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POLOGNK. SCIENCES SACRÉES, LA RÉFOIS. M K
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mémoire ne trouva pas d'écho en Pologne, mais sans' doute affaiblit-il de façon indirecte le sentiment de la nécessité de l’union dans l'Église, frayant ainsi la voie à la Béforme.

Dans le domaine de l'Écriture sainte, la Pologne ne fit pas grand’chose avant l'époque de la Réforme. Il n’y avait que quelques traductions partielles de l'Écriture sainte en langue polonaise : le psautier de Saint-Florian en est le plus ancien monument. Il se trouve dans la bibliothèque de l’abbaye des chanoines réguliers de Saint-Florian en Autriche. Ce manuscrit provient du xive siècle, mais sans aucun doute le texte est plus ancien. Au xve siècle, il y eut des essais de modernisation du texte primitif du psautier polonais dans le psautier de Pulawy et dans celui de Cracovie, . ainsi que plus tard, vers le milieu du xvie siècle, dans le Zoltarz de Wrôbel, prédicateur de Poznan. Dans la première moitié du xv° siècle apparut une traduction complète de l'Écriture sainte, faite probablement sur l’ordre de Sophie, quatrième femme du roi Ladislas Jagellon, née princesse russe. Cette traduction se trouve dans un manuscrit en mauvais état conservé dans la bibliothèque du collège de SarosPatak, en Hongrie, d’où provient le double nom de cette Bible : Bible de Saros-Patak ou de la reine Sophie. En outre, plusieurs commentaires latins de la Bible d’auteurs polonais ont été conservés ; ces traités ne présentent pas, en général, une grande valeur scientifique. On peut citer, par exemple, l’interprétation de l'évangile de saint Matthieu par maître Benoît de Hesse, à l'époque du concile de Bâle. Ces traités se trouvent en ms. à la bibliothèque universitaire de Cracovie, sous les numéros 1366 et 1368. En général, c’est Nicolas de Lyre qui a été l’autorité principale de l’université de Cracovie dans le domaine des études bibliques.

Jean Dlugosz (1415-1480) est le représentant le plus remarquable de l’histoire ecclésiastique du xve siècle en Pologne. Jeune homme, il séjourna à la curie de l'éminent évêque de Cracovie, Zbigniew Olesnicki, devint chanoine et, à partir de 1407, précepteur des fils du roiCasimir Jagellon : l’aîné, Ladislas(quidevint plus tard roi de Bohême et de Hongrie), saint Casimir, trois rois successifs de Pologne : Jean Olbracht, Alexandre et Sigismond, et enfin le cardinal Frédéric. Jean Dlugosz mourut archevêque nommé de Lwôw. C'était un homme de caractère irréprochable, de grand savoir, catholique ardent et grand patriote. Son œuvre principale est : Ilistoria polonica en douze livres, dont les deux derniers, les plus considérables, contiennent la description des événements contemporains de l’auteur. Cet ouvrage contient un grand nombre de données concernant l’histoire de l'Église de Pologne. Ses autres travaux se rapportent directement à l’histoire de l'Église, ce sont : Vita bealissimi Stanislai (l'évêque martyr de Cracovie, xie siècle), et Vita beatx Kingse (la bienheureuse Kinga ou Cunégonde, 1224-1292), femme du prince polonais Boleslas le Pudique (Pudicus), et surtout les catalogues des évêques polonais et le Liber beneficiorum diœcesis Cracoviensis, qui est une source inappréciable en ce qui concerne les rapports ecclésiastiques, politiques, économiques dans la majeure partie de la Pologne de cette époque. Le diocèse de Cracovie occupait, en effet, jusqu’au temps des partages de la Pologne, un très grand territoire et comprenait les diocèses actuels de Cracovie, Tarnôw, une grande partie des diocèses de Kielce et de Sandomierz, une partie enfin des diocèses de Czestochowa et de celui de Lublin. Un grand amour de la vérité caractérise les œuvres de Dlugosz ; il utilise pour son récit d’abondantes sources qu’il a réunies avec soin et introduit une critique, rare à son époque, dans leur appréciation. Sous ce rapport, Dlugosz distance de

Façon remarquable les anciens chroniqueurs aussi bien que ceux qui lui sont contemporains ; il est véritablement le père de l’historiographie moderne et « termine dignement le Moyen Age polonais », selon l’expression du savant Alexandre Bruckner, professeur à l’université de Berlin.

III. Époque de la Réforme.

Le protestantisme apparut de bonne heure en Pologne (le premier procès contre les novateurs religieux eut lieu en 1528) et se développa dans la plus haute noblesse, si bien que, vers la fin du règne du dernier des Jagellons, Sigismond II Auguste (1548-1572), la plupart des membres du Sénat appartenaient à diverses fractions du protestantisme ; les calvinistes étaient les plus nombreux en Pologne. Les nouveautés religieuses ne pénétrèrent cependant point dans la petite noblesse fort nombreuse, ni dans le peuple des campagnes. En général, on peut dire que le protestantisme, comme doctrine, ne prit pas profondément racine en Pologne. Il n’avait pas de sérieuse raison d'être, mais plutôt une raison de caractère social : la noblesse enviait au clergé ses grands privilèges d'État, ses dîmes et ses biens immenses et mieux aménagés que les siens propres. D’autres facteurs y coopéraient, comme, par exemple, l’influence des courants de culture et d’idéologie étrangères sur la jeunesse polonaise, qui s’instruisait en grand nombre dans les universités allemandes. Le protestantisme, par ailleurs, flattait aussi les faiblesses humaines. Le calvinisme surtout était nocif, accordant des droits fort larges à l'élément laïque, dans la vie des communautés, et attirant ainsi de son côté la noblesse dans sa lutte contre le clergé. Sur le territoire polonais existaient encore les traditions conciliaristes de l'époque du concile de Bâle et les conceptions d'Église nationale, dont le mémoire de Jean Ostrorôg est l’expression.

Mais, d’autre part, le protestantisme polonais ne fournit aucun théologien éminent, sauf peut-être Jean Laski (1499-1560), neveu de l’archevêque de Gniezno du même nom († 1531). Il ne compta guère que des polémistes de second ordre et quelques doctrinaires fanatiques, il ne forma point d'école théologique, son influence n’atteignit pas profondément l'âme de la société. La cause du protestantisme en Pologne fut liée fréquemment à la question des rapports temporels avec l'Église, qui laissaient beaucoup à désirer et contribuaient au fait que de nombreux catholiques, orthodoxes au point de vue dogmatique, favorisaient le courant novateur. Après le concile de Trente, une véritable réforme se fit rapidement ; les évêques, peu zélés ou indécis en matière de foi, par exemple le primat de Pologne, l’archevêque de Gniezno, Jacques Uchanski, qui inclinait sensiblement du côté de l'Église nationale († 1581), cédèrent la place à des hommes pleins de ferveur apostolique. Les ordres religieux commencèrent leur activité ; les jésuites surtout, arrivés en 1564 en Pologne ; le clergé séculier devint aussi plus actif. Dès lors, le protestantisme perdit tous ceux qui voyaient en lui un moyen d’améliorer la vie ecclésiastique et il s’affaiblit de plus en plus, tout spécialement par le fait des antitrinitaristes, qui montrèrent assez de ténacité en Pologne et furent vivement combattus par d’autres fractions protestantes. Dans la première moitié du xvie siècle, en effet, des théories se répandent en Pologne, niant le dogme de la sainte Trinité. Ces théories furent prêchées à partir de 1551 par Lelius Socin et surtout par son neveu Fauste Socin, qui passa la plus grande partie de sa vie (1579-1604) en Pologne (les antitrinitaristes étaient nommés ariens en Pologne). Des querelles, nées d’un doctrinarisme sectaire, rendaient impossible la création d’un front anticatholique unifié, ce à quoi Jean Laski tendit en vain et ce qu’on essaya d’in-