Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 12.2.djvu/517

Cette page n’a pas encore été corrigée
2465
2466
POLOGNE. L’EGLISE ORTHODOXE


fidèles du rit byzantin. Elle regagna ainsi les terri- : toires occupés par les Autrichiens avec leur population uniate et une partie importante de ceux occupés autrefois par les Russes, où l’union existait jadis. Les uniates forment aujourd’hui trois diocèses : Lwôw, Przemysl, Stanislawôw et comptent à peu près 3 500 000 tidèles. Les schismatiques en comptent environ 3 800 000, donc, après les catholiques, ils constituent le groupe religieux le plus considérable et représentent 12% de la population.

Depuis 1924, cette Église dissidente, appelée prawoslawna, « orthodoxe », en dépendance jusqu’alors du patriarcat moscovite, s’est constituée en Église autocéphale sous le nom de : sainte Église polonaise autocéphale orthodoxe.

A la tête de pette Église, il y a un métropolite qui réside à Varsovie ; on lui a décerné le titre de makariotès, « Sa Béatitude », titre donné jusqu'à présent à quelques patriarches seulement. La métropole est composée de cinq diocèses : Varsovie (métropole), Vilna, Grodno, Polésie et Volynie. Les Ordinaires de Vilna, de Grodno et de Polésie (Pinsk) portent les titres d’archevêques ; le diocèse de Volynie est gouverné par le métropolite de Varsovie lui-même. L'Église orthodoxe compte en Pologne environ 1 000 paroisses, plus 300 églises fdiales, et environ 800 autres qui ne sont pas soutenues par l'État, ce qui fait ensemble 2 100 églises et chapelles. Les prêtres sont au nombre de 2 000, dont 150 moines.

Pour l'éducation du clergé schismatique il y a à Varsovie, à l’université d'État, l’institut de théologie orthodoxe, et, de plus, deux séminaires ecclésiastiques à Vilna et à Krzemieniec ; tous ces instituts ont des internats. L'Église schismatique possède des propriétés rurales et d’autres biens qui rapportent environ 1 500 000 zlotys de revenu par an ; en outre, l'État contribue à son entretien par une subvention qui s'élève à peu près au même chiffre.

Les relations de l'Église schismatique avec le gouvernement sont réglées par des « lois provisoires », publiées par le ministère de l’Instruction publique en 1922. Ces lois, tout en étant très favorables à l'Église orthodoxe, réservent pourtant un certain droit de contrôle sur les nominations des évêques et des bénéficiers, sur l'éducation du clergé et sur l’administration des biens ecclésiastiques. Les relations de cette Église avec l'État doivent être définitivement réglées au concile de cette Église, concile dont on parle déjà depuis plusieurs années. Le décret du président de la République du 30 mai 1930 a décidé la convocation de ce concile ; la chose, toutefois, n’est pas encore sortie du stade de préparation et la date du concile n’est pas encore fixée. Le gouvernement exerce une grande influence sur les travaux des commissions préparatoires. Entre autres choses, le futur concile doit s’occuper de l’organisation intérieure de l'Église, de son administration, de la vie religieuse de ses fidèles, de ses confréries, de ses congrégations, etc. Les travaux avancent très lentement car, outre l’intervention du gouvernement, il y a, au sein de l'Église orthodoxe elle-même, des différences de point de vue sur la nature de l'Église et sur ses institutions fondamentales. Il y a notamment de grandes controverses entre les conceptions épiscopale, conservatrice et démocratique-progressive.

La question nationale constitue une autre difficulté pour la vie de l'Église orthodoxe en Pologne. La majorité de son clergé a été élevée dans l’idéologie du nationalisme russe, qui ne voulait pas reconnaître l’existence ethnique des Ukrainiens et des Blancs-Russiens ; cependant, ces nationalités qui constituent presque le total de la population schismatique en Pologne, prennent conscience de leur originalité nationale et

demandent la reconnaissance de leurs droits dans l'Église.

L’existence de cette confession constitue pour l'Église catholique un grave problème missionnaire. L’idéal de l'Église catholique est de ramener toute l'Église dissidente à l’unité de la religion sous le pouvoir du pape tout en lui laissant son rit byzantin. En un mot, il s’agirait de reconstituer l’union créée à Brzesc, à la fin du xvr 3 siècle, et supprimée plus tard par le gouvernement russe. La chose est d’autant plus désirable que près de la moitié de la population appartenant au groupe ruthène et habitant le territoire de l’Etat polonais fait partie de cette union (Ukrainiens de l’ancienne Galicie). Pour cette raison, on a inauguré, en 1923, l’action missionnaire dans les parties orientales de l'État polonais, parties qui étaient autrefois occupées par les Russes.

L’action néo-uniate a été confiée par le Saint-Siège aux évêques latins des diocèses dans lesquels la population schismatique vit en masse compacte. Ce sont les diocèses de Vilna, Pinsk, Luck, Siedlce et Lublin. Cette action consiste à créer, pour les convertis qui veulent garder leur rit, des paroisses du rit oriental (dit rit grec, slave-oriental ou byzantin). Ces paroisses sont desservies par les prêtres du même rit, mais restent sous la juridiction des évêques du rit latin. Il y a jusqu'à présent environ 40 paroisses de ce genre dans les diocèses nommés ci-dessus, avec une population de 25 000 fidèles environ. Les prêtres qui assurent le service dans ces paroisses se recrutent parmi ceux qui étaient autrefois schismatiques, ou dans le clergé « uniate » de l’ancienne Galicie, ou bien encore parmi les prêtres latins qui passent au rit byzantin. Outre les prêtres séculiers, il y a tout le clergé régulier des anciens ordres orientaux, basiliens et studites, et le clergé des ordres latins comme les rédemptoristes, les jésuites, les capucins qui ont créé des sections orientales, lesquelles travaillent à cette action. Les jésuites ont créé un noviciat du rit byzantin à Albertyn. Le nombre total des prêtres occupés à cette action ne dépasse pas, jusqu'à présent, une cinquantaine.

On a -créé aussi des congrégations féminines du rit byzantin, et notamment les missionnaires du cœur de Jésus avec maison mère à Vilna et les filles de Marie avec maison mère à Zarzecz, non loin de Pinsk. Pour l’instruction du clergé séculier du rit byzantin on a fondé à Dubno (Volynie) un séminaiie qui a été, en 193', définitivement constitué comme séminaire pontifical et confié aux jésuites. La même année, le Saint-Siège a envoyé à ces paroisses uniates un visiteur apostolique, Mgr Nicolas Czarnecki, évêque titulaire de la congrégation des rédemploiistes. Dans les années 1930, 1931, 1932 et 1933, sur l’initiative de feu Mgr Sigismond Lozinski, évfque de Pinsk, il y eut, dans cette localité, des conférences organisées pour traiter des questions théoriques et pratiques liées à cette action.

L'œuvre de l’union rencontre des grandes difficultés non seulement de la part du clergé schismatique, mais aussi de la part des milieux politiques qui sont inspirés par certaines susceptibilités nationalistes et étatistes. Tout cela provoque une vive polémique dans la presse. Dernièrement, on a fondé un périodique Oriens, paraissant tous les deux mois, et qui a pour but de présenter cette action du point de vue catholique. L’Oricns est publié par la mission des jésuites.

E. Likowskï, Unja Brzeska, Poznan, 1890, le même, Dzieje Kosciola unickiego na Litwie i Rusi w XVII i XIX wiekit, 2 vol., Varsovie, 1906 ; J. Pelesz, Geschiehte der Union der ruthenisclien Kirche mil Rom, Vienne, 1878 et 1881 ; A. Boudou, Le Saint-Siège et la Russie, t. i.