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POLIGNAC (MELCHIOR DIS) — POLITI (LANCELOT


auditeur de Rote, en remplacement de La Trémoille, nommé cardinal. Après diverses négociations heureusement terminées (Mémoires du marquis de Sourehes, édit. Cosnac et Pontal, t. xii, p., 297-310), il fut lui-même créé cardinal, le 18 mai 1712. Disgracié de nouveau, après la mort de Louis XIV, il se retira dans son abbaye d’Anchin. II assista au conclave, qui élut Benoît XIII, en 1724, et fut chargé des affaires de France, de 1724 à 1732 ; il assista au conclave qui élut Clément XII et travailla très activement à régler la question de la bulle Unigenilus, qui divisait toujours les esprits. On trouve, dans ses dépêches, le récit des nombreuses démarches qu’il fit alors pour concilier les deux cours. Entre temps, il avait été nommé archevêque d’Auch, en 1726 ; il fut sacré à Rome, le 19 mars 1726. Il avait été élu à l’Académie française, en 1704, comme successeur de Bossuet ; il fit partie de l’Académie des inscriptions— en 1715 et de l’Académie des belles-lettres en 1717. Il eut de nombreuses abbayes : Bonport en 1693, Bégard en 1707, Mouzon en 1710, Corbie en 1713 et Anchin en 1715. Il mourut à Paris, le 20 novembre 1741.

On trouve du cardinal de Polignac de très nombreuses dépêches, aux archives des Affaires étrangères, Correspondance de Rome, t. dclvi-dccxxxii. Il laissa en manuscrit un ouvrage, en vers latins, intitulé Anti-Lucretius sine de Deo et natura, qui fut publié, après sa mort, par son ami, l’abbé Charles d’Orléans de Rothelin, 2 vol. in-8°, Paris, 1747, avec des notes de Lebeau, et 2 vol. in-12, Paris, 1748. Polignac avait composé cet écrit pour réfuter les arguments d’Épicure et surtout de Lucrèce, que Bayle avait recueillis dans son Dictionnaire critique, contre les vérités de la religion chrétienne. Quoique resté manuscrit, l’ouvrage était connu, en certaines de ses parties, et avait été fort apprécié de ses lecteurs. L’ouvrage est divisé en neuf livres : morale et physique d’Épicure, le vide, les atomes, le mouvement, l’âme, les bêtes, les différentes espèces, l’astronomie, la terre et la mer (Mémoires de Trévoux, février, mars et mai 1748, p. 197-220, 471495, 769-798, 1071-1107). L’auteur combat avec force les arguments du matérialisme et développe les preuves de la spiritualité, de l’immortalité de l’âme et de l’existence de Dieu. Bougainville en donna une traduction très appréciée, sous le titre Anti-Lucrèce, poème sur la religion naturelle, 2 vol. in-8°, Paris, 1749, et 2 vol. in-12, Bruxelles, 1760 (Mémoires de Trévoux, avril, mai et août 1749, p. 581-594, 1072-1088, 15181539). Migne a reproduit cette traduction dans les Démonstrations évangéliques, t. viii, col. 972-1268. L’abbé Bérardier a donné une traduction, en vers français, de cet ouvrage, 2 vol. in-12, Paris, 1786, et Fr. Ricci en a publié une traduction italienne, 3 vol. in-12, Vérone, 1767. Mairan, dans l’éloge qu’il fit de Polignac, à l’Académie des sciences, le 24 avril 1742, donne une analyse détaillée du célèbre écrit du cardinal.

Outre cet ouvrage, on a de Polignac le discours qu’il prononça à l’Académie française, le 2 août 1704, comme successeur de Bossuet (Mémoires de Trévoux, octobre 1704, p. 1703-1710) et une Lettre sur l’âme des bêtes, adressée à Racine fils (Journal des savants de 1747, p. 213).

Michaud, Biographie universelle, t. xxxiii, p. 619-021 ; Hoefer, Nouvelle biographie générale, t. xl, col. 607-610 ; Moréri, Le grand dictionnaire historique, édit. de 1759, t. viii, p. 430-431 ; Quérard, La France littéraire, t. vii, p. 249-250 ; Feller-Weiss, Biographie universelle, t. vi, p. 618-6211, reproduit dans Migne, Démonstrations évangéliques, t. viii, col. 965-968 ; Éloge par Mairan, dans les Mémoires de l’Académie des sciences, le 24 avril 1742, et par de Boze, dans les Mémoires de l’Académie des inscriptions ; Charlevoix, dans les Mémoires de Trévoux, de juin 1742, p. 1053-1091 ; Saint-Simon, Mémoires, édit. Boislille

et Lecestre, t. iii, p. 301 : I. iv, p. 132-136, 176-177, 204-206, 211-213 ; t. mu, p. 211-217 ; t. xv, p. 171-173, 171-177 ; I. xvi, p. 408-413 ; t. xxiii, p. 208-271, 407-409 ; I. xxxiii, p. 112-113 ; d’Argenson, Mémoires ; Ghrysostome Faucher,

Histoire du cardinal de Polignac, 2 vol. in-12, Paris, 1777 ; .Jean, Les évéques et les archevêques de France depuU 1682 jusqu’en 1801, p. 05-00 ; Kirrhenlexicon, t. x, col. 183 ; Hurter, Nomenclature’édit., t. rv.col. 1386-1387.

.]. Carrkyre.

    1. POLITI Lancelot##


POLITI Lancelot. — Ce dominicain italien du xvie siècle est connu communément sous son nom de religion : ambroise catharin. Il faut d’abord éviter de confondre cet Ambroise Catharin-Lancelot Politi avec son confrère dominicain et compatriote siennois Ambroise Catharin Spannocchi, qui vécut plus d’un siècle après et écrivit un ouvrage de spiritualité. Voir Échard, Scriplores ordinis prædicalorum, t. ii, p. 736. Ambroise Catharin Politi a joué dans les débats théologiques du xvie siècle un rôle qui, à divers érudits théologiens, parut relever davantage de l’histoire anecdotique du concile de Trente que de l’histoire des progrès doctrinaux. Aussi, ayant à traiter de ce penseur très personnel dans ce Dictionnaire au mot Catharin, le R. P. Mandonnet se résolut-il à renvoyer à Politi. nom de famille du fameux théoricien et controversiste, une étude détaillée qu’il était peut-être seul à pouvoir mener à bien. Il est vrai que le R. P. Mandonnet a lui-même résolu quelques-uns des points les plus litigieux et les plus importants de l’action doctrinale d’Arabroise Catharin. On trouvera ces précisions et les jugements de valeurs, peut-être sévères mais à coup sûr intéressants, qui les accompagnent, en divers endroits du présent Dictionnaire (voir art. Cajétan, t. ii, col. 1329, et Frères prêcheurs (La théologie dans l’ordre des), t. vi, col. 914-916). Xous sommes obligés de nous borner nous-même, ici, à une notice biobibliographique, mentionnant seulement au passage les thèses caractéristiques de la théologie personnelle hardie de Catharin-Politi. Nous insisterons pourtant sur le caractère sérieux de ses thèses théologiques. Il ne faut pas suivre certains confrères dominicains de Catharin qui l’ont dépeint comme un intrigant ou comme un traître aux doctrines thomistes. Xous aurons l’occasion de le trouver, en des circonstances troublées, beaucoup plus fidèle qu’on ne l’a dit aux traditions séculaires de l’Église et même à celles de sa famille religieuse. S’il lui est arrivé de manifester des opinions indépendantes jusqu’à l’audace, il le fit toujours avec un courage remarquable qui savait s’entourer de manières relativement modérées. Certes, nous ne pouvons nous attacher à réfuter des légendes misérables comme celles qui le représentent mourant, abandonné de tous et pleurant ses fautes, alors qu’il mourut archevêque, au comble des honneurs et de la célébrité, parfaitement vénéré de toutes les autorités de l’Église et en particulier du pape, qui avait été son disciple. — 1° Orientation antiluthérienne de la théologie de Catharin. 2° Scotisme, thomisme, prémolinisme de Catharin. 3° Catharin au concile de Trente.

I. Orientation antiluthérienne de la théologie de Catharin. — La date de naissance de Lancelot Politi, le futur Ambroise Catharin, a été placée par les uns en 1483, par les autres en 1487. Joseph Schweizer semble l’avoir fixée à 1484, Ambrosius Catharinus Politus, p. 8-9. (Échard, Scriplores, t. ii, p. 144, s’était arrêté à la date de 1487 qui semble moins juste). D’abord à Sienne, son pays natal, puis en diverses villes italiennes, il se livra à de fortes études juridiques avant de prendre l’habit dominicain au couvent de Saint-Marc. Il avait été à Sienne professeur de droit et il compta même parmi ses étudiants Jean-Marie del Monte qui. avant de devenir le pape Jules III et d’élever Ambroise Catharin à de hautes prélatures, sera cardinal au concile de Trente et y utilisera déjà