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POLE (RECXINALD) — POLIGNAC (MELCHIOR DK


Montague, le frère aîné, fut exécuté en 1538. La comtesse de Salisbury, mère de Pôle — la « dernière des Plantagenets cueillit à son tour la palme du martyre, en 1541. Elle a été béatifiée en 1886. Pendant ce temps-là, Polo, après avoir rempli une importante légation en Espagne, en 1539, était devenu, en 1541, légat du Patrimoine, avec résidence à Viterbe. Autour de lut et de ses familiers, Alvise Priuli, Pietro Carnesecchi, Marcantonio Fiaminio, Vittorio Soranzo, Apollonio Merenda, etc., se groupaient des amis, que la voix publique surnommait les spirituali. Au premier rang de ces « spirituels » se distinguait l’illustre poétesse Vittoria Colonna. L’Inquisition romaine devait, quinze ans plus tard, s’inquiéter des conversations tenues dans ce milieu. Nous savons, par le procès de Carnesecchi, que l’on y embrassait avec ferveur l’opinion répandue depuis peu, grâce à Contarini, qui l’avait acceptée au colloque de Hatisbonne (1541), de la « double justice ». Cette opinion semble avoir été commune chez les augustins au début du siècle. Luther l’a, suivant toute vraisemblance, reçue de ses supérieurs, lors de son séjour à Rome, en 1510-1511. Elle lui servit de point de départ, pour évoluer vers la théorie de la justification par la foi seule. On la trouve — équivalemment — dans ses Commentaires sur les Psaumes de 1513-1514. Albert Pighi et Gropper lui avaient donné une forme scientifique. Voir ci-dessus, col. 2100. Sous cette forme nouvelle, elle consistait à distinguer deux « justices », celle de l’homme, acquise par l’effort et les œuvres, toujours insuffisante qustice inhérente ) et celle du Christ, nécessaire pour compléter la précédente et acquise par la foi seule qustice imputée). Séripando devait la défendre devant le concile de Trente, sans parvenir à la faire adopter. Mais, avant le concile, Contarini et Pôle pouvaient, sans crime, soutenir cette théorie qui leur paraissait si consolante et si conforme à l’idée qu’un chrétien doit se faire de la miséricorde du Christ. Pôle disait pourtant à Vittoria Colonna « qu’elle devait s’appliquer à croire comme si la foi seule devait la sauver, et, d’autre part, s’appliquer à agir comme si le salut consistait dans les œuvres ». Procès de Carnesecchi, dans Miscellanea cii storia palria, t. x, Turin, 1870, p. 125.

Pôle fut nommé, en 1542, légat du pape au concile. Il composa, pour soutenir l’opinion de son ami Contarini, qui venait de mourir, un Traité de la justification, qui ne fut publié qu’en 1569, à Louvain. A la mort de Paul III, il faillit bien être élu pape, en décembre 1549. Jamais il ne montra plus de grandeur d’âme qu’en cette circonstance. Il ne lui manquait qu’une voix pour être élu..Mais il ne se permit ni une parole, ni un geste pour obtenir cette voix ! Retiré après le conclave à Magugnano, sur le lac de Garde, il reçut là, en 1553, la nouvelle de l’avènement de Marie Tudor. Jules III le nomma aussitôt légat pour l’Angleterre. Mais les circonstances politiques retardèrent longtemps son entrée dans ce pays, en particulier l’affaire du mariage de Marie Tudor avec Philippe II, auquel on le disait opposé. Son voyage de Calais à Londres ne put avoir lieu que vers la fin de novembre 1554. Ce fut un véritable triomphe. Le 24 novembre, il absolvait solennellement le royaume des censures pontificales. Au début de 1555, il obtenait du Parlement la reconnaissance officielle de la suprématie du pape. C’est alors qu’il reçut le siège primatial de Cantorbéry, fut ordonné prêtre, le 20 mars 1555, et sacré évêque, le 22. L’année suivante, il tenait un synode et faisait la visite de son diocèse. Il faisait imprimer un livre intitulé Reformatio Angliæ. Cependant, l’ardent Carafa était monté sur le trône pontifical, sous le nom de Paul IV (23 mai 1555). Il était peu après entré en guerre contre l’Espagne. Philippe II avait entraîné dans le conflit le royaume de sa femme, Marie Tudor.

Paul IV se souvint alors des opinions suspectes soutenues par Pôle sur la justification. Déjà, au conclave de 1549. il était intervenu contre sa candidature, pour la même raison. Il priva Pôle de son titre de légat et le somma de comparaître à Rome, pour y répondre du crime d’hérésie. Paul IV avait fait arrêter, pour le même motif, le cardinal Morone, un ami de Pôle, qui avait adopté ses idées sur le point incriminé. Pôle se justifia par écrit. Mais il mourut, le 18 novembre 1558, un jour après la reine Marie Tudor, assez à temps pour échapper à une condamnation formelle et pour ne pas voir son pays retourner, avec Elisabeth, au schisme et à l’hérésie, auxquels il avait eu le bonheur de l’arracher provisoirement.

Pôle est une noble figure. Il était pieux, instruit, de caractère élevé et de conduite exemplaire. On n’a pu lui reprocher que sa complaisance pour Henri VIII, au début de l’affaire du divorce, et sa participation aux rigueurs inévitables qui accompagnèrent la restauration catholique sous la reine Marie. Inutile de dire qu’il ne fut jamais formellement hérétique, bien que son opinion de la double justification ait été repoussée par le concile de Trente.

I. Sources.

Quirini, Collectio epistolarum Reginaldi

Poli, 5 vol., Brescia, 1744-1757 ; au t. i er de ce recueil, se trouve la Vie de Pôle par Lodovico Beccadelli. — Les œuvres diverses de l’oie n’existent que dans les anciennes éditions. On a signalé les principales. Voir aussi Schelhorn, Amœnitates historiæ Ecclesiie, Francfort et Leipzig, 1737, p. 1-276 ; Calendar oj State papers (Henry VIII), édité par Brewer. Documents manuscrits de la bibliothèque de Corpus Christi Collège, à Cambridge.

II. Travaux.

Généralités.

Pastor, Geschichle der

Pdpsle, t. v et vi ; Gairdnèr, The English Clmrch in the XVIth century from the accession oj Henry VIII to the denth oj Mary, Londres, 1902. — 2° Monographies. — Vita R. Poli S. R : E. card., ilalice scripta a />. Beccatello, latine reddita ab A. Dudithio, Venise, 1563, Londres, 1690 ; J.-G. I.ee, Reginald Pote, Londres, 1888 ; Zimmermann, Kardinal Pôle, sein Leben und seine Schriften, Ratisbonne, 1893 ; Gairdnèr, dans Dictionary oj national biography ; Benrath dans Protestantische Realencyklopddie ; Sclileclit, dans Kirchliches Handleîikon.

L. Cristiani.

    1. POLIGNAC (Basile de)##


1. POLIGNAC (Basile de), du tiers ordre franciscain. Originaire de Polignac, bourg de la Haute-Loire, près du Puy, ou de Poligny (Jura), et non de Polignano (province de Bari, dans les Pouilles), Basile était Français et nullement Italien. Il fut un disciple fervent et un admirateur zélé d’un autre tertiaire franciscain, le bienheureux Raymond Lulle. Il est l’auteur d’un Commentarium in metaphysicam ou Tractatus de ente universalissimo secundum Raymundum Lullum, ainsi que de Commentaria in artem Raymundi Lulli. Il mourut à Paris le 28 mai 1645.

L. Wadding, Scriptores ordinis minorum, Rome, 1906, p. 40 ; J.-H. Sbaralea, Sapplementum ad scriptores ordinis minorum, t. i, Home, 1908, p. 127.

Am. Teetært.

2. POLIGNAC (Cardinal Melchior de) (16611741), né au Puy-en-Velay, le. Il octobre 1661, fit ses études à Paris, au Collège de Clermont, chez les jésuites, et sa philosophie au Collège d’Harcourt, où il défendit les thèses d’Aristote et celles de Descartes, « avec la même éloquence et le même succès ». Ses thèses de théologie en Sorbonne lui valurent de grands éloges. En 1689, il accompagna, comme conclaviste, le cardinal de Bourbon, après la mort d’Innocent XI, et il réussit à accommoder l’affaire des quatre articles de 1682 : à son retour, en 1692, il se retira au séminaire des Bons-Enfants, mais, dès l’année suivante, en 1693, Louis XIV l’envoya comme ambassadeur en Pologne. Disgracié en 1698, il fut exilé dans son abbaye de Bonport, où il resta jusqu’en 1702. En 1706, il fut nommé