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PORTUGAL. SCIENCES SACRÉES, LE DOGME


aussi dans toutes les missions portugaises (padroado et colonies) de très bons services.

Nous n’avons pas parlé des jésuites, car ils ne sont pas subventionnés par I’Iitat. Cependant, les jésuites portugais ont deux missions inter infidèles : une se trouve dans l’Inde (mission de (ion, mais dont le champ d’action reste en dehors du territoire portugais) ; l’autre en Chine (mission de Slûu-Hing, près de Canton). Lès jésuites portugais ont aussi fondé, après 1910, plusieurs collèges d’enseignement secondaire et quelques résidences au Brésil. On ne peut pas regarder le Brésil comme mission proprement dite. Mais, certes, il s’agit ici encore d’une des formes de l’expansion catholique du Portugal.

Il faudraitajouter un certain nombre de prêtres portugais qui vivent aux États-Unis d’Amérique où ils prêtent assistance aux nombreux émigrés portugais.

c) Œuvres. — Les statistiques suivantes donnent une idée des œuvres exclusivement missionnaires du Portugal :

Œuvres d’enseignement : 7 séminaires, 1 école de catéchistes, 13 lycées, 8 collèges d’enseignement^econdaire, 4 collèges d’enseignement primaire supérieur (middle-schools), 10 écoles industrielles, 8 écoles agricoles, 40 écoles d’arts et métiers, 886 écoles élémentaires.

Œuvres d’assistance : 2 mutualités du clergé, 16 orphelinats, 4 maisons de charité pour les vieillards, 2 léproseries, 108 hôpitaux ou dispensaires.

Œuvres spirituelles (celles-ci pour un seul diocèse, Macao) : 487 baptêmes d’adultes en danger de mort, 746 baptêmes d’adultes (conversions de païens), 1 796 baptêmes d’enfants en danger de mort, 839 baptêmes d’enfants de chrétiens, 312 extrêmes-onctions, 244 mariages catholiques, 21 mariages mixtes, 46 confirmations, 15 142 confessions d’obligation, 174 254 confessions de dévotion, 14 888 communions pascales, 1 103 971 communions de dévotion. Cf. Bolelim eclesiâsiico de Macao, 30e année, n. 342, sept. 1932, p. 168.

Qu’on multiplie cela pour toutes les missions portugaises (Padroado, Afrique, Brésil) et on verra que l’expansion catholique du Portugal n’est point tarie et que les missionnaires d’aujourd’hui sont dignes de leurs devanciers.

II. Les sciences sacrées au Portugal.

1° Théologie dogmatique ; 2° exégèse ; 3° théologie ascétique et mystique ; 4° théologie morale et droit canonique ; 5° conclusion.

La théologie dogmatique.

Dans l’ancien Portugal,

le clergé était la partie la plus instruite du pays. Comme partout ailleurs, dans les nations néo-latines, les écoles se confondaient avec les églises et les monastères. Ceux d’Alcobaça et Santa-Cruz (Coïmbre) jouirent même d’une 1res grande renommée. Saint Antoine de Lisbonne (ou de Padoue) fut élève du monastère de Santa-Cruz.

Il y avait aussi l’étranger. Le mouvement d’élèves portugais dans les universités de Paris, Montpellier. Bologne, etc., fut assez important. Mais cela ne se faisait pas sans dangers et sans dépenses considérables. Le clergé prit l’initiative de demander au roi l’établissement au Portugal d’une « école générale ou universelle ». Le roi Denis, agréa cette demande et le pape Nicolas IV la confirma le 9 août 1290. Telle fut l’origine de la célèbre université, qui, après avoir hésité entre Lisbonne et Coïmbre, se fixa finalement à Coïmbre.

De leur côté, quelques couvents, surtout de dominicains et de franciscains, instituèrent des cours de grammaire, de philosophie et de théologie. Ceux des franciscains de Santarem (xve siècle) étaient particulièrement fréquentés. On sait qu’on enseignait aussi la théologie à l’école de la cathédrale de Braga.

Ceux qui allaient à l’étranger en rapportaient des livres, ’traduits, ils faisaient quelquefois le tour des couvents. L’Imitation de Notre-Seigneur Jésus-Christ se trouvait partout. De même, la Vita Christi de Ludolphe le Chartreux.

Enfin, au xive siècle, on commença à éditer des livres au Portugal. On débuta humblement par des Vies de saints. Ensuite, on s’attaqua à des travaux plus scientifiques en latin et même, déjà, en portugais, comme le fameux Livre de la cour impériale. Celui-ci est le premier grand ouvrage de théologie édité au Portugal. Il nous introduit tout naturellement dans notre sujet.

O livro da corle impérial, resté plusieurs siècles inédit, a été publié récemment (1910). Il date du commencement du xve siècle ou de la fin du xive. L’auteur, anonyme, connaissait parfaitement, entre autres, saint Augustin, saint Anselme, saint Thomas, Platon et Aristote ; ces derniers étaient étudiés au Portugal depuis longtemps dans des traductions arabes du sud de la péninsule ibérique. Il renferme des traités sur Dieu, la Trinité, l’incarnation, la virginité de Marie, le péché originel. L’écrivain s’attache ensuite à la seconde moitié du Credo, en développant chacune de ses parties. A la fin se trouve le traité sur l’eucharistie. Comme on le voit, le Livre de la cour impériale renferme le cycle complet des disciplines théologiques. Dans un but évident d’apologétique, après la preuve de la divinité du Christ, il y a un traité contre les juifs et, après les sacrements, on réfute les musulmans. Nécessités de temps et de lieu.

Avec la venue des jésuites et l’encouragement du concile de Trente, s’ouvre pour la théologie, au Portugal, une période très florissante. Coïmbre devient l’égale des plus grandes universités étrangères. L’âge d’or de la théologie portugaise a suivi le développement politique et maritime du Portugal qui venait de fonder ses colonies d’Afrique, un empire aux Indes et en Amérique. Sa langue prenait un essor merveilleux et s’élevait à l’épopée. Coïmbre et Evora étaient des villes universitaires d’où rayonnait une lumière intense. En philosophie, régnait Aristote. en théologie, saint Thomas, mais non d’une manière absolue. Naturellement, les dominicains s’attachaient davantage à lui, mais les franciscains suivaient plutôt Duns Scot, et les augustins, de leur côté, s’attachaient au docteur d’Hippone. Occam et Biel n’étaient pas non plus des inconnus. Les jésuites, sans passé et n’ayant formé encore aucune école, épris de l’esprit de progrès, cherchaient leur voie. Un peu éclectiques, peut-être, ils ne laissaient pas de regarder saint Thomas comme un maître. De là l’immense travail personnel qu’ils ont réalisé et qui peut se synthétiser dans les doctrines en rapport plus ou moins direct avec la « science moyenne ». On vit bientôt ces scolastiques de Coïmbre, tout disciples qu’ils étaient, devenir à leur tour des maîtres. Les Commentarii Conimbricences sont universellement connus. Nous n’avons pas à en parler ici, car le mouvement philosophique n’est pas’de notre sujet. Mais il faut faire une exception pour Pedro da Fonseca. Son système de la « science moyenne » a eu une répercussion considérable sur toute la théologie soit à la renaissance scolastique du xvie siècle, soit aux siècles suivants.

Fonseca, premier inventeur de la « science moyenne », est, par le fait même, le vrai fondateur du système développé ensuite par Molina. D’ailleurs, il est avéré aujourd’hui qu’il existe une identité essentielle entre le molinisme et la doctrine enseignée par Fonseca, à Coïmbre, vingt-quatre ans avant que Molina eût publié sa Concordia. On peut retrouver dans les Commentarii in melaphysicam Aristotelis Stagiritee de Fonseca les assises même du molinisme. Voir art. Molinisme.