

Il resta le conseiller privé de Stéphane Bathory dont il avait l’entière confiance, du 4 décembre 1582, date de son retour à Varsovie, jusqu’en février 1585. Son activité, durant cette période, fut extraordinaire. Chargé de régler le litige entre Bathory et Rodolphe II de Habsbourg au sujet de terres hongroises que chacun se disputait, il voyagea à trois reprises d’une cour à l’autre ; il mûrissait de nouveaux projets de ligue contre les Turcs, fondait de nouvelles maisons dont les plus célèbres furent l’alumnat pontifical de Vilna, la résidence de Sainte-Barbe à Cracovie, où il eut de fameux démêlés avec l’université, et le collège de Claudiopolis, en Transylvanie ; il écrivait de nombreux traités théologiques, discutait avec le prince Constantin d’Ostrog pour ramener à l’union de Florence les dissidents situés dans les terres russes du grand-duché de Lithuanie et obtenait des brefs pontificaux pour le magnat orthodoxe. Pourtant, son activité, si diverse, ne pouvait éviter de toucher à la politique. Sur les instances du P. Claude Aquaviva, général de la Compagnie, il fut donc arraché à ces multiples missions et envoyé au collège de Braunsberg. De là, il fit plusieurs tournées apostoliques en Saxe, en Bohême, en Livonie, en Lithuanie. Il rétablit à Riga la paix menacée par les succès des hérétiques. Il poussa jusqu’à Dorpat où il fonda un autre séminaire sur le modèle de celui de Vilna. Il restait néanmoins en correspondance avec, Bathory qui, lors de l’avènement de Sixte-Quint, voulut le renvoyer à Rome pour traiter de ses projets de croisade contre les Turcs. Sur les instances du roi, le Vatican invita formellement Possevino à venir à Rome, quoique le P. Aquaviva, plusieurs fois pressenti, se fût maintenu dans un mutisme significatif. Possevino arriva à Rome en septembre 1586. Les négociations auxquelles il se livra furent secrètes, et il n’en reste pas de traces. Il semble cependant avoir obtenu un beau succès diplomatique personnel. Il rentrait en Pologne pour rendre compte de sa mission quand survint subitement la mort de Bathory. Le P. Aquaviva insista encore une fois auprès de Sixte-Quint, et Possevino fut envoyé au collège de Padoue.

Il se livra désormais aux travaux scientifiques. C’est de cette époque que datent ses ouvrages monumen taux : la Jiibliolheca selecta et VApparatus sacer. Il s’occupait aussi de direction spirituelle ; parmi ses pénitents se distinguait François de Sales. C’est poussé par Possevino que ce jeune homme, venu à Padoue pour y faire son droit, se voua aux études théologiques. Durant la même période, Innocent IX chargea Possevino de réfuter la doctrine de Machiavel. Venu à Rome pour surveiller l’impression de son livre. il fut nommé consulteur de la grande congrégation réunie par Innocent IX pour la réforme des ordres monastiques, mais, bientôt, une occasion nouvelle le relança dans la diplomatie.

Le 25 juillet 1593, Henri IV faisait son abjuration. Il envoya le duc de Nevers comme ambassadeur spécial afin de faire au pape la prestation d’obédience d’usage. Clément VIII refusa d’accepter l’ambassade française. Le duc de Nevers était déjà en Italie quand Possevino fut envoyé pour l’arrêter. Il réussit à faire accepter cette pénible décision au duc, qui, dans l’oecurence, montra une généreuse soumission aux ordres du pape ; il obtint cependant, grâce à l’entremise de Possevino, la permission de venir à Rome de façon privée ; mais ceci déplut souverainement au parti de l’intransigeance et Possevino fut renvoyé à Padoue. Il n’y resta pas très longtemps. L’année suivante, l’attentat de Jean Châtel (28 déc. 1594) offrait au parlement de Paris une occasion de sévir contre les jésuites qu’ils qualifièrent de corrupteurs de la jeunesse. L’expulsion faillit entraîner une rupture entre la France et le Saint-Siège. Pendant que les chancelleries négociaient, Possevino fut envoyé en France, cette fois, par le P. Aquaviva. Ce fut sa dernière mission, sur laquelle nous n’avons malheureusement que peu de détails. Il s’appliqua fort à préparer la réconciliation d’Henri IV avec Rome, mais ce ne fut qu’en 1603 que les jésuites obtinrent à nouveau leurs privilèges en France. Possevino était déjà de retour au collège de Padoue où il travaillait à ses ouvrages scientifiques avec la même énergie et la même intelligence qui l’avaient caractérisé au cours de ses missions diplomatiques. Il mourut le 26 février 1611, à Ferrare.

II. Œuvres. — L’œuvre littéraire de Possevino est considérable ; elle occupe cinquante numéros dans le recueil de Sommervogel. Sans trop nous arrêter au Dialogo dell’onore net quale si traita a pieno del duello, de son frère Gianbattista, qu’il édita (Venise, 1556) en y ajoutant d’importants passages, et à son Tractatus in quo cum de per/ecta poeseos ratione agitur tumostenditur cur abstinendum sit a scriptione thematum turpium, édité à Rome en 1576 sous le nom de son ami Laurent Gambara, distinguons : 1° les controverses avec les protestants ; 2° les controverses avec les orthodoxes ; 3° les traités d’histoire ecclésiastique, enfin 4° ses deux grands ouvrages : la Bibliotheca selecta et VApparatus sacer qui méritent d’être traités à part.

Controverses avec les protestants.

Son Traltalo

del santissimo sacrificiel dell’altare, detto messa (Lyon, 1583), que Possevino désigne comme primus meus in Gallia fœtus dum Lugduni concionator essem, , est une réfutation des théories protestantes bien connues que Possevino voyait disséminées « jusqu’aux Indes elles-mêmes et jusqu’à Byzance ». Ce premier ouvrage théologique eut un beau succès (cinq éditions avant la fin du siècle) et fut traduit en anglais, à Louvain, par Nicolas Hay. De la même année date sa lettre aux Genevois Del modo di leggere ed udire la parola di Dio. Vers la même époque, il publia son Epistola ad Genovenses, de Actis aposlolorum, sous le pseudonyme de Philippus Tosa. Un pénitent de Possevino avait été exhorté par un protestant à lire les Actes des apôtres afin d’y découvrir la vérité du calvinisme. Ce fut l’occasion de la lettre de Possevino qui reprit le texte des Actes en en développant les passages quæ ipsam anti-