Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.2.djvu/553

Cette page n’a pas encore été corrigée

2537

POMÈRE

2538

    1. POMÈRE##


POMÈRE. — I. Vie et écrits. IL Le traité De vita contemplaliva.

I. Vie et écrits.

Le continuateur de Gennade et Isidore de Séville ont consacré chacun une notice à ce personnage. La notice du De viris, n. 95, de Gennade, P. L., t. lviii, col. 1117 ; celle du De viris d’Isidore, P. L., t. lxxxiii, col. 1096.

Pomère — Isidore seul l’appelle Julien Pomère — originaire de Mauritanie, vint en Gaule dans la seconde moitié du ve siècle, sans doute pour fuir la persécution des Vandales. Le biographe de Césaire d’Arles nous apprend qu’il se fixa dans cette ville où il enseigna les belles-lettres. Vita Cœsarii, c. i, P. L., t. lxvii, col. 1004. L’évêque d’Arles, Éone, qui l’estimait, lui conféra l’ordre de la prêtrise. Rurice, évêque de Limoges, avait appris à le connaître au cours d’un voyage qu’il fit à Arles ; il lui écrivit deux fois pour l’attirer dans sa ville épiscopale, mais il n’y réussit pas. Ruricii epislol., i, 17, et ii, 10 (9), dans le Corpus de Vienne, t. xxi, p. 369, 385 ; P. L., t. lviii, col. 79 et 89. Comme Pomère, dans l’adresse de ces deux lettres, est dit abbé, on a supposé qu’il avait dirigé un monastère soit en Mauritanie avant sa fuite, soit plus tard à Arles. Arnold, Cœsarius von Arelate, p. 82. Mais le continuateur de Gennade et le biographe de Césaire né nous disent rien sur ce fait ; aussi nous paraît-il plus probable que Pomère a été appelé « abbé » par Rurice, parce qu’il dirigeait à Arles une association de clercs menant la vie commune, comme certains passages de son traité, De vita conlemplaliva, semblent l’indiquer.

Ennode, le futur évêque de Pavie, alors diacre, lui écrivit pour l’attirer en Italie, sans plus de succès que Rurice. Cf. Ennode, Epist., ii, 6, P. L., t. lxiii, col. 3. !  ; édit. Hartel, Corpus de Vienne, t. vi, p. 44. Quand Césaire d’Arles eut quitté le monastère de Lérins, il fut quelque temps l’élève de Pomère. Vita Cœsarii, loc. cil. A en croire des historiens modernes d’une compétence reconnue, c’est en grande partie grâce à l’influence de Pomère, très attaché à l’enseignement de saint Augustin, que Césaire d’Arles a pu se libérer des préventions, alors très répandues en Gaule, contre les conceptions du docteur d’Hippone. Arnold, Cœsarius von Arelate, p. 84 ; Malnory, Saint Césaire d’Arles, p. 23 ; cf. art. Césaire d’Arles, t. ii, col. 2168. Pomère vivait encore quand le continuateur de Gennade écrivait la notice qui le concerne. Nous ignorons la date exacte de sa mort.

Isidore et le continuateur de Gennade attribuent à Pomère un traité en huit livres, De anima et qualitale ejus. Nous ne le connaissons que par le sommaire qu’ils en donnent. Le 1. I exposait en quel sens l’âme est dite créée à l’image de Dieu. Le 1. II était consacré à la question de la corporéité et de l’incorporéité de l’âme. Le 1. III avait pour objet l’origine de l’âme du premier homme. Le 1. IV recherchait « si l’âme qui doit être unie au corps prêt à naître est faite neuve (créée) et sans péché, ou si, provenant de la substance du premier homme, comme un rameau provient de la racine, elle contracte par son origine (originaliter) le péché de la première âme ». Le 1. V étudiait la « faculté » ou la « possibilité » de l’âme. Le 1. VI exposait l’a tagonisme de l’âme et de la chair selon la parole de l’Apôtre. Le 1. VII rappelait la doctrine de la résurrection. Enfin, le 1. VIII était consacré aux prédictions concernant la fin du monde. A en croire Isidore, Pomère, au t. II, aurait enseigné que l’âme est de nature corporelle.

Rien ne nous est resté d’une « Exhortation au mépris des biens de ce monde », De contemptu mundi et rerum transiturarum, que, d’après le continuateur de Gennade, Pomère aurait dédié à un certain Principius. Le Libcllus de virqinibus instituendis, dont parle Isidore, est également perdu. Par contre, nous possédons le traité De vita contemplaliva.

II. Le traité de vita contemplativa.

1° Attribution. — Ce traité a été longtemps attribué à Prosper. Sirmond a démontré l’impossibilité de cette attribution en faisant remarquer que l’auteur parle de l’évêque d’Arles, Hilaire, comme d’un homme mort depuis assez longtemps. P. L., t. lix, col. 453. Or, Prosper était contemporain d’Hilaire. En outre, on n’admet pas facilement que l’augustinien Prosper, qui, dans sa lettre à saint Augjs^in, P. L., t. li, toi. 67 sq., malmène assez rudement Hilaire, ait parlé de ce dernier d’une manière aussi louangeuse que le fait l’auteur dj De vita conlemplaliva à l’endroit cité plus haut. Voir, sur cette question, l’avant-propos de l’édition de ce traité, P. L., t. lix, col. 412.

Dans la préface du t. III, l’auteur nous apprend qu2 le 1. I traite de vita conlemplaliva ; le 1. II de vita acluali et le 1. III de virtutibus et vitiis. Col. 471. Or, Isidore connaît trois livres de Pomère dont le I er traite de futuræ vitæ contemplatione ; le IIe de acluali conversationc et le IIIe de vitiis et virtutibus. L’identité des trois livres de notre traité De vita contemplaliva et des trois livres qu’Isidore attribue à Pomère ne saurait donc faire de doute. Ajoutons que le traité De vitiis et virtutibus que le continuateur de Gennade attribue à Pomère ne peut être que le IIIe livre de notre De vita contemplaliva.

Analyse et doctrine.

1. Le 1. I du De vita conlemplaliva

répond aux trois premières questions de l’évêque Julien, relatives à la « propriété » (l’essence) de la vie contemplative, à la différence qui existe entre elle et la vie active, à la possibilité, pour un évêque, de s’y adonner.

Pomère explique que « la vie contemplative, dans laquelle la créature intellectuelle, purifiée de tout péché et entièrement guérie, verra son Créateur, tire son nom de « contempler », c’est-à-dire de « voir ». Col. 418. Il ajoute que, dans la vie présente, toute remplie de misères et d’erreurs, l’homme ne saurait voir Dieu tel qu’il est, et que, par conséquent, la vie contemplative ne sera pleinement réalisée que dans l’autre monde, où elle sera la récompense de ceux qui auront combattu pour le Christ sur terre. Col. 419. Cette récompense sera sans fin. Les corps y auront part par suite de la résurrection. Il en sera de même des châtiments qui atteindront les méchants. Le jugement final qui discernera les justes et les pécheurs a eu un précédent dans le jugement des anges. Ceux qui se sont révoltés contre Dieu ont été condamnés et, « parce qu’ils n’ont pas voulu persévérer dans le bien comme ils le pouvaient, ils sont réduits à ne vouloir ni pouvoir être rétablis dans leur état primitif » ; tandis que les autres, « parce qu’ils ont voulu être fidèles à Dieu, ont été mis dans l’heureuse et volontaire nécessité de vivre toujours avec lui ». Col. 421. Après la résurrection, les justes rendus semblables aux bons anges, unis pour toujours à leur Créateur, « verront sa substance ». Alors la substance humaine étant élevée à la ressemblance avec son Créateur, l’intelligence n’aura plus à redouter l’erreur, ni la mémoire l’oubli ; la pensée ne divaguera plus, la charité sera toujours sincère. Les corps n’auront plus « à redouter la maladie et la mort, et seront sans défauts. Tous jouiront de la même béatitude, mais dans la mesure de leurs mérites respectifs ». Col. 422. Ici-bas, continue Pomère, la véritable vie contemplative n’est pas possible, car Dieu n’a pu et ne peut être vu sicuti est. Si des anciens justes ont vu Dieu durant leur vie terrestre, cette vision n a pu se produire sine forma visibilis créatures (sans l’aspect d’une créature visible), ni sine alicujus’elementi assumptione. Col. 425 sq.

Pomère est très bref dans sa réponse à la deuxième question, sur la différence entre la vie active et la vie contemplative. Le sectateur de la vie contemplative