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IMIOTIN DE SIRMIUM


tenus à Milan en 345 et en 347 confirmèrent la sentence portée contre lui à Antioclie, et cette mesure avait une signification d’autant plus grande que les Occidentaux n’hésitèrent pas à s’y associer. Cependant, la condamnation de Photin n’eut aucun résultat pratique : l’évêque, soutenu par ses diocésains, conserva son siège. Hilaire, Fragm. hislor., ii, 21. Tout ce que put faire le. concile de 347 fut de communiquer aux Orientaux la décision qu’il venait de prendre. Hilaire, Fragm. hislor., ii, 22. Les Orientaux répondirent assez sèchement à cette communication, en faisant remarquer que si Photin était hérétique, il devait ses erreurs à la formation théologique qu’il avait reçue auprès de Marcel. Hilaire, ibid.

En 348, semble-t-il, un nouveau synode, composé d’Orientaux, s’assembla à Sirmium même pour essayer une fois de plus de vaincre l’obstination de Photin. Hilaire. Fragm. hislor., ii, 21. Il est assez difficile d’expliquer cette réunion d’Orientaux en une ville qui dépendait alors de Constant et de l’empire d’Occident. Le témoignage même de la lettre écrite par les évêques est trop formel pour pouvoir être mis en doute. Les membres du concile n’aboutirent d’ailleurs à rien : Photin, toujours soutenu par la confiance de son peuple, demeura inexpugnable.

Ce ne fut qu’en 351 que l’on parvint à déposer l’évêque hérétique. Constant était mort et, après avoir liquidé l’affaire de Magnence, Constance était devenu le seul maître de l’empire. Il convoqua, dès qu’il le put, à Sirmium, un nouveau concile, composé d’Orientaux. Aux eusébiens de marque s’adjoignirent quelques évêques illyriens, Valens de Mursa, Ursacc de Singidunum, Sinius dont le siège est inconnu. Socrate, Histor. eccl., ii, 29, P. G., t. lxvii, col. 277 ; Sozomène, Histor. eccl., iv, 6 ibid., col. 1 120. Le but avoué de la réunion était d’en finir avec Photin. Celui-ci était un homme de ressources. Il parvint tout d’abord à esquiver le concile et obtint qu’une commission nommée par l’empereur décidât entre lui et ceux qui critiquaient sa doctrine. Constance n’aimait rien tant que les joutes théologiques : il désigna huit fonctionnaires, tous personnages sénatoriaux, d’après Socrate, Histor. eccl., n, 30, P. G., t. lxvii, col. 289, et il les fit assister de plusieurs sténographes, dont saint Épiphane a pris soin de nous conserver les noms. Hæres., lxxi, 1, P. G., t. xlii, col. 376. Ce fut devant cet aréopage que comparut Photin ; il trouva, en face de lui, pour combattre son argumentation théologique, un de ses compatriotes, Basile, qui avait été choisi par les eusébiens pour remplacer Marcel sur le siège épiscopal d’Ancyre. Basile était un homme cultivé, en même temps qu’un théologien habile ; au dire de saint Épiphane, loc. cit., qui a eu sous les yeux le procès-verbal de la discussion, il parvint à tirer au clair les erreurs de Photin. Le concile put alors, en connaissance de cause, déposer Photin, comme partageant l’hérésie de Sabellius et de Paul de Samosate. Socrate, Histor. eccl., ii, 29, col. 277 ; et il le remplaça par un Asiatique, Germinius de Cyzique, en qui les eusébiens pouvaient avoir toute confiance. Athanase, Histor. arian. ad monach., 74, P. G., t. xxv, col. 784. Avant de se séparer, le concile tint encore à promulguer une formule de foi ; celle-ci n’est autre que le quatrième symbole du synode des Enctnies de 341, grossi de vingt-sept anathématismes qui sont la condamnation des erreurs de Photin, bien qu’aucun nom propre n’y soit écrit. Athanase, De synod., 27, P. G., t. xxvi, col. 736-740.

Après sa déposition, Photin fut exilé ; nous ne connaissons rien de sa vie pendant ces années d’exil. Mais nous savons qu’il revint à Sirmium après la mort de Constance, lorsque Julien eut autorisé tous les évêques bannis à reprendre possession de leurs sièges. Julien témoigna même à Photin une particulière bienveil lance ; il lui écrivit pour le féliciter d’être près du salut et le louer d’avoir nié que celui qu’on avait cru Dieu ait pu prendre chair dans le sein d’une femme. Epist.. lxxix, édit. Bidez et Cumont, p. 146-148 ; citée par Facundus d’Hermiane, l’ro defens. trium capit., iv. 7, P. L., t. lxvii, col. 621. Ce retour de fortune fut de courte durée. En 364, Valentinien chassa de nouveau l’hérétique de sa ville épiscopale. Jérôme, De vir. ill.. 107. En vain Photin essaya-t-il d’adoucir l’empereur en lui dédiant un ou plusieurs traités. Il n’en mourut pas moins en exil, en 376.

II. Doctrine de Photin.

Nous sommes mal renseignés sur l’hérésie de Photin que nous ne connaissons que par des condamnations conciliaires ou par des résumés tardifs.

La première sentence portée contre lui, celle du concile d’Antioche de 345, rapproche sa doctrine de celle de Marcel d’Ancyre, mais nous ne savons pas si Photin se rattachait exclusivement à Marcel, dont il poussait les théories jusqu’à leur aboutissement logique, ou bien s’il avait subi d’autres influences et s’il se proposait de reprendre, avec quelques modifications jugées indispensables, l’enseignement de Paul de Samosate. Au début du ve siècle, Aponius, dans son Commentaire du Cantique des cantiques, lui attribue ces formules : Tanla multitudo Christorum vel Salvalorum per momenla fil, quanti reperti juerint, qui sermone doctrinse suse et exemplo vilæ suse homines ad vitam immaculatam potuerinl provocare… Quisquis cujus animam sua doctrina convertit ab errore vitse suse, hu/us saluator efficitur. Com. in Cant., édit. Bottino et Martini, Rome, 1843, p. 35, 180, 220.

Somme toute, Photin enseignait que le Christ n’est qu’un homme, en tout semblable aux autres, sauf en ce qui concerne sa naissance miraculeuse. Épiphane, Hæres., lxxi, 3, P. G., t. xlii, col. 577 ; Vigile de Thapse, Dialog. contra arian., sabell., etc., P. L.. t. lxii, col. 182. Marius Mercator (ou plutôt l’auteur inconnu des douze contradictions aux anathématismes de Nestorius), P. L., t. xlviii, col. 929, prétend sans doute que, pour Photin, Jésus était né naturellement de Joseph et de Marie ; cela est probablement inexact.

Après sa naissance, Jésus s’est élevé à une plénitude de grâces de plus en plus grande, par suite de sa perfection morale, Vigile de Thapse, loc. cit. Nous pouvons, par suite, devenir semblable ; à lui, si nous nous attachons à être pleinement fidèles à la grâce divine.

Cette doctrine se rattache à celle de Marcel, en ce sens que, comme l’évêque d’Ancyre. Photin refuse d’admettre que le Verbe ait eu une subsistence personnelle avant de descendre dans le Christ : » C’est seulement depuis qu’il a pris notre chair de la Vierge, il n’y a pas encore quatre cents ans, que le Verbe est Christ et Fils de Dieu », suivant la formule condamnée par YEcthèse macrostique. Athanase, De synod., 26. Mais Photin dépasse son maître en ce que celui-ci reconnaissait la vraie divinité du Christ, tout au moins dans la mesure du possible, tandis que l’évêque de Sirmium ne craint pas de la nier effrontément.

Dans ces conditions, on comprend que les hérésiologues aient rapproché Photin de Paul de Samosate, tout en essayant de marquer la différence qui sépare les deux doctrines. C’est ainsi que Nestorius écrit : Et Paulus et Photinus hanc inter se difjerentiam habent : unus eorum Christum solum hominem dicit ; aller vero dicil quidem Verbum, non autem hoc confitetur et Deum. sed dicit Verbum istud aliquando quidem Potris nomine vocitari, aliquando autem Verbi nomine nuncupari : unde etiam hoc appellat Xoyo7râ-ropa, hoc e$t Verbum et Patrem, sive si dici possit, Verbipatrem. Accipiens ad hoc, pro sui sensus nequitia, illud bene in Evangelio dictum : In principio erat Verbum. Sermo., xii, 15, édit. Loofs, Nestoriana, p. 304-305 ; P. L., t. xlviii, col. 856.