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PORTALIS (JEAN) — PORTE (BARTHÉLÉMY DE LA)


eut connaître l’esprit dans lequel se fît alors la réorganisation des cultes. Une I re partie concerne le Concordai et les Articles organiques. Après un Coup d’œil rapide sur l’histoire de la législation française en matière religieuse et sur son état à l’époque du rétablissement du culte public en 1801, par le vicomte Portalis, elle comprend : 1° le Discours sur l’organisation des cultes, autrement dit, sur le Concordat et les Articles organiques, prononcé par Portalis devant le Corps législatif qui s’y montrait hostile. Voir l’art. Concordat de 1801, t. iii, col. 761. Ce discours, le texte du Concordat, les Articles organiques qui l’accompagnent, les Articles organiques des cultes protestants, les rapports de Portalis sur les deux séries d’articles organiques furent immédiatement reproduits dans les journaux du temps et publiés à part. Conformément aux vues de Bonaparte (cf. Boulay de La Meurthe. Histoire de la négociation du concordat de 1801, in-8°, Tours, 1920, p. 45 sq. : Le dessein religieux de Bonaparte), et qui sont les siennes, répondant aux législateurs qui jugeaient le rétablissement d’une religion nationale contraire aux progrès de la raison et la liberté due aux cultes suffisamment assurée par le régime que nous appelons séparation de l’Église et de l’État, il soutient qu’une religion est nécessaire à un peuple, qu’il est impossible d’établir une religion nouvelle et que « le gouvernement français ne pouvait raisonnablement abjurer le christianisme, qui, de toutes les religions positives est… la plus accommodée à notre philosophie et à nos mœurs », toc. cit., p. 23, et dont il fait un éloge que l’on croirait inspiré du Génie du christianisme, tout proche. D’autre part, un État « n’a qu’une autorité précaire quand il a dans son territoire des hommes qui exercent une grande influence, sans que ces hommes lui appartiennent au moins sous quelques rapports ». Ibid., p. 29. Le gouvernement, préoccupé avant tout d’éteindre le schisme qui soulève en France, comme toutes les querelles religieuses, des haines inexpiables, a dû s’adresser au pape. Il n’y a pas à craindre les opinions ultramontaines : « l’indépendance de la France catholique n’est<lle pas garantie par le précieux dépôt de nos anciennes libertés ? > Ibid., p. 32. Enfin, tous les rapports des préfets en font foi, le gouvernement a répondu au vœu national. — 2° l’Exposition des maximes et des règles consacrées par les Articles organiques, à propos des observations annoncées par le pape sur quelques-uns de ces Articles. » Les Articles organiques, dit-il au citoyen Premier Consul, n’introduisent point un droit nouveau ; ils ne sont qu’une nouvelle sanction des antiques maximes de l’Église gallicane : indépendance des gouvernements dans le temporel, limitation de l’autorité ecclésiastique aux choses purement spirituelles, supériorité des conciles généraux sur le pape, et obligation commune au pape et. à tous les autres pasteurs de n’exercer leur ministère que d’une manière conforme aux canons reçus dans l’Église et consacrés par le respect du monde chrétien. » Ibid., p. 114 et 115. « Le reproche de nouveauté proposé contre les opinions ultramontaines demeure en son entier, dit-il encore. Or, toute nouveauté dans l’Église est fausse et profane. » Ibid., p. 114. Les représentations pontificales annoncées ayant paru. Portalis rédigea la réponse qu’y fit le gouvernement impérial, 30 ventôse an XII (21 mars 1804).

Une IIe partie concerne l’exécution du Concordat et des Articles organiques. On y trouve, entre autres, un Exposé des moli/s du projet de loi relatif à l’organisation des séminaires métropolitains du 12 ventôse an XII <3 mars 1804), fait par Portalis devant le Corps légisatif, et son Rapport à l’empereur sur le même sujet, 12 août 1800. Portalis y montre la même hauteur de vues, le même souci fie l’intérêt de l’Église et de l’État et les mêmes principes gallicans que toujours. La IIIe,

la IVe et la Ve partie rapportent les pensées et les décisions de Portalis touchant les Associations et congrégations religieuses qui tentent alors de se reformer ; sur les Liberté, protection et police des cultes, enfin sur l’Enseignement et l’instruction publique. On le voit hostile par raison à une association de faux mystiques « née pendant les persécutions et les troubles…, formée dans les ténèbres », loc. cit., p. 448, et dite Société des victimes de l’amour de Dieu ; hostile, par esprit gallican, à la Société des Pères de la foi, où il retrouvait la Compagnie de Jésus, cf. p. 458-459, mais disposé à laisser se former des congrégations enseignantes, cf. Rapport confidentiel à l’empereur sur une association ecclésiastique que le cardinal-archevêque de Lyon proposait d’autoriser dans son diocèse et dont le but était de se vouer à l’éducation, loc. cit., p. 465 sq., et défenseur éloquent des congrégations religieuses de femmes vouées aux œuvres de charité ou à l’enseignement, cf. divers Rapports sur les congrégations religieuses de femmes, ibid., p. 476 sq., avec cette réserve cependant, digne d’un bon légiste gallican, que « la puissance civile a le droit de supprimer des ordres religieux ». Cf. Lettre au Premier Consul au sujet du droit qu’a le souverain de faire rentrer les moines dans la vie civile. Ibid., p. 535. Pour voir ce qu’il y avait dans ces vues de conforme ou d’opposé à celles du souverain, consulter Deriès, Les congrégations religieuses au temps de Napoléon, Paris, 1929. D’autre part, s’il souhaitait que l’Église de France cessât de traiter en excommuniées les personnes consacrées au théâtre, cf. Lettre au Premier Consul au sujet des funérailles de mademoiselle Chameraꝟ. 25 vendémiaire an XI, ibid., p. 539-540, il revendiquait, pour l’autorité ecclésiastique, le droit de refuser la sépulture religieuse à qui ne la méritait pas, cf. divers Rapports sur des refus de sépulture, ibid., p. 541 sq. ; il approuvait enfin’les préfets qui ordonnaient la fermeture des magasins les dimanches et jours de fêtes et des cabarets, ces mêmes jours, aux heures des offices, cf. Rapport concernant la célébration des dimanches et des fêtes, 21 janvier 1807, ibid., p. 565 sq., et se montrait hostile à la reconnaissante civile du mariage des prêtres. Cf. Lettre à l’empereur sur le mariage des prêtres, 28 prairial an XIII (17 juin 1805), ibid., p. 579.

Portalis mourut presque aveugle, le 25 août 1807. Désigné par Napoléon Bonaparte qui réorganisait l’Institut — décret du 3 pluviôse an XI (23 janvier 1803)

— pour faire partie de la seconde classe (langue et littérature françaises), il y prononça, en 1 806, l’éloge de Séguier : Éloge d’Antoine-Louis Séguier, avocat général au parlement de Paris, l’un des quarante de la ci-devant Académie française, prononcé à une séance publique de l’Institut, le 2 janvier 1806, 91 p., in-8°, Paris.

Comte Portalis, Notice sur la vie de Jean-Êtienne-Marie Portalis, au début de l’ouvrage. De l’usage et de l’abus de l’esprit philosophique ; Bouillée, Essai sur la de et les ouvrages de Portalis, Paris, 1869 ; René Lavollée, Portalis, sa vie et ses œuvres, Paris, 1869 ; Frégur, Portalis, philosophe chrétien, 1861 ; Blessig, Oraison funèbre de Portalis, 1807 ; Itacquin, Éloge historique de Portails prononcé à la séance d’ouverture des conférences de l’ordre des avocats, le 13 décembre 1845, in-8°, Paris, 1845 ; Louis Lallemand, Éloge de J.-E.-M. Portalis, Paris, 1861 ; Mignet, Éloges historiques, in-12, Paris, 1864 ; Sainte-Beuve, Causeries du lundi, t. v, 1862, p. 351 sq. ; les diverses histoires du droit civil ecclésiastique français et les ouvrages qui traitent de la restauration reli gieuse de la France après la Révolution.

C. Constantin.

PORTE (Barthélémy de La) (1699-1786), né à La Ciotat, en juin 1699, fit ses études ecclésiastiques à l’réjus ; mais, comme il refusait de signer le Formulaire, il fut obligé de quitter son diocèse et il vint à Montpellier, où l’évêque, Colbert de Croissy, l’ordonna prêtre et lui confia une mission. Après la mort de Col-